32.

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Le vent souffle.
Il souffle toujours fort, là où je suis.
Il souffle toujours loin. S’en va loin. Et ne reviens pas.

La brume se lève.
Elle se lève toujours tôt, là où je suis.
Elle se lève avant que je ne me couche et ne se couche jamais lorsque je me lève.

La rumeur commence.
La rumeur commence tout bas, là où je suis.
Mais elle ne tarde jamais à grossir, la rumeur. Elle ne part que quand quelqu’un approche.

La lune s’éteint.
Elle s’éteint quand on la regarde pour un peu de temps, là où je suis.
Elle s’éteint, noire comme nuit.

Et la nuit…
Il fait toujours nuit, là où je suis.
Il fait toujours nuit parce qu’il ne fait jamais jour.

Un message s’échoue.
Il y a souvent un message à ramener, là où je suis.
Un message entre les doigts ciselés des rochers. M'arrachent la main quand je me penche trop.

Une caresse sur mon épaule.
Je ne vois plus mon corps, de là où je suis.
Je l’ai perdu, quelque part, enroulé, ficelé dans une de ces bouteilles en verre.

Des mots, des mots, des mots.
S’étendent sur le plan du ciel.
À l’intérieur de mes paupières, si j’ose les fermer.
Des morts, des morts, des morts.
S’étendent à l’horizon du champ de fiel.
Ils se moquent des pierres, ces cadavres de papier.

Ils n’ent ont plus rien à faire.
Personne n’en avait jamais eu à faire, de là où je suis.
”Personne va te faire du mal”, n’est-ce pas ?

Le vent souffle à nouveau.
Puisque tout se doit nouveau, là où je suis.
Puisque tout se doit nouveau, et avoir un début, et avoir une fin.

Il y a des fins à tout.
Il y en a beaucoup, là où je suis.
Beaucoup qui se tentent à me tenter.

Et je suis…

Debout.
Ailleurs.
Quelque part.
Jamais.
Tout le temps.
En dehors du tout.
À part du rien.
Assis au milieu du vide.

Une falaise au silence assourdissant.
Aux regards insignifiants.
En bas…
En bas, les mots.
Les mots, les histoires, les mensonges, les on-dits, les idées, les ébauches, les laissées en pause, les jamais nées, les presque achevées, les modifiées, les raturées…
Les essais. Les essais, les essais, les essais.

On me pousse.
Souvent, je me retiens, là où je suis.
Je me retiens de ne pas… de ne pas…

De ne pas quoi ?

De ne pas quoi…

Je vais me jeter.
Me jeter et faire le mort.


Un pied au bord, l’autre dans le vide.
Il n’y a pas de décision qui ne soit pas douloureuse.

Il y a… une voix.
Une voix se dépose à côté de moi, rien que là où je suis.
Une voix qui me voit, me sens et me connais. Me connais mieux que moi.

J’ai…
J’ai envie de l’écouter.

Le vent souffle.
Il souffle toujours pour toi, là où je suis.
Il souffle toujours plus loin, s’en va loin, pour t’atteindre…

La brume s’en va.
Elle s’en va parfois, là où je suis.
Puisqu’elle n’est plus là, alors… alors je te vois.

La rumeur se tait.
Pourtant, elle ne se tait pas, ne se tait jamais là où je suis.
Elle ne se tait pas, pas même pour moi.

La lune m’observe.
Elle me toise, là où je suis.
Elle me pointe du doigt, je crois bien qu’elle me voit.

Et la nuit…
La nuit est si belle, là où je suis.
Il fait toujours nuit, parce que c’est comme ça que je peux la contempler.

Ta voix…
Elle est faible.
Si faible…

Alors je t’envoie la mienne, je te l’envoie…
Qu’elle devienne ce que tu as fait de moi.

Comme la tienne m’a atteint, a fait chasser la brume et taire les murmures, a donné ce que je n’aurais jamais demandé à posséder, a dit plus que ce qu’il n’en avait jamais été souhaité, a guéri les attentes, les doutes et les plaies, m’a dit de contempler ce que je pouvais contempler, de te voir lorsque je ne voulais plus me voir moi-même, et…

De t’aimer comme je n’ai jamais aimé.

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