Chapitre 12
Tom et Lisa. Lisa et Tom. Ça sonne bien. Ça aurait bien donné sur un fairepart. Et c’est donc ainsi que se prénomme sa… Sa quoi au juste ? Fiancée ? Ex ? Ont-ils rompu ?
Je ne sais pas dire si je me sens soulagée de voir que cette Lisa a définitivement coupé les ponts ou tout le contraire. A la fois, j’en veux à Tom. Il semble clair qu’il a délibéré-ment ignoré toutes ces lettres. Ces appels au besoin comme elle le dit. Je ne lui connaissais pas cette partie. Avec moi, il est si doux. Si attentif. Si attentionné. Alors qu’avec cette Lisa, il a semblé réagir tout autrement et j’avoue que cela me surprend.
Je regarde dehors, la lettre toujours entre mes mains. Rien n’a bougé mais tout mon monde a été ébranlé. Cette mer azure qui scintille sous le soleil. Ce petit chemin qui descend jusqu’à la plage au sable fin et brûlant. Cette eau si délicieuse bien qu’un peu fraiche. Puis la seule et unique voile fendant les vagues. Et cet homme qui s’accroche et résiste malgré le vent qui force. Qui s’accroche à sa voile comme on s’accroche à la vie. Qui ne lâche rien et quand tombe, recommence. Encore. Infiniment. Au fond, c’est peut-être ce qu’a fait Lisa lors de cet évènement qui a l’air d’avoir bouleversé leurs vies à tous les deux. Elle s’est cram-ponnée à l’espoir que Tom revienne et à cette Gaïa pour ne pas sombrer comme moi j’ai sombré. Elle a agrippé ce qui lui restait et n’a rien lâché. Elle s’est rattachée à ses lettres comme on s’agrippe à une bouée pour ne pas couler. Puis elle a repris ses esprits sans doute. Ou a décidé que faire du surplace était une perte de temps. Alors elle a pris son courage à deux mains et a tout lâché cette fois. Elle est repartie de zéro comme on dit. Une nouvelle page à écrire. Elle s’est dit : laisse tomber. Et fonce. C’était reparti. Pas comme avant. Peut-être moins bien. Peut-être mieux. Mais c’était reparti et c’était bien là le plus important. Un peu comme un nouveau départ. Ou le début de la fin. Mais pour Tom ? Il a fui. Il n’a peut-être pas accepté ce qui s’est passé. Il n’a peut-être pas tourné la page. Qu’en sais-je après tout ?
Mon regard erre entre l’océan, cette voile rouge qui le fend et cette lettre. Et la suivante. Pas encore ouverte. Chacune des lettres jusqu’ici avait déjà été lues. Au moins, il se sera donné cette peine. Mais pourquoi pas la dernière ? Si je l’ouvre, il le remarquera à coup sûr. Mais à ce point, est-ce encore utile de se soucier de ce détail ?
Je me lève et me prépare rapidement un verre de thé glacé. La température, la tension et le stress me donnent vraiment chaud. Ce que je m’apprête à faire sera plus que décisif quant à la suite de notre relation. Tom est occupé à naviguer et il ne reviendra pas à la maison avant une heure ou deux. J’ai largement le temps. Je me réinstalle ensuite dans le petit fauteuil près de la bibliothèque. Il fait trop chaud dehors pour rester assise au soleil et bien trop frais à l’intérieur pour vouloir sortir. Alors je reste là. Pose mon verre sur la table basse en bois à ma gauche et, lentement, comme si je ne voulais pas risquer de trop déchirer l’enveloppe, je l’ouvre. La lettre semble bien plus longue. Ou plu-tôt, elle ne semble pas, elle l’est. L’enveloppe contient plu-sieurs pages rédigées à la main. Toujours la même écriture. Toujours cette même Lisa. N’avait-elle pas dit qu’elle cou-pait définitivement le contact avec Tom ? Qu’elle brisait de manière volontaire ce maigre fil qui les liait encore ? Qu’elle voulait avancer dans sa vie ? Oui, n’avait-elle pas dit tout ça ? J’avoue ne plus comprendre. Aurait-elle changé d’avis ? Peut-être n’arrivait-elle pas à se passer de Tom, même d’un Tom absent. Je m’installe au fond du fauteuil et commence ma lecture.
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