Chapitre 11
Allongée sur son lit en étoile de mer avec un félin vibrant doucement sur son ventre, Faith était totalement absorbée par le plafond de sa chambre. Tout à coup, le soyeux animal bailla d’ennui en s’étirant avant de tourner cinq fois sur lui-même et de se rallonger dans la même position qu’avant au millimètre près. Faith cligna des yeux. Le regard trouble, elle humidifiait ses yeux en les fermant, puis recommençait à observer le plafond.
Ce plafond était grand, ce plafond était de couleur unie. Ce plafond n’avait rien de spécial, pourtant on pouvait lire son histoire avec un regard attentif : les moustiques écrasés contaient d’épiques chasses nocturnes à la recherche d’un repos silencieux, quelques trous récents par-ci par-là rappelaient les événements de l’attaque de la veille, et une tache d’humidité lui servait de mémo pour qu’elle se souvienne qu’il fallait qu’elle revoie l’isolation du toit.
En gros, un plafond comme les autres : pas intéressant et que personne avec un bon sens n’observerait durant une heure s’il avait autre chose à faire.
Mais bon, voilà le problème, Faith n’avait rien à faire.
Tout à coup, son téléphone vibra. Faith, comme à une compétition de centaurball, se jeta sur l’objet, faisant voler au passage le pauvre animal assis sur son ventre. Malheureusement, il ne s’agissait que d’un démarchage d’une ses boutiques qui vous oblige à donner votre numéro pour profiter de la carte fidélité. Comment dire non au visage peiné de la vendeuse qui a déjà trois Octavia d’or en tant qu’actrice de premier ordre.
Faith grogna, elle aurait dû dire non. Alors qu’elle grommelait sur sa faiblesse face aux vendeuses, un deuxième message arriva sur son répondeur. Car lorsqu’elle reprit son téléphone en main, celui-ci se mit d’abord à beugé puis en toute simplicité s’éteignit. Maudite technologie !
Le temps qu’elle le rallume, elle du se contenter d’un message laissé sur son répondeur.
Une voix dynamique et avec un léger accent chantant grésilla à travers le haut-parleur du portable :
“Bonjour, Faith, c’est Moretti. Pour ton dernier boulot, félicitations, ça s’est bien passé vu les déboires. Et moi qui croyais que ce petit con était assez motivé pour ne pas nous lâcher. Faith imagina la femme s'empourprant de colère comme elle l’avait l’habitude de faire, les cicatrices rosissant sur son front. Fili di ghoul ! Si cet enfoiré essaie de l’ouvrir, je te promets qu’il ira finir avec les autres dans les abysses des eaux saumâtres de notre chère ville, puis se calma en prenant une voix suave. Ah les dettes et la trahison, tu connais comment ça marche. Enfin bon, malheureusement je n’ai aucun boulot pour toi. Je viens de t’en donner un il y a deux jours, donc je reste correcte avec toi. Par contre Faith, si tu connais une personne de confiance pour régler un problème interne de manière forte et discrète. Ça m’aiderait bien, et tu pourrais bien sûr servir d’intermédiaire. Bon, si tu connais quelqu’un comme ça, contacte-moi. On s’arrangera pour se rencontrer en privé.”
Faith reposa son téléphone mécontente, toujours pas de boulot à l’horizon. Et le seul qui lui restait à faire il fallait attendre ce soir et se terminerai en moins de deux heures.
Allongée de nouveau sur son lit, la tête enfoncée dans l'oreiller, elle tenta de faire la paix avec son félin. Mais, vexé de son vol plané, il se léchait les poils en snobant sa maîtresse comme les chats savent si bien faire.
— Chifer, allez, je suis désolé, minauda-t-elle.
L’animal lui tourna le dos.
— Bougon, va ! Dire que je t’ai brossé pendant au moins une heure, ronchonna la jeune femme en se levant.
Son appartement était impeccable comme jamais, en quelques heures à perdre elle l’avait nettoyer de fond en comble et de désespoir à s’occuper elle avait même nettoyer aux petits endroits cachés qu’on ne nettoie jamais, et même changer l’ampoule qu’elle devait remplacer depuis deux mois.
Au sommet de l’ennui, la jeune femme se décida à l’ultime tâche : nettoyer les feuilles de ses plantes. Ta-ron lui en avait parlé une fois, elle n’avait pas fait attention, mais bizarrement elle avait retenu ce conseil de jardinage. Cependant jusqu’à présent elle avait trouvé ça bien trop ridicule pour le faire. Mais là, elle était dans une impasse. Le ridicule commençait aujourd’hui.
Un chiffon humide à la main, elle fut arrêtée dans sa tâche par la sonnerie d’un diabolique appareil. Elle décrocha :
— Salut mon oiseau des îles, on se retrouve au bar comme prévu, salua une voix grave.
Prenant une voix incroyablement mielleuse, Faith répondit.
— Bien sûr mon chou, j’ai attendu ce rendez-vous toute la semaine avec im.pa.tience. décomposa-t-elle son dernier mot avec exagération.
— Ce corps d’Apollon te manquait.
— Comment tu as deviné ?
— Je te connais mon poussin.
Elle émit un rire suraigu fausset particulièrement désagréable.
— Bon, je dois raccrocher. À tout à l’heure, finit-il.
— À tout à l’heure.
— À bientôt. Tu raccroches ?
Elle inspira profondément avant de dire ces mots.
— Non c’est toi.
— Non c’est toi, se répéta-t-il.
— Non c’est toi.
— Non c’est toi mon pouss...
Faith raccrocha, elle pouvait faire la comédie, mais là c’était trop pour elle. Elle frissonna de sa propre prestation.
Je suppose que ça suffira.
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