4. La fin du rêve
J'étais allongée lascivement sur l'herbe, dans les bras de mon inconnu. Sans dire un mot, il caressa ma joue, leva mon menton et pressa ses lèvres contre les miennes.
— Tu m'as ensorcelé jolie naïade, dit-il après un moment. J'aimerais que ton sort ne s'arrête jamais.
Je levais les yeux vers lui et réalisai que cet instant volé touchait à sa fin.
— Si j'en avais le pouvoir, répondis-je, ce serait le cas. Mais c'est impossible n'est-ce pas ?
Au lieu de répondre, il m'enlaça.
Au loin, j'entendis des cris qui se rapprochaient. Il dut les entendre aussi, car il tendit l'oreille et me tendit mes vêtements. Je me rhabillais de mauvaise grâce, avec mes habits humides et froids. Dès qu'il fut habillé il s'assit sur l'herbe attendant que j'aie fini, puis m'attira sur ses genoux.
— Je ne te laisserais pas partir si facilement.
Je souris et examinai son visage afin de l'apprendre par cœur. Des cris retentirent à nouveau, plus près. Je ne cherchais même pas à savoir ce qu'ils disaient. D'un doigt, je caressais ses lèvres et les embrassais tendrement.
— Je rêve ! hurla une voix derrière nous.
Je me retournais et vis un homme qui, avec un visage grimaçant de colère, n'avait rien d'un dieu. Je me relevais et m'approchais de lui les mains levées.
— Calme-toi Will, ça ne sert à rien de crier.
— Tu plaisantes, tonitrua William en colère. Je te cherche partout dans cette foutue forêt et toi tu fais les yeux doux à ce joli cœur !
— Du calme mon vieux, dit mon inconnu qui s'était rapproché de moi.
— Alors toi tu la fermes et bien comme il faut ! Et toi, ajouta-t-il en me désignant, tu viens, on rentre.
— Non.
— Pardon ? Tu viens, on a des choses à se dire !
— Non. Nous n'avons plus rien à nous dire. C'est fini. C'est clair ?
Il s'était rapproché, le visage tordu de colère. Je serrais les poings, prête à me défendre. Cependant, je n'eus pas le loisir de voir si j'allais devoir les utiliser, car mon chevalier servant m'attira prestement derrière lui. Ce geste protecteur finit de faire sortir William de ses gonds.
— Tu ne la touches pas t'entends ! beugla-t-il. T'as rien à voir là-dedans. Tire-toi joli cœur !
— Écoutez, répondit mon amant, calme, mais menaçant, elle a été très claire je crois. Alors dégage avant que ça ne tourne mal.
William hésita. Devant une armoire à glace pareille, c'était normal. D'autant que torse nu, on pouvait contempler ses muscles tout à loisir. Mon petit ami respira profondément avant de reprendre contrit :
— Chérie... Ce n'était qu'une dispute...
— Non, William. Ce n'était que notre vie depuis longtemps.
— Mais je t'aime...
On y était. Le moment où elle était toujours retournée vers lui. Ses regrets, ses remords, ses excuses. Ses promesses de s'améliorer. Le moment où elle réalisait qu'elle avait sa part de responsabilité, où elle se disait : « Allons, tu ne devrais pas te mettre en colère comme ça parce que tu trouves qu'il ne fait pas assez attention à toi. Il fait beaucoup d'efforts et toi tu le stresses encore à la maison. Ce n'est pas parce que tu ne fais pas grand-chose de tes journées que tu dois te rabattre sur lui. »
— William... pas cette fois.
Je m'éloignais de mon amant pour faire face à l'homme que j'avais cru être l'homme de ma vie. Il me regardait, bouche bée. Je n'étais plus en colère. J'étais triste. En deuil.
— Je vais aller récupérer mes affaires et je rentre. Seule. Profite bien de ton séjour, quand tu reviendras, je serai partie.
— T'es pas sérieuse chérie... murmura-t-il, sonné.
— Si William. C'est terminé.
— Je peux changer mon cœur... Je travaillerai moins...
— Arrête ! Pitié ! m'énervai-je à nouveau. Combien de fois m'as-tu dit ça ?
Il jeta un coup d'œil à mon chevalier servant, toujours immobile derrière moi.
— Allons régler ça en privé, s'il te plait.
— Mais bon sang ! Il n'y a plus rien à régler William ! Je pars. C'est tout. Il faut t'y faire. Je refuse de continuer à vivre comme ça.
— Et comment vas-tu vivre ? cracha-t-il. C'est ton rugbyman qui va t'entretenir ?
Devant ce regain d'agressivité, ledit rugbyman passa devant moi comme pour me protéger de ces propos emplis de fiel, mais ne dit rien.
— T'as couché avec lui, c'est ça hein ? C'est tes cris que j'entendais ! Salope ! continua William.
Je poussais mon amant qui avait ouvert la bouche pour répondre et lançai, amère :
— Oui ! J'ai couché avec lui et je suis une salope. Et tu sais quoi ? J'ai adoré ça.
Nous nous défiâmes du regard.
— Tu n'as qu'à rester ici pour te calmer le temps que j'aille prendre mes affaires. Adieu William.
Je partis, sans trop savoir dans quelle direction j'allais. Je m'éloignais, c'est tout ce qui comptait.
— Naïade... murmura mon inconnu qui m'avait suivi. Ça va ? Est-ce qu'il a déjà été violent ?
— Quoi ? Non ! Il est en colère, c'est tout. Ce n'est pas quelqu'un de mauvais. Jamais il ne me ferait de mal. Il est juste très stressé et... et...
Et je lui trouvais encore des excuses. Nous nous étions enfoncés dans la forêt, mais je vérifiais que William ne nous voyait pas quand mon amant me força à le regarder en me prenant par les épaules.
— Je vais te ramener à ton hôtel. Et tu y feras ce que tu veux, mais écoute-moi bien, la façon dont ce mec t'as parlé est dégueulasse. Il ne te mérite pas. Moi, je ne te traiterai jamais comme ça.
Ses yeux plantés dans les miens me suppliaient, de ne pas retourner vers William, de rester avec lui. William avait été horrible avec moi, mais n'avais-je pas été horrible avec lui ? Mon amant était magnifique, excitant, mais inconnu... et pris...
Lequel devais-je choisir ?
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