Chapitre 2

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  Avant de faire de ces carreaux des miroirs de fortune, elle commença à s’affairer sur les épais rebords de bois ternis par la poussière. Dehors, les arbres à peine esquissés et la végétation sans détail plantaient un décor lumineux, constant, paisible ; parfaite illustration d’une journée belle et radieuse, telle qu’elle la souhaitait.


  D’un geste vif et précis, témoignage de son expérience dans le domaine, elle entreprit d’épousseter les lapins et têtes de hiboux taillées à même les poutres. Le caractère rustique de la petite chaumière n’empêchait pas pour autant la profusion des ornements et sculptures. De véritables nids à poussières que Coquette connaissait bien pour avoir passé toute son existence à essuyer, décrasser et nettoyer les lieux.


  Elle continua mécaniquement à faire glisser son chiffon le long des montants jusqu’à l’étagère en bois massif, au-dessus d’elle. Là, des brocs ébréchés, une bouteille de pèlerin et quelques bols en terre cuite avaient trouvé refuge. Elle en ôta les toiles d’araignées qui s’y étaient agglutinées, pensant qu’elle allait raviver, par ce geste, les couleurs de toutes ces babioles. Mais il n’en était rien. Chaque objet, chaque élément du décor paraissait toujours terne, flou, recouvert d’un léger filtre opacifiant. C'était comme un voile qui se superposait à tout. Seul son corps y échappait. En effet, le teint délicatement rosé et uniforme de sa main tout comme les cernes discrets et précis de ses petits doigts boudinés suffisaient à la représenter, à délimiter ses propres contours et à se détacher sans peine des alentours. Elle se surprit à admirer les détails qui la caractérisaient. Après tout, elle n’en avait jamais eu l’occasion. Jamais le temps ni la lumière nécessaire pour le faire. Coquette prit un instant pour apprécier toutes les finesses qui marquaient la différence avec son environnement. En cela, ils façonnaient sa personnalité. Elle se dit alors qu'elle était bien plus qu’un simple objet. Elle était un personnage digne d’intérêt, digne d’être animé, aimé.


  Elle alla prestement jusqu'au bac qui débordait de tasses, assiettes et divers ustensiles. Elle regarda ce tas de vaisselle qui comptait parmi les tâches qui lui étaient imposées par moments et interdites à d'autres. Elle releva la tête vers la fenêtre. Un léger sourire malicieux éclaira son visage, car aujourd'hui on ne lui demandait rien. Elle bondit alors sur le tonneau pour être à hauteur de la pompe qu'elle actionna de tout son poids, par plusieurs petits soubresauts. Chaque fois qu'elle retombait sur ses pieds, elle s'attendait à entendre les illustrations sonores qui survenaient dans ces moments pour donner un ressort comique à la situation. Mais le bac fut si vite rempli qu'elle n'eut pas le temps de percevoir le moindre son. Elle poursuivit, en silence, ces tâches qu'elle ne connaissait que trop.


Et se rappela d'hier, de cette soirée de liesse.

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