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Il dégaina lentement et se mit en garde. Avant de commencer, il repassa dans sa tête les enchaînements qu’il allait exécuter. Il débuta sans aller trop vite, puis affermit sa prise sur sa garde et ses mouvements se firent plus vifs et incisifs. Il essaya d’accélérer, se forçant à gagner en assurance. Il répéta, encore et encore, les mêmes séquences, reprenant avec plus d’obstination là où il se trouvait hésitant. Pendant de longues minutes, la salle d’entraînement vide fut le théâtre d’une lutte muette entre volonté et confiance perdue.
Une main et demi, se répétait-il mentalement, ça peut aussi se manier à une main ; il suffit d’en prendre l’habitude.
Il regrettait amèrement d’avoir développé son style en se basant avant tout sur les frappes à deux mains. Il tenta de fluidifier ses gestes, ajoutant plus de mouvements circulaires. Incapable de se satisfaire de sa performance, il complexifia l’exercice. Il mettait toute son énergie dans son épée, jugeant ses erreurs toujours plus durement.
Plus vite. Je peux faire mieux que ça.
Sa lame lui échappa de la main. Elle rebondit contre le mur avant de heurter le sol avec bruit devant ses pieds. Essoufflé, il demeura immobile, la considérant avec un mélange de colère et de découragement. Il avait encore échoué. Il se laissa tomber à genoux, abattu par sa rancœur dont il ignorait si elle était dirigée vers lui-même ou vers l’assassin. Il en avait assez de se sentir inutile, inapte à remplir le rôle auquel il consacrait sa vie depuis des années. Il fixa son poignet gauche encore enveloppé de bandages et des larmes de rage lui vinrent aux yeux. Il ne voulait plus voir sa blessure, cette affreuse cicatrice qui l’avait marqué bien plus profondément dans son âme. Cela faisait des mois qu’il se sentait diminué, incapable de remplir les plus simples missions à cause de cette infirmité. Il ne s’estimait plus de taille à affronter les dangers, et ne voyait pas d’issue à sa situation. Certes, il pouvait toujours recourir aux incantations, mais n’avait jamais considéré son pouvoir comme sa principale méthode de combat. Il refusait de se résigner, et pourtant…
Un mouvement attira son attention. Tournant la tête vers la porte, il remarqua Nikita qui se tenait sur le seuil et le regardait d’un air peiné.
« Pavel… » commença-t-il.
Celui-ci baissa les yeux et implora d’une voix sourde :
« Laisse-moi seul. S’il te plaît. »
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