Le sensible et le temps
Tu sais, rien de va avec le temps, quand on est sensible.
Les grands rêves s'effacent peu à peu, sans que tu n'y puisses rien, à mesure que ce dévoile, sous des yeux autrefois si doux et innocents, l'horreur d'un monde peuplé de fous, de violences et de bétises.
Tu te balades dans ces jours identiques, oscillant de l'enthousiasme stupide à la dépression du poète, sans qu'amours ni passion ne viennent bouleverser cette morgne et profonde désespérance.
Tu doutes, la peur ! Et te voilà grand entrepreneur dans un projet de si grande ampleur que tu l'oublieras demain !
Tu rages, la révolte ! Et tu deviens meneur d'Hommes, comme Napoléon, tu les envoies au front, mais cette fois si, pour la grande Révolution !
Tu te perds, l'enfer ! Et le crayon s'empresse à écrire de merveilleux ver, de la Poésie mon cher, que seul ta solitude pourra apprécier.
Mais au fil de ces aventures sans enjeux, tu sombres peu à peu, faute de ne pouvoir ce raccrocher à ce qui fit autrefois ta force. Un jour, tu le sais, tu le sens : dans un fracas sans bruit, tu viens de toucher le fond.
Les nuits deviennent froides, sans réconforts, longues et périlleuses, quand ton esprit baladeur découvre la détresse d'un être qui saigne d'avoir tout perdu.
Te voilà seul, faible, à la détresse,
Alors que face à toi, le soleil se dresse.
Hors d'atteinte, la lucidité te blesse.
Les autres deviennent statues au son lointain.
Tes projets détruits par ton inévitable destin,
Ne savent te redonner force pour lutter demain.
Le doute frappe et rompt tout silence.
L'homme est seul, tu en as conscience,
L'horreur rencontre l'adolescence.
Une vie à attendre, la patience.
Et soutenir le vide tous les jours, putain que c'est usant.
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