Chapitre 45 - Partie 3

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  L'auscultation terminée, nous retournâmes dans le salon où nous attendait Kalor. Il se tendit encore plus qu'il ne l'était déjà en voyant l'expression sombre du médecin et me rejoignit sans attendre. Sa main se posa au creux de mes reins.

  –Qu'y a-t-il, docteur ?

  L’intéressée nous invita à reprendre place sur le canapé, puis attendit que nous soyons installés avant de prononcer son diagnostic.

  –L'état de votre femme est encore plus inquiétant que je ne le craignais. Elle pèse tout juste quarante-kilo et présente une légère hypertension. Cette dernière peut être dû au choc causé par la découverte de sa grossesse, mais elle est pour le moment bien présente. (Il posa les yeux sur moi.) Avec les autres troubles que j'ai abordé lors de mon premier passage et votre grossesse, je préconise l’alitement.

  Alors que j'étais assise, j'eus l'impression que le sol se dérobait sous mes pieds.

  –Je ne veux pas garder le lit, répliquai-je dans la seconde, comme par réflexe.

  –Vous devez penser à votre santé et celle de votre enfant.

  –Mais il n'y a pas...

  Il m'interrompit d'un geste de la main.

  –Tant que nous n'aurons pas obtenu les résultats de la seconde analyse, vous serez considérée et traitée comme une femme enceinte. Et une femme enceinte avec autant de complications que vous doit garder le lit.

  Non, je ne pouvais pas rester allongée dans ma couche toute la journée, être limitée dans mes mouvements.

  –J’ai beaucoup de travail, rappelai-je.

  –Vous n'avez plus à vous en souciez à partir de maintenant, me sourit-il. Sa Majesté avait déjà décidé de diviser votre charge par deux lorsque je lui ai annoncé votre gravidité, mais il m'a demandé de vous mettre à l'arrêt complet si je le jugeais nécessaire.

  La température à ma droite augmenta brusquement tandis que mon cœur manquait un battement.

  –Vous l'avez déjà dit à mes parents ? souffla Kalor.

  –Le corps médical du château a désormais pour obligation de déclarer à Sa Majesté toute grossesse royale dès que celle-ci est confirmée et de réaliser un test pour le vérifier si nous avons des doutes. Il nous l'a ordonné après avoir découvert que son Altesse votre frère avait caché la gravidité de son épouse.

  Donc la Reine était déjà au courant de l'hypothétique enfant, ce qui signifiait que la Cause le saurait sous peu. Un profond malaise comprima ma poitrine.

  –Je vois, murmura Kalor d'une voix posée.

  Mais ce ton n'avait rien de serein ou compréhensif. Il n'était qu'un masque, le calme qui cachait une tempête. Une froide colère transparaissait dans la chaleur anormale qui irradiait de son corps et dans son regard. Loin d'être idiot, le praticien le remarqua aussi et il déglutit avec difficulté avant de se tourner vers moi.

  –Pour en revenir à votre alitement...

  –Docteur, intervint Kalor, le coupant net. Si ma femme prend du repos, suit votre traitement à la lettre et vous prévient de tout changement, l'autorisez-vous à ne pas garder le lit ?

  Mes yeux s'agrandirent de surprise. Après tout ce qu'il m'avait dit avant la première venue du docteur, je ne pensais pas qu'il remettrait en question une décision médicale.

  –Ce serait mieux pour elle de rester ici, assura l'intéressé. Quelqu'un veillerait sur elle à tout heure du jour.

  –J'en fais mon affaire.

  Son insistance finit par mettre le médecin mal à l'aise. Ce dernier tenta à nouveau de raisonner Kalor, mais son air glacial lui fit ravaler ses mots avant même que l'un d'eux n'ait franchi ses lèvres.

  –Très bien, céda-t-il finalement. Je vais vous laissez une période d'essai d'une semaine. D'ici là, si je dois à nouveau intervenir pour calmer une crise de panique due à un cauchemar ou si vous n'avez repris au moins de deux kilos, vous serez alitée.

  Le poids qui pesait sur ma poitrine s'envola et un profond soupir de soulagement m'échappa. Ses exigences n'avaient rien d'insurmontables. Je pouvais le faire.

  Après que je les eus acceptées, le docteur et les infirmières s'inclinèrent, puis ils prirent congé. La porte venait à peine de se refermer derrière eux que Kalor bondit sur ses pieds, m'arrachant un sursaut.

  –Prends ton traitement, m'ordonna-t-il.

  Puis il tourna les talons et se dirigea vers la chambre. Sa brusquerie me prit de court.

  –Ton traitement ! répéta-t-il en soulevant le rideau.

  –Mais je ne suis pas...

  Il s'arrêta en plein mouvement et m'incendia du regard.

  –Enceinte ou pas, prends-le !

  Cette soudaine démonstration d'autorité me poussa au contraire à me lever pour lui faire face, croiser les bras et ne pas le faire. Kalor émit un grognement digne d'un chien.

  –Lunixa, prends-moi s'il te plaît ce maudit traitement avant que je te le fasse avaler de force.

  Je haussai un sourcil.

  –Oh, tu as glissé une formule de politesse, c'est bien. Tu retrouves un peu de civilité. Excepté que tu as aussi ajouté une menace et que tu continues à me parler comme si je n'étais bonne qu'à recevoir et exécuter tes ordres. Je suis ta femme, Kalor. Je t'interdis de me parler sur ce ton !

  Ma remarque ne tomba dans l’oreille d’un sourd et il sembla se rendre compte de son comportement. Fermant les yeux, il se força à prendre une profonde inspiration, puis posa le front contre les moulures de l'arche dissimulé derrière le lourd velours. Le voir perdre ses moyens si facilement effrita mon irritation ; je me rapprochai de lui.

  –C'est à cause de ta mère ? (Il acquiesça.) Moi aussi, ça m'inquiète, mais le docteur Lekarz va faire part de nos doutes à tes parents. Elle va devoir attendre les résultats de la seconde analyse si elle ne veut pas se ridiculiser en m'accusant alors que je ne suis finalement pas enceinte.

  –Je sais. Cependant, je ne peux pas rester dans l'incertitude aussi longtemps.

  Il se redressa et plongea son regard dans le mien.

  –Alors s'il te plaît, peux-tu vite prendre ton traitement ?

  –Pourquoi ?... Et pourquoi m'as-tu évitée l'alitement ?

  –Car tu n'aurais pas pu quitter tes appartements et nous avons besoin de sortir pour retrouver Freyja.

  –Freyja ?

  Il opina.

  –Il n'est pas question d'attendre une semaine et encore moins quinze jours pour savoir si tu es vraiment enceinte ou non. Alors dès que tu seras prête, nous irons la voir et elle nous dira tout de suite ce qu'il en est.

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