Il commença à baisser la tête, le poing sur la table serrée. Il semblait se battre contre quelque chose mais Luc ne savait pas quoi, il souffrait, c’était évident et pourtant Matt semblait trop fier ou bien trop stupide pour faire quoi que ce soit d’autres que d’attendre.

Luc se leva, s’approcha de son frère et lui attrapa le poing, il se mit à genou à côté de lui et venant de nulle part, il décocha un coup qui fit décoller Matt de sa chaise, lui faisant ouvrir les yeux de surprise. Luc regarda son poing, il ne comprenait pas ce qu'il venait de se passer. Il s’approcha de Matt et tout en l’aidant à se relever il s’excusa.

- Je suis désolé Matt, je ne sais pas ce qu’il vient de se passer – Il semblait embêté – Je ne sais pas ce qui m’a pris, le coup est parti tout seul.

Il semblait encore plus surpris que Matt, il regardait son poing d’un air interrogateur, il ne comprenait pas ce qu’il venait de se passer, c’était comme si son bras avait agi sans son consentement, comme un automatisme et pourtant sa tête lui disait que ce n’était pas ce qu’il aurait fait. Il réfléchissait tandis que Matt remettait la chaise en place.

- Ne t’excuse pas – Matt souriait – Pour être honnête, je suis content que tu m’aies frappé. Je crois bien que j'en avais besoin. – Il marqua une pause – Ironiquement ça m’a remis les idées en place et ma migraine est enfin passée donc ne t’excuses pas.

Matt regardait son frère avec un visage où l’on pouvait lire la gratitude. Il ne comprenait pas ce qu’il s’était passé mais visiblement ça avait permis de faire disparaître la migraine et c’était le principal.

Le soir-même, Matt rentra des cours avec un visage surpris, déconfit, Luc était dans sa chambre, sans doute en train de bosser sur un devoir quelconque. Matt le vit dans l’entrebâillement de la porte de sa chambre. La lumière de bureau éclairant légèrement cette dernière, il le voyait penché sur son bureau, le stylo à la main. Il se dirigea vers la cuisine, laissa tomber son sac de cours sur la table et commença à fouiller dedans. Il en sortit une feuille et sa trousse, les posa sur la table et déposa son sac sur le sol.

Il commença à écrire, durant 1h30 il écrivit, il aimait écrire, il trouvait ça apaisant. Il avait toujours eu une imagination débordante, pas trop, juste assez pour pouvoir créer des histoires. Il écrivit et il écrivit et lorsqu’il s’arrêta, il se relit. Il fut malheureusement tiré de sa lecture par une voix amusée qui venait de derrière lui.

- Encore en train de rêver – Luc avait le sourire aux lèvres – Je ne comprends toujours pas pourquoi t’as pas plaqué l’école pour te lancer dans l’écriture, t’as l’air d’avoir un don pour créer tes propres réalités.

- Devenir Écrivain – Matt eu l’air amusé et reposa ce qu’il avait écrit. – Et puis quoi encore, j'ai pas envie de vivre dans la misère toute ma vie. Je préfère que ça reste un hobby, c’est bien mieux comme ça. Après tout, toutes mes histoires, elles ne sont pas aussi bonnes que tu sembles le penser.

- Je sais pas – Il mit une main sur l’épaule de Matt – Du peu que j'en ai lu, t’es plutôt doué. T’as encore beaucoup de progrès à faire, il te reste des lacunes, beaucoup de lacunes à améliorer mais si tu t’entraînes, tu pourrais pondre quelque chose de pas mal.

- Merci – Matt se leva et s’étira – Mais je passe, mon cerveau est bien trop capricieux pour que je sois capable de mettre une fin à mes histoires. Ce ne serait que des ouvrages inachevés.

Ils s’assirent à table après s’être préparé à manger et ils parlèrent de beaucoup de choses : la présentation de Luc, la journée de Matt, ils ne firent même pas attention à l’heure qui passait.

- Matt, à propos de ce matin – Luc semblait gêné – Je sais que tu considères que je n’ai pas à m’excuser, mais j'ai quand même envie de le faire. Je n’avais aucune raison de te frapper et encore maintenant je ne comprends…

- Je te l’ai déjà dit, tu m’as débarrassé de ma migraine – Matt souriait – Tu n’as pas à t’excuser une seule seconde, même si tu ne l’as pas fait exprès, je suis content que tu l’ai fait, je n’ai pas eu de migraines de la journée après ça.

Luc semblait surpris, mais il poussa un soupir de soulagement. Il y avait repensé toute la journée et il n’avait toujours pas compris ce qu’il s’était passé. Il n’était pas quelqu’un de violent et s’il frappait, il y avait toujours une raison. Malgré tout, il frappait rarement et encore moins son frère.

Matt se rendit dans sa chambre, il regarda vers son miroir, regarda son propre reflet, il ne comprenait pas ce qu’il s’était passé aujourd’hui, mais il était bien content que personne n’ai pu le voir. Il regarda ses yeux, et d’un seul coup, son reflet le fit reculer, un sourire, un grand sourire, effrayant.

- Tu commences à comprendre – Il avait une petite excitation dans la voix – tu commences à réaliser ce qu’il t’arrive.

- De quoi – Matt semblait surpris – OK, apparemment je suis bien plus fatigué que je ne le pensais, je commence à halluciner.

- Tu n’as pas halluciné ce matin – Le reflet répondit sèchement – tout comme tu n’hallucines pas maintenant, je suis bien réel.

Matt passa une main devant lui et son reflet en fit de même, il décala sa tête vers la droite et son reflet en fit de même puis il se contenta de dire « bonjour » et son reflet eu les lèvres qui bougèrent en même temps.

- OK – Il sourit – Je suis juste crevé c’est bien ça, je vais dormir un peu avant de commencer à voir des éléphants roses et des licornes.

- Non, ça par contre ce serait juste complètement fou – Son reflet s’étira le cou – Désolé de te briser le mythe, mais les licornes, ça n’existe pas.

- Parce que les reflets animés ça existe peut-être – Matt avait un ton amusé – Bien Matt, tu parles tout seul devant ton miroir.

- Si ça peut te rassurer, tu n’es pas tout seul – Le reflet avait un grand rictus – après tout, je suis là et de toute façon des gens parlent devant leur miroir pour moins que ça.

- Génial, me voilà rassuré, surtout que ce n’est pas fou du tout de parler à son reflet, mais alors pas du tout – Il marqua une pause – Tu n’es que l’effet de ma fatigue.

- Nop – Le reflet avait l’air amusé – par contre je suis désolé de te dire que je suis la cause de ta migraine de ce matin et c’est loin d’être la dernière.

Matt eut l’air surpris, il leva deux doigts face au miroir et son reflet en fit de même, il appuya sur sa joue avec son index et son reflet fit de même, il sauta et son reflet fit de même. Il n’y avait rien d’anormal, il tenta une phrase « Je suis Matt » et son reflet fit de même.

– Bon, visiblement je suis crevé, – il semblait las – c’est jamais bon quand on a des alus. Je ferais mieux de me reposer ce soir.

À ces mots, il s’assit sur son lit et commença à surfer sur Internet. Des reflets qui parlent, il avait déjà imaginé plus fou. C’était l’inconvénient d’avoir une imagination fertile.