La cabine
réponse à un défi
Il poussa le rideau de velours carmin. L’employé le reconnut. Sans un mot, il paya, prit le papier et descendit dans un sous-sol aux odeurs répugnantes. Cabine 7. Il se défit de son lourd manteau et eut juste le temps de s’asseoir quand le film débuta. Il ferma les yeux.
Cette première fois, si sordide, si magique. Ils étaient étudiants, sans un sou. La petite annonce était sans équivoque, mais la faim effaçait la morale et les préjugés. La banlieue lointaine, une heure de marche sous le crachin froid. Cette maison à l’activité inavouable. Le désir de s’enfuir, tué par le besoin. Il avait attendu, nu dans un peignoir nauséabond. On l’avait appelé.
Deux projecteurs aveuglants, un lit aux draps crasseux, des ombres et ELLE, aussi gênée que lui. Leurs regards s’aimantèrent. Ils étaient un. Leur étreinte les emporta loin de cette misère.
Ils sortirent ensemble et ne se quittèrent plus, soudés pour toujours. Dès qu’ils le pouvaient, ils se rencontraient, se découvraient, toujours étonnés de cette perfection, de cet emportement irrésistible.
Deux ans seulement. La maladie foudroyante. Il y a si longtemps, c'était hier.
Cette trace retrouvée si difficilement. Les yeux rivés dans ses souvenirs, il entendait ses feulements si particuliers, puis son petit cri de gorge quand elle arrivait. Ne pas regarder. Juste revivre ce moment, encore, éternellement.
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