Chapitre 55 - Partie 2

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  J'aurais voulu lui obéir, mais je n'en fis rien. Il aurait fallu que je détourne le regard et j'en étais incapable. Nous avions beau avoir déjà fait l'amour plusieurs fois, jamais je n'avais vu Kalor complètement nu. Nous avions toujours été couverts par les draps, ou il avait ouvert les yeux avant moi et était parti se laver avant mon réveil.

  En cet instant, ce n'était pas du tout le cas ; rien ne le dissimulait à ma vue. Alors qu'il glissait son pied dans son sous-vêtement avec des gestes comme ralentis, je le détaillai dans un état second. Les puissants muscles de son dos roulaient sous sa peau à chacun de ses mouvements. En dessous de ses reins, deux fossettes creusaient légèrement sa chair, accentuant les reliefs de sa musculature. Leur forme de virgule guida mon regard vers son fessier ferme et légèrement bombé. Du côté de son torse, ses abdominaux parfaitement sculptés que j'avais déjà eu l'occasion de contempler à multiple reprises formaient un V prononcé au niveau de ses hanches. Mon regard s’y attarda un instant, puis descendit vers la direction qu’il semblait pointer. Vers son...

  –Lunixa !

  Je bondis sur le matelas et le drap me glissa entre les doigts. Je le rattrapai de justesse tandis que Kalor remontait son caleçon jusqu'à sa taille en me fixant avec insistance.

  –Que fais-tu ? Dépêche-toi de t'habiller, réitéra-t-il dans un murmure autoritaire. (Il passa son pantalon de nuit.) Elle arrive.

  Prenant conscience que je venais le lorgner sans aucune gêne, je refermai ma bouche encore entrouverte et m'empourprai vivement. La honte rendit mes gestes gourds. Les joues plus brûlantes que sa peau, j'eus un mal fou à retrouver le bon sens de ma tenue de nuit et ne la passai qu’au dernier moment, cachant mon dessous sous les draps dans le mouvement : une seconde plus tard, Paulina soulevait le rideau.

  Dame Nature, cela s'était joué à si peu...

  Comme j'étais censée rester à jeun jusqu'à l'auscultation, ma jeune camériste ne m'avait rien apporté à manger et me coula tout de suite un bain. Je n’y restai que le temps nécessaire, puis revêtis une chemise de jour et une robe de chambre pour dissimuler la légèreté de ma tenue. Afin de facilité le travail du médecin, Paulina me coiffa ensuite de façon à dégager mes épaules et mon visage sans alourdir ma chevelure de millier d'épingles. Ne pouvant me maquiller pour le moment, elle conclut ma toilette avec une goutte de parfum avant de se retirer.

  Kalor et moi n'eûmes guère le temps d'échanger après son départ que le médecin se présenta à son tour. À mon soulagement, il n'était cette fois pas accompagné d'infirmières. Je n'avais pas manqué d'en croiser ces derniers jours et elles s'étaient toutes montrées assez oppressantes.

  Après nous avoir salué dans les formes, le docteur Lekartz m'invita à me rendre dans la chambre pour m'ausculter en toute intimité. Je proposai toutefois à Kalor de nous accompagner puisque sa présence ne me gênait pas et qu'il allait dans tous les cas connaître les conclusions de cet examen. Le praticien commença alors son auscultation sous son regard perçant, ce qui ne semblait pas le déranger. Comme la dernière fois, il m'examina tout en me posant des questions. Avais-je bien suivi le traitement ? Avais-je de nouveau eu mes règles ? Avais-je encore été victime de terreurs nocturnes. J'aurais menti sur ce dernier point pour être certaine de m'éviter l'alitement, si Kalor ne m'avait pas jeté un regard intransigeant m'intimant de lui dire la vérité ou il s'en chargerait. Avec réticence, je fis donc part au docteur de mon dernier cauchemar.

  –Mais j'ai réussi à me reprendre en main, ajoutai-je en vitesse. Nous n'avons pas eu besoin de votre aide.

  Il jeta un coup d'œil à Kalor pour avoir confirmation avant de statuer.

  –Dans ce cas, tout va bien.

  Mes épaules se détendirent tandis qu'il reprenait son auscultation et ses interrogations. Puis la dernière étape, la pesée tant redoutée, arriva. N'ayant pas de balance dans mes appartements, j'ignorai si j'avais récupéré les deux kilos qu’il m’avait demandés. J'étais en outre à jeun et ma nuit mouvementée avec Kalor ne devait pas aider. La boule au ventre, je montai sur l'appareil en bandant mes muscles pour essayer de m’alourdir. Ces derniers se relâchèrent presque aussitôt, faisant vaciller l'aiguille, mais leur décontraction ne changea rien : j'avais atteint quarante-deux kilos !

  –Tu as reprit plus de deux kilos ? comprit Kalor, alors que le médecin haussait un sourcil surpris.

  Un immense sourire aux lèvres, je hochai de la tête avec entrain. Un profond soupir de soulagement lui échappa.

  –Tu ne vas pas être alitée, souffla-t-il.

  –En effet, confirma le docteur Lekarz.

  Il inscrivit mon poids dans son carnet, puis le referma dans un bruit sec avant de reporter son attention sur nous.

  –En toute sincérité, je ne pensais pas que vous y arriveriez, Princesse. Les résultats d'aujourd'hui sont très encourageant : vous retrouvez la ligne, avez meilleure mine, présenter une tension plus basse... Si vous continuez sur cette lancée, vous devriez vite regagnez la santé. En sachant ce qui vous attend, tout ceci est très rassurant. Aussi bien pour vous que pour votre enfant.

  Un instant de flottement suivit ses mots.

  –En parlant de l'enfant..., commença Kalor.

  –Pourriez-vous refaire le test dès aujourd'hui ? complétai-je.

  Le médecin masqua une grimace.

  –Vous souhaitez toujours le repasser ? (Nous opinâmes de concert, lui arrachant un subtil soupir.) Très bien.

  Il récupéra une seringue dans sa sacoche, y fixa un tube en verre, puis préleva mon sang. Il en remplit trois avant de ranger son matériel.

  –Quand aurez-vous les résultats ? s'enquit Kalor quand il referma sa sacoche.

  –D'ici midi.

  Et sur ces mots, il prit congé.




  Le docteur Lekarz ne nous convoqua pas avant le déjeuner. Je ne m'inquiétai pas tout de suite de ce retard et mangeai normalement, mais il se prolongea après le repas et un poing finit par appuyer sur mon estomac. Y avait-il un problème ? Le ventre noué, je me détournai de l'horloge et essayai de me concentrer sur la partition et le clavier sous mes yeux. Deux heures s'écoulèrent encore avant qu'un jeune valet vienne finalement me trouver dans ma salle de musique à la demande du médecin. Les résultats étaient enfin tombés.

  Kalor était déjà assis devant le bureau du praticien à mon arrivée. Vêtu de sa tenue d'entraînement, les mains encore enroulées de bandes de maintien et le front couvert d'une fine couche de transpiration, il avait dû quitter sans attendre une séance de combat au corps à corps pour venir ici.

  Les lèvres pincées dans une moue sombre, le praticien m'invita à m'installer à côté de Kalor, puis nous annonça les résultats du test : il était négatif.

  Un profond soulagement se déversa dans mes veines tandis qu'il nous précisait qu'il avait réalisé l'analyse deux fois pour en être certain, ce qui expliquait son retard. Je n'étais donc enfin plus enceinte à ses yeux. L'avais-je jamais été ou avais-je fait une fausse couche ? Le docteur Lekarz chercha à le savoir et me demanda si mes règles avaient été plus abondantes qu'à l'accoutumée ou si j'avais souffert de douleurs dans le bas-ventre, ce que j'infirmais. Kalor évoqua la terreur nocturne qui avait précédé le premier test et lui exposa la théorie de Freyja. Le médecin prit le temps d'y réfléchir et ne nous cacha pas son scepticisme – comme la Guérisseuse, il n'avait jamais entendu parler d'un déni de grossesse assez prononcé pour provoquer la production d'hormones de gravidité. Cependant, en l'absence d'autres explication possible, il admit que la positivité du premier test semblait bien avoir été provoqué par cette grossesse nerveuse exacerbée.

  Il ne restait à présent plus qu'à l'annoncer au reste du palais.

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