Vingt minutes plus tard. Après avoir abandonné le métro et marché quelques pâtés de maisons, Shawn arrive devant l’entrée du centre médical qu’il a quitté à peine quelques heures plus tôt. Il n’arrête pas de repenser à sa conversation avec le vieil homme mystérieux. Comment ce dernier pouvait-il en savoir autant sur lui ? Et qu’est ce qu’il entendait par le fait que ses pouvoirs lui permettraient d’atteindre une quête ? Pourquoi son existence est elle si emplie de mystère ? Et surtout pourquoi tout le monde semble tout savoir sur lui, alors qu’il reste toujours dans le floue artistique lorsque cela le concerne.

Au moment où il commence à gravir les marches qui mène à la porte d’entrée, il ressent quelque chose d’étrange, comme un mauvais pressentiment. Son instinct lui dicte de prendre la poudre d’escampette, de courir aussi loin que ses jambes le lui permettent. En temps normal, Shawn serait plutôt du genre à écouter son instinct, mais ce soir il est trop fatigué et n’a plus envie de fuir. Il veut juste éclaircir le mystère qui plane autour de sa vie. Le jeune homme ne sait pas comment interpréter ses réactions. Il se dit que c’est sans doute la peur d’obtenir enfin les réponses à ses questions qui le pousse à agir ainsi.

Shawn commence à avoir froid, le vent est assez glacial. Il finit par entrer à l’intérieur du bâtiment, en restant sur ses gardes, au cas où... Shawn se détend lorsqu’il voit Myrick qui l’attend devant l’ancienne réception, mettant en ordre quelques papiers. Il sourit en le voyant.

- Shawn, tu es pile à l’heure, ça fait plaisir. J’ai toujours apprécié la ponctualité.

- Ça m’étonne que je sois le premier dit Shawn, en regardant sa montre.

- Non. Les autres sont déjà arrivés. Je leur juste demandais d’attendre un peu car il fallait que je te parle en privé.

- A quel sujet ? Je pensais qu’on s’était tout dit cet après midi.

- Suis moi, tu veux bien ? demande Myrick, en se dirigeant vers un couloir, sans attendre la réponse de son ancien patient.

Shawn fronce les sourcils, perplexe, se demandant ce que son psychologue va encore lui révéler. Et surtout pourquoi il a besoin de lui parler à l’écart des autres. Il le suit tout de même en silence à travers un long corridor et il arrive dans une grande salle qu’il n’avait pas découverte lors de sa première visite. Elle est très vaste avec sur le coté un escalier en forme de serpent qui mène à un étage où se trouve un bureau.

Myrick laisse entrer Shawn avant de fermer derrière eux, une grande porte métallique coulissante.

- Ce bâtiment est un vrai labyrinthe ! Je n’aurai jamais pensé qu’il y aurait une grande pièce au fond dit Shawn.

Myrick se contente de sourire d’un air poli, avant de se tourner vers le jeune noir et de le fixer droit dans les yeux, d’un regard pénétrant. Se sentant mal à l’aise, Shawn finit par baisser les yeux.

La sensation malsaine qu’il avait ressenti la dernière fois à l’égard de son praticien est toujours présente et semble même s’être accrue. Le jeune homme se demande s’il existe une explication à ce ressentiment. Cela ne l’étonnerait pas de découvrir que Myrick lui cache encore des choses. Il ne peut pas lui faire confiance et ne doit pas prendre pour argent comptant tout ce que ce dernier lui révélera. Shawn sait qu’il ne peut se permettre le luxe de n’être entouré que de personnes loyales, cela n’existe plus de nos jours. Le monde n’est pas uniquement blanc ou noir, il a fini par le réaliser. Il doit composer avec ce qu’on lui donne.

- Shawn, je sais que tu vas me trouver gonflant mais il faut que nous parlions de ton avenir.

- Qu’est ce que mon avenir a à voir avec cette réunion ?

- Tout ! s’exclame Myrick en ouvrant les bras, dans un mouvement ample.

- Là, je dois dire que j’ai du mal à vous suivre.

- Tu vas bientôt être amené à faire des choix qui vont être déterminants. Et pas uniquement pour toi.

Shawn pousse un long soupir en baissant ses épaules dans un signe de résignation. Il est trop fatigué pour un tel débat.

- Tout le monde me parle de choix. Je ne vois pas pourquoi. Je ne cherche pas à jouer aux héros ou à rentrer en guerre contre le reste du monde. Vous comprenez ça ! Je veux juste être Shawn, simplement Shawn.

- Tu es née pour être un leader, pour réaliser de grandes choses, mais tu dois faire un choix. Si tu me suis, tu te sentiras vivant et épanoui, comme tu ne l’as jamais été. Je te le promets.

- Vous ne comprenez pas ce que j’essaye de vous dire ! s’exclame Shawn, qui recule lentement, voulant mettre de la distance entre lui et Myrick, qui agit de plus en plus comme un fou.

- Tu ne dois pas avoir peur, je sais que c’est nouveau. Mais grâce à moi, tu vas découvrir ce qu’est ta vraie nature. Plus personne ne sera de taille à se mesurer contre toi. Tu pourras tout contrôler d’une main de fer. Joins-toi à moi et ensemble nous réaliserons ton destin.

- Je ne sais pas ce que vous avez fumé, mais je pense que vous devriez réduire les doses. Sérieusement !

Myrick ne dit rien, se contente de sourire du coin des lèvres avant de pousser un petit soupir amusé.

- Tu prends toujours tout à la dérision. J’étais sûr que tu réagirais ainsi...Mais bon je devais tout de même essayer.

- Mais de quoi vous parlez bon sang ! s’exclame Shawn, qui commence à perdre patience.

Myrick ne répond pas et se contente d’avancer vers le fond de la salle. Shawn n’avait pas remarqué le grand rideau vers lequel son ancien praticien se dirige.

- Je suis vraiment déçu de la tournure des évènements. Mais bon j’espère que tu n’y verrais rien de personnel !

Myrick tire sur le rideau d’une façon théâtrale, voulant faire son petit effet. Shawn horrifié, écarquille les yeux lorsqu’il voit une cage où sont emprisonnés Max et Hayden. Max est attaché avec une grosse chaîne même chose pour Hayden, qui a en plus une barre métallique autour des yeux, accroché derrière son crane. Les deux jeunes garçons ne peuvent pas parler et tente désespérément de se libérer, sans succès.

- Myrick, c’est quoi ce bordel !

Le praticien se contente d’hausser les épaules, un sourire triste sur les lèvres.

- Le destin est en marche, tu n’as pas voulu prendre le coche. Ne t’en prends qu’à toi-même. Je ne finirai pas comme toi. J’ai un glorieux avenir qui m’attend.

Shawn entend des bruits de pas derrière lui, il fait volte-face pour découvrir Devon et Ethan. Ces derniers sont placés devant la sortie, lui bloquant toute retraite. Ils sourient d’un air sadique, savourant l’effet de surprise.

Shawn tente de rester calme, de ne pas s’alarmer, alors que son cœur bat la chamade sous sa poitrine. Il sait qu’il doit rapidement trouver une solution car seul contre les deux jeunes, il n’a pas l’ombre d’une chance. Il n’est pas préparé contre ça. On lui a appris que dans chaque situation, il existe toujours une sortie. Il doit juste trouver laquelle et très vite, chaque seconde compte.

- On a donc été invité à une petite réunion de famille. On est enfin tous ensemble. J’aurai presque envie de prendre une photo dit Devon, sur un ton sarcastique.

- Cette fois, on va finir ce qu’on a commencé dit Ethan, en faisant craquer ses doigts.

- Vous, vous êtes servi de nous ! Pourquoi nous avoir piégés ? demande Shawn sèchement à Myrick, dans le but de gagner un peu de temps.

- Je te l’ai dit, tu dois être un leader. C’est la place qui te revient mais si tu ne veux pas de ce poste, je dois supprimer toute menace. Tu en représentes une et pas des moindres. Sans toi, ces deux là sont inutiles et je ne garde jamais de déchets dit Myrick (en désignant les deux jeunes attachés).

Max et Hayden poussent des grognements à travers leurs haillons. Il ne faut pas être devin pour deviner qu’ils profèrent des injures.

- Vous êtes un vrai pourri dit Shawn, en crachant de dégoût sur les chaussures de Myrick.

- Allons Shawn, évites moi ce couplet, veux-tu ! Tu sais bien que ce sont les personnes sans scrupule qui réussissent le mieux dans la vie. Il faut savoir aller jusqu’au bout des choses.

A l’extérieur du bâtiment. Les équipes d’assaut du C.A.S sont en place et attendent le feu vert de leur responsable, prêts à en découdre. Cross est à quelques mètres de l’entrée avec 4 hommes cachés derrière une voiture, attendant le bon moment avant de lancer l’assaut. Il fait parti d’un des groupes d’intervention. Ce n’est pas son genre de rester en retrait en attendant que tout danger soit écarté. Il s’agit peut être du plus beau jour de sa vie. C’est son exploit et il ne laissera personne se mettre en travers de son destin. Peterson est à ses cotés, une radio à la main, procédant aux dernières vérifications.

- Tout le monde est en place, monsieur. On n’attend que votre feu vert.

- On reste en stand by pour le moment. Laissons les profiter de leurs derniers instants de liberté dit Cross, qui arrive difficilement à contenir son impatience.

A l’intérieur du bâtiment, ignorant totalement la menace qui les entoure. Shawn regarde son ancien médecin tout en restant sur le qui vive, en alerte. Il garde un œil sur les deux autres jeunes derrière lui car il n’a jamais vu leurs pouvoirs à l’œuvre. Il n’a aucune envie de finir brûlé vif à cause d’une maladresse.

- Vous croyiez que vous allez gagner quoi dans tout ça? demande Shawn.

- Question idiote, je ne suis pas n’importe qui. Je veux le pouvoir de réaliser de grandes choses, terribles mais grandes. J’aurai vraiment aimé que tu sois à mes cotés, mais bon tu es trop borné pour être corrompu ou influencé. Alors, j’ai décidé de changer mon fusil d’épaule.

- Espèce de fumier, vous nous avez tous manipulé depuis le début.

- Je suis doué dans ce domaine et nos deux amis ici présents (il désigne Devon et Ethan) m’ont totalement convaincu. Ils n’ont pas peur de goutter aux ténèbres et de s’y enfoncer. Je serais là pour les guider et j’obtiendrai ce que j’ai toujours voulu.

Shawn fronce les sourcils en secouant la tête. Au fond de lui, toute sa colère commence à faire prendre le dessus, à bouillir dans ses veines. Il a des envies de meurtres et il sait au fond de lui que le combat qu’il va bientôt livrer, va très certainement lui coûter la vie. Mais il compte se battre jusqu’au bout contre ses 3 agresseurs. Il ne lâchera rien. Aucun regret, il va tout donner.

Au lieu d’essayer d’évacuer sa colère comme il a l’habitude de faire. Shawn l’appelle au plus profond de lui pour qu’elle fasse partie intégrante de son être. La colère doit se fondre avec son esprit, afin d’être implacable et qu’il puisse se défendre farouchement, sans que la peur le paralyse.

- Je crois que ça ne sert à rien de discuter plus longtemps et si on s’y mettait.

- J’aime quand tu parles comme ça lui répond Myrick.

Shawn remarque au dessus des deux jeunes un lustre. Le jeune noir se concentre afin d’utiliser son pouvoir tout en étant le plus discret possible.

- Tu vas sincèrement me manquer Shawn dit Myrick avant de faire un signe de la tête au deux jeunes.

L’étudiant en profite pour passer à l’action. Il fait volte face d’un mouvement rapide et projette une boule de feu sur les câbles qui soutiennent le lustre. Ce dernier se décroche du plafond et tombe droit sur les deux jeunes. Devon a juste le temps de se jeter au sol, hors d’atteinte mais ce n’est pas le cas d’Ethan qui s’écroule, sonné sous le projectile. Shawn ne perd pas une seconde, profite de l’élément de surprise et en balance une autre vers Myrick qui a la présence d’esprit de se mettre rapidement à couvert. La boule passe juste au dessus de sa tête, le frôlant presque. Il grimace en raison de la chaleur puissante dégagée par le projectile et commence à ne pas apprécier la tournure des évènements.

Shawn utilise la pression dans ses mains et vole à travers la salle, se posant en direction de l’endroit où se trouvent Max et Hayden. Ces deux derniers ne tiennent plus en place, faisant tout pour se libérer, voulant apporter leur aide. Avant même de se poser au sol, Shawn envoie deux projectiles vers eux, faisant exploser la serrure de leur cage. Max pousse un hurlement de rage à travers son haillon et réussit à se libérer.

Shawn détruit les chaînes qui maintiennent Hayden prisonnier. Ce dernier a juste le temps de retirer la barre qui lui bloque la vue avant que des coups de feu éclatent tout près d’eux. Il s’agit de Myrick qui n’a pas perdu de temps et tire avec un fusil à pompe, voulant se débarrasser une bonne fois pour toute de la menace qu’ils représentent.

Les trois jeunes ne perdent pas de temps et se dispersent à la recherche d’un abri de fortune. Max se cache derrière une étagère tandis que Hayden et Shawn se couche sous une sorte d’établi.

- Génial, ton plan ! Et comment on se sort de cette merde ? demande Max sarcastique.

- Ecoutes. J’ai dû pas mal improviser là et puis je te rappelle que c’est à cause de toi si je suis dans cette merde. C’est toi qui m’as dis de rappliquer ici dit Shawn, en colère.

- Maintenant ça va être de ma faute ! s’exclame Max, en secouant la tête, les yeux en l’air.

- Vos gueules les gars ! Faut qu’on bouge sinon on est mort dit Hayden

- T’as une solution ? demandent en même temps Shawn et Max.

A l’extérieur, lorsque les premiers coups de feu se font entendre, Les agents du C.A.S réagissent au quart de tour. Ils pensaient prendre les suspects par surprise et non pas intervenir en plein cœur d’un massacre. Mais ce sont des professionnels formés pour réagir à tout type de situation. Les coups de feu n’intimident pas Cross qui sourit de toutes ses dents avant de se diriger au pas de course vers l’entrée du centre médical.

- En avant ! rock’n’roll ! hurle-t-il.

Peterson transmet le feu vert à chaque équipe avant de suivre son supérieur. C’est la première fois qu’il le voit réagir ainsi, il ne le reconnait pas du tout. Il a l’impression d’être à côté d’un malade en manque d’émotions forte. C’est une sensation déstabilisante, il n’est pas sûr de pouvoir compter sur Cross pour le défendre en cas de retournement de situation. Il va devoir couvrir ses arrières lui même, ce qui n’est pas vraiment rassurant, ne sachant pas contre quoi il va devoir se battre.

A l’intérieur, Devon aide Ethan à se remettre debout. Il n’a aucune envie de se retrouver seul dans ce bazar et préfère compter sur son partenaire pour l’épauler ou pour prendre une balle à sa place si nécessaire. Ce dernier grogne de douleur, le front en sang. Il est un peu secoué mais prêt à en découdre et à se venger.

- Où sont ces fumiers ? Je vais me les faire jusqu’au dernier hurle Ethan, le visage rouge cramoisi.

Un peu plus loin sur le coté, Myrick enrage tout en rechargeant son arme.

- Bordel de merde, vous foutez quoi ? Vous êtes vraiment des incapables. Chopez-les et tuez-les.

Ethan pousse un long soupir, exaspéré, il se tourne vers son partenaire et lui murmure à l’oreille.

- Une fois qu’on s’est chargé des autres, j’ai envie de le buter aussi ce crétin.

- Ne t’en fais pas, c’était mon plan depuis le départ. Mais seulement après lui avoir fait cracher tout ce qu’il sait. Je te laisserai le torturer avec plaisir lui dit Devon.

Au même moment, les trois autres jeunes sortent de leurs cachettes, prêts de leur côté également à passer à l’action. Hayden fixe les tubes de lumière au plafond et laisser éclore son pouvoir. En quelques secondes, les néons au dessus de la tête des deux agresseurs explosent dans une pluie de verre. Ces derniers essayent d’éviter les projectiles en s’écartant en vitesse. Hayden peut tout brûler par une simple pensée, il lui suffit juste de focaliser l’objet à atteindre. Chauffer les néons, jusqu'à les faire exploser a été un jeu d’enfant pour lui.

- Si vous vouliez me priver de mon pouvoir, il aurait fallu que vous me creviez les yeux, bande de nazes ! Vous, vous êtes bien gouré crie t’il.

Shawn, de son coté envoie une boule de feu vers Myrick. Le projectile atteint le fusil que ce dernier utilisé et l’arme vole des mains du pseudo psychiatre avant de virevolter dans les airs et de finir sa courses quelques mètres plus loin. L’adulte met un genou à terre et grimace de douleur, sa main droite est recouverte de brûlures.

Les trois jeunes se dirigent lentement vers leurs agresseurs, parés pour l’assaut final. Hayden et Shawn sont face à Ethan tandis que Max se place sur la trajectoire de Devon. Myrick ne bouge pas, restant simplement spectateur, ne voulant pas manquer une miette de ce spectacle dantesque. Il sait que s’il tente quelque chose dans ce conflit, il risque de ne pas voir le jour se lever. Il n’est pas de taille.

Ils se juchent tous du regard, les yeux plongés dans ceux de leurs ennemis. A peine 5 mètres les séparent, aucun d’entre eux ne parle, un long silence s’installe. C’est comme s’il profitait d’un moment de calme avant la tempête. Il s’agit de la même situation que dans les westerns, juste avant un duel au revolver. Mais dans ce cas précis, le règlement de compte n’a jamais lieu car la porte métallique s’ouvre violemment et des agents du C.A.S, arme à la main, font irruption en hurlant :

- Pas un geste, que personne ne bouge. Vous êtes tous en état d’arrestation !

Sans que l’un des jeunes n’ait besoin de dire un seul mot ou d’échanger un regard. Le groupe des 5 jeunes se divise, chacun dans une direction différente.