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Cher Sergey,
Un camélia pour t’exprimer mon admiration, et t’apporter mes espoirs de succès. De bien tristes nouvelles nous parviennent du front, depuis ta dernière lettre. Le désarroi se lit chaque jour davantage sur les traits de ceux qui ont tout quitté pour fuir le conflit. Je pense souvent au peuple des plaines de glace, et je souhaite de tout cœur que leur situation se dénoue au plus vite et pour le meilleur. J’ai aussi hâte que la guerre se termine pour que nous puissions enfin nous retrouver. En attendant, je devrais éviter de t’écrire des lettres pleines de soucis et de tristesse ! À partir de maintenant je vais faire mon possible pour t’apporter de la bonne humeur, bien qu’en général tu te suffises à toi-même sur ce point-là.
J’ai une information d’importance : tu avais raison au sujet de Rimsky ! Je l’ai habilement questionné un jour où je l’avais emmené faire une promenade. Il a fini par m’avouer qu’il venait du royaume, et que son frère combattait dans le camp que je perçois comme adverse. Cependant nous avons convenu que nous ne nous considérions pas comme des ennemis. Lui-même soutient plus les royaux, ce qui n’a rien d’anormal, mais il m’a assuré qu’il ne souhaitait pas ce conflit. Il n’est qu’un enfant, après tout, et voudrait juste que son frère puisse revenir. Apparemment, c’est la seule famille qui lui reste. Je lui ai promis de ne rien révéler à personne, pas même à mon père, cependant je ne sais que faire pour l’aider. Tout ce qu’il a pu me dire était que son aîné était soldat d’infanterie de la deuxième armée royale, et qu’il s’appelle Livio Shalev. Je n’ai pas osé le lui dire mais je crains qu’il me soit impossible de mener des recherches. Et je ne peux m’imaginer le laisser repartir ainsi, seul et sans défense.
Je réalise que j’ai bien dérivé de mon objectif initial, qui était de te remonter le moral… Je change donc de sujet. J’ai fini de broder ma robe, et j’ai hâte de te la montrer ! J’ai décidé de m’attaquer aux accessoires, et je compte notamment tisser un voile assorti. Il faudra que je demande du fil à Yékel, car j’arrive au bout de mes réserves. D’ailleurs, sa fille que tu avais peut-être vue quand tu es venu, Luna, a fait ses premiers pas hier ! Elle était ravie, et ses parents aussi. Je me suis dit que quand j’aurai fini mon ouvrage, je lui confectionnerai une tenue.
Je pense bien à toi et je t’embrasse,
Shynar
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