L'attente pour récupérer mes pizzas dure une éternité !

Et sur le chemin du retour un tracteur ralentit la circulation pendant quelques kilomètres. Je bous et les agriculteurs en prennent pour leur grade.

Arrivé à  la maison je constate que ma fille et ses amis sont revenus et bavardent autour de la table sur la terrasse.

C'est un soulagement... qui dure peu de temps. Brigitte et Nicolas ne sont pas avec eux !

J'interroge ma fille : « Maman n'est pas là ? »

« Elle est allée se changer »

« Et Nicolas est parti ? » J'émets un espoir...

« Non, il est aux toilettes. D'ailleurs il a du s'endormir »
Et tous de rire.

Moi je ris jaune.

Je rentre dans la maison et je croise immédiatement Nicolas qui met de l'ordre dans son pantalon.

« M. Duchemin, j'ai utilisé votre douche. Ca ne vous dérange pas ? »

Que ça me dérange ou non, c'est un peu tard.

« Non bien sûr. Faites comme chez vous »

Je m'aplatis. Je suis ridicule. Il a utilisé la douche et peut-être ma femme aussi.

Il est chez lui !!

Je gagne rapidement la chambre parentale. Brigitte enfile une jupe. Courte.

« Tu tombes bien chéri. Tu peux m'aider a fermer la jupe ? »

Elle est tout à fait naturelle. Est-ce que je me fais un film ?

Je vois le sèche-cheveux sur le lit. « Tu avais les cheveux mouillés ? »

« Non, j'ai pris une douche. Elle m'a fait du bien »

J'hallucine.

Baisée sous la douche ! Pour moi ce ne peut être que cela. Et par un copain de sa fille à quelques mètres de celle-ci.

Il ne manquerait plus qu'il enfile mes charentaises !

« Tu t'es douchée avant Nicolas ? »

« Non, nous y sommes allés ensemble »

Je blémis.

Et elle en rajoute. « Pourquoi gaspiller de l'eau par les temps qui courrent »

Elle rayonne et virevolte.

Pour mon désespoir.
« ... »

Les mots ne sortent pas de ma bouche.Et je gobe les mouches.

« Et quand le plaisir est au bout, ce serait dommage de se priver. Tu es bien d'accord ? »

Répondre par l'injure ? Salope par exemple.

J'en tombe assis sur le lit et je regarde Brigitte le regard perdu.

Hébété.

« Mais non, gros nigaud. Tu crois qu'un jeune se soucie d'un vieux pot ! »

Elle passe une main dans mes cheveux, mais je ne suis pas complétement convaincu.

« De jeunes carottes aiment les vieux pots »

« Sans doute, mais nous ne sommes pas à la brocante ici »

« Tu n'as rien d'une antiquité »

« Tu es gentil »

J'ai besoin d'être rassuré. Mes yeux ne m'ont pas trompé quand je l'ai vue sur la terrasse bien proche de Nicolas.

Et pas farouche.

Je n'en parle pas.
« Tu m'as fait marcher alors ? »

« Bien sur. Je me suis douchée avant Nicolas. Tu as couru. Si tu voyais ta tête »

Je veux la prendre dans mes bras pour me tranquiliser.
« Non, pas le temps d'un calin. Priorité à nos invités »

Elle me tire la langue et sort de la chambre.
Elle m'embrouille et elle sait s'y prendre.

Autour du salon de jardin, la bonne humeur est de mise. J'essaie de faire bonne figure mais le mal de tête me gagne. J'ai la désagréable sensation que des cornes sont en train de me pousser et tous les voient et en rient.

Je surveille Brigitte qui s'est assise à coté de Nicolas. Je guette les mains. Celles de Nicolas disparaissent par intermittence et mon esprit s'emballent.

Est-ce que je fabule ? Le mal de tête empire.

« Tu n'as pas l'air dans ton assiette mon chéri ? » Brigitte s'est aperçue de mon état second.

« Un coup de soleil sans doute »

« Oui. Il peut même provoquer des hallucinations ! »

Et elle éclate de rire. Rire qui se propage à la tablée.

Elle se joue de moi.

Poker menteur ?

Je suis poussé hors de la table de jeu.

Je finis par abandonner la partie. Le mal de tête a raison de moi et je laisse tout ce petit monde pour aller m'allonger.