28 Juin 2023

10h00 du matin

Émilie HANSEN, 19 ans

35ème jour du Tour du Monde à la voile en solitaire

Météo : Soleil, 30°c

Les déchetistes n’ont pas de rituels à ce que j’ai vu. Je ne les ai pas vu prier. Je ne crois pas qu’ils écrivent. Ni qu’ils lisent. Ils ne se déplacent pas de leur continent de déchets. À ce que j’ai compris, ils n’avaient encore jamais rencontré quelqu’un. Un « vugy » comme ils disent. La chose compliquée est que pour les retrouver ça va être complexe puisque leur continent est fait de déchets qui flottent et donc qui voguent au grès des courants. Je sais au moins qu’ils sont dans l’océan Atlantique et pour l’instant à côté de l’Amérique du sud-est. Je pourrais toujours essayer de revenir et de les retrouver. Mais j’ai quelques bouts du continent avec moi en attendant. Il est possible de voir que les bouts de carton que j’ai récupérer étaient dans l’eau. Qu’ils se décomposaient. Ça fait quelques grumeaux.

J’ai essayé leur méthode pour filtrer l’eau avec le sopalin. Ça fonctionne très bien. Ils mangent les algues crues puisqu’ils n’ont pas le feu. J’en ai mangé. C’est tout à fait écœurant. Le goût du sel est très présent, ce qui donne soif et coupe l’appétit. Peut-être que ça explique pourquoi ils ne mangent pas beaucoup.

22h00

Météo : soleil, 20°c

J’arrive au Brésil. Je vois la côte. Mon aventure, le temps que j’ai passé avec les déchetistes fait maintenant partie de mon passé. J’ai rencontré un peuple formidable avec lequel je n’ai malheureusement pu passer que quelques jours. Je ne pouvais réellement communiquer avec eux. Cependant, j’ai bel et bien retenu une chose : je ne suis pas épanouie dans ma vie de tous les jours. J’aime beaucoup ma famille, mes amis et Alex, je les adore même mais je vis toujours dans la précipitation, je n’ai que rarement un moment pour moi. C’est pourquoi je vais continuer mon voyage comme prévu et en profiter. Rester dans ce rêve avant de devoir revenir à la réalité. J’ai laissé une partie de moi aux déchetistes, et ils ont fait de même. Je les remercie de m’avoir fait prendre conscience que je vivais dans un monde pollué, qui court contre le temps, qui n’est jamais satisfait et qui veut toujours plus consommer.