Chapitre 1. Claire
Le soleil matinal rayonne de son air gai, j’entends un merle chanter à tue-tête et picorer des baies rouges sur le bord de l’allée.
La clochette de la porte tinte.
Je mets un gros sourire sur mes lèvres, prête à accueillir le premier client de la journée.
— Bonjour Claire, me dit Monsieur le Maire.
— Quel bon vent vous amène, lui réponds-je.
— La bonne odeur du pain, pardi !
Un gros rire s'ensuit soulignant la bonne blague.
— D'ailleurs puisque j'y suis, donne-moi la Campagnarde, ajoute-t-il.
Je prends le pain et m'apprête à l'emballer, quand la grosse voix continue.
— Et pas trop cuite, hein ?
Je souris, habituée à ce ton gras de bon vivant.
Je lui tends son pain et je suis surprise de le voir brandir une affiche entre ses mains.
— Tiens c'est pour toi, on est en train de préparer la plus grosse attraction de l'année.
— Qu'est-ce ?
— Une surprise ! lance-t-il dans un clin d'oeil.
Puis sans rien ajouter d'autre, il sort.
Un petit courant d'air frais vient caresser ma joue.
Nous sommes début avril et le soleil perçe à peine.
Je baisse les yeux sur la feuille et je lis
"LA GRANDE FÊTE DU VILLAGE se déroulera la 2e semaine de juin..."
Le reste se perdait dans la description des attractions.
Posant l'affiche, le regard songeur, cette fête me rappelle une autre liée à l'année de mes dix ans. L'odeur du foin coupé, la brise chaude jouant dans mes cheveux, tout me ramenait à ce passé nostalgique.
Le bruit de la porte qui s'ouvre, me rappelle la réalité.
— Bonjour Claire, une baguette s'il vous plaît.
— Oh ! Bonjour Ahmed. Comment allez-vous aujourd'hui ?
— Bien bien, répondit-il, ne laissant pas d'ouverture à la conversation.
Toujours aussi taciturne, pensai-je. Tout en le servant, je le regarde à la dérobée. Ses gestes sont brusques comme s'il voulait aller trop vite, pressé de partir pour éviter tout contact et toute discussion.
Je me suis toujours demandé de quoi il vivait, s'il était seul ou s'il avait une famille. Toujours très discret, il ne vient que rarement au café et ne participe guère à la vie du village.
Je veux néanmoins lui tendre une perche.
— Savez-vous qu'une grande fête se prépare ? Voyez, voilà l'affiche.
Je pointe du doigt le titre mais c’est à peine s’il regarde, et dans un grommellement, je l’entends dire un "merci" et sur ce, il part.
"Eh bien, ce ne sera pas aujourd'hui que nous deviendrons de grands amis !" me dis-je.
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