[...]

— Mais… c’est pas juste !

— Bah ! C’est comme ça ! Tu connais le fameux proverbe, non ? Les meilleurs partent toujours en premier.

— Pfff… toi tu peux parler, tu es un capitaine recruteur ! Tu peux facilement avoir accès aux meilleurs, justement !

— Calme-toi mon ami. Rappelle-toi que c’est moi qui t’ai recruté personnellement, justement.

— Je sais, je sais… C’est un honneur d’être ton second, je le pense vraiment même si je reste triste pour ceux qui m’aimaient en bas…

— C’est toujours la phase la plus difficile une fois la coalition intégrée. L’acceptation. Pour certains cela prend plusieurs siècles, pour d’autres quelques heures…

— …Il faut se mettre à notre place aussi ! Même si les raisons de notre recrutement sont nobles, la relative brutalité de notre départ est souvent source de douleurs profondes en bas.

— C’est vrai. Il n’y a pas d’échappatoire. Il nous faut les meilleurs pour protéger le Royaume.

— Mais, par exemple pour moi… qui a décidé que mon recrutement s’effectuerait par accident ?

— Mmm… les décisions sont prises plus haut, au Grand Conseil. Nous, les capitaines, nous avons ensuite uniquement accès aux choix décidés par les supérieurs. Le moyen par lequel vous êtes recrutés ne dépend pas de moi.

— Je vois… et quand tu as vu mon nom, qu’est ce qui t’a tant plu chez moi… Je veux dire… Pourquoi moi ? Pourquoi suis-je l’un des meilleurs ? J’étais un homme plutôt stressé qui voulait toujours aller trop vite.

— Ah, ah, ah ! Tu es bien curieux aujourd’hui ! C’est vrai que tu es exceptionnel. J’ai eu de la chance de te repérer avant les autres divisions. Tu as certes quelques défauts mais tu restes intelligent, extrêmement droit, loyal et travailleur.

— Et assez jeune pour couronner le tout…

— Oui… oui en effet, c’est important.

— Et pour elle ? Quel est son nom déjà… Ma… Mari… Maricia ? Pourquoi désires-tu la recruter ?

— Elle possède un talent qui nous sera déterminant dans nos futures batailles contre les forces du Néant. Elle possède une compétence de pardon maximale et son niveau d’amour n’a pas été atteint depuis 17 ans par quiconque. Il nous la faut !

— Et… rien ne peut empêcher le processus, je suppose ?

— Que veux-tu dire par là ?

— Le Grand Conseil l’a repérée et ils vous ont transmis ses compétences, à vous les capitaines. Mais tant qu’aucun de vous ne choisit de la recruter, elle reste chez elle, n’est-ce pas ?

— C’est exact. Cependant, dans son cas, elle sera vite repérée. Et, plus grave encore, elle a le cœur brisé… Comme son niveau de tristesse est tout de même assez élevé, elle peut prétendre à renforcer nos ennemis. Ce serait catastrophique.

— Je comprends. Ce sont des décisions difficiles à prendre mais nécessaires.

— Oui. C’est pour ça que les meilleurs partent toujours en premier.

— Bien. Recrute-la alors. De toute façon, elle n’a plus de famille à ce que je vois sur sa fiche. Personne ne pleurera sa disparition.

— Parfait ! J’envoie ma demande au Grand Conseil. Voilà !

— Quel moyen de recrutement te proposent-ils ?

— Attends… Huh… Ce n’est pas courant… tiens donc !

— Quoi ?

— Empoisonnement par une croquette de chien…

— En effet, c’est inattendu et presque… amusant. J’aurais préféré ce départ là, personnellement. Ah, si seulement ma petite fille savait pourquoi je suis parti si jeune… je pense qu’elle serait fière de moi.

— Evidemment. Mais tu la reverras bien assez tôt. Elle est remarquable elle aussi.

— Pas trop tôt quand même, hein ! Elle doit grandir, aimer et voyager dans le monde entier.

— Tu seras là pour la surveiller. Elle deviendra une personne admirable et inspirante.

— Oh, regarde ce petit garçon… là ! Qu’en penses-tu ?

— Oh... Bien vu. En effet… il correspond parfaitement aux critères que nous recherchons : Courage, sacrifice, dévouement… Je vais le recruter immédiatement.

— Attends… Non, il est bien trop jeune ! Ses parents seront dévastés !

— Son destin va l’amener vers nous de toute façon. C’est écrit. Je ne fais que lui construire un sentier agréable jusqu’ici. C’est un futur héros.

— Avec tant de personnes de qualité, nous ne perdrons jamais.

— Mmmm… tu oublies qu’eux aussi recrutent en quantité des individus fourbes, avides et sans pitié. C’est une bataille infinie. Une guerre éternelle !

— La bataille de la vie… et de la mort.

— Bon, retournons devant la grande porte. Le soleil se couche… Il est temps de préparer le prochain affrontement.

— Je suis prêt. Je l’ai compris maintenant : les soldats du Royaume des Cieux ne connaissent pas le repos. Ce sont les meilleurs des meilleurs.

— Et les meilleurs nous rejoignent toujours les premiers.

[...]