La nuit dans l'ombre
La nuit coule et se contracte pour se cacher dans mes placards, effrayée par la lumière du soleil. La nuit n'a qu'un œil ici, dans ce monde, il ne brille qu'en reflet. Le soleil la domine, l'écrase sans lui accorder de paix. Mais chaque soir lorsqu'il se couche, elle peut enfin respirer.
Elle oublie qu'elle est immense, elle oublie qu'elle sera là, encore, quand l'étoile de ses peurs s'éteindra. Elle se laisse aveugler par des foutaises de photons, parce qu'elle croit ce que les hommes lui ont dit : elle ne peut rayonner par elle-même. Parfois, elle trouve suffisamment d'audace ou de colère pour oser ouvrir l’œil en plein jour, quand le soleil faiblit, ou refuse la joute.
La nuit est à l'abri dans ma maison, je lui fais l'accueil qu'elle mérite, je l'apprivoise. Un jour je l'enlacerai, un jour, elle ne voudra plus que je la quitte.Elle m'a connue enfant, nous nous effrayions mutuellement. Elle m'a cachée, comme une amie dans son giron, quand le Diable voulait frapper. Elle me parle depuis : elle souffle dans mon âme, des rêves disparus, des figures du temps, des chagrins que les Hommes et les contes du vent…
Elle enveloppe mon cœur si fort parfois, qu'il me semble qu'elle m'appelle déjà.
La nuit se cache sous mon lit, s'égare dans les ombres.
Je l'appelle à moi : je connais quelques magie pour ça.
Je ferme les volets, et les paupières, dans mon esprit, je fixe l'image des galères ; et soudain, elle est là.
La nuit parfois m'entraîne, elle embrouille mon sommeil. Quand je crois que je dors, elle m’emmène et mes rêves alors, ont une force certaine et une réalité indiscutable.
Je connais sa face obscure, celle si sombre, que je l'appelle néant et trou noir.
Quand la colère la dévore, elle « ogre » tout, vorace, furieuse et folle. Alors mon amie me manque et je me cache dans le placard d'une lumière chaude, au soleil.
Il ricane de me voir rechercher son appui. Il ricane de ma trahison, sans compassion, il me fait honte. La confusion me force à surmonter ma peur, je retourne auprès de cet obscur que je connais si bien. Et je pleure.
Elle déteste la solitude, lors la nuit me pardonne et revient. Dans mes placards et sous mon lit, dans mes rêves et dans les ombres, je la retrouve soulagée, je lui demande de m'emporter, vers ses vagues profondes tout au bout de l'univers. Je voudrais voir la porte qui mène ailleurs, loin des mensonges, loin des hommes, loin du soleil.
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