Chapitre 4
Peu de temps avant l’arrivée de Véra dans sa chambre, je pris une rapide douche pour me décrasser et revêtir ma robe. Elle arriva pendant que je me recoiffais.
— Ma journée se termine enfin, je suis épuisée, commença-t-elle en s’asseyant sur son lit.
— Souhaitez-vous prendre un bain avant le dîner, Ma dame ? la questionna Margot
— Avec plaisir. Approche Élia, viens t’asseoir.
— Je vous prépare ça.
— Oui, Ma dame ? demandais-je en m’asseyant devant elle, comme ce matin.
Comme ce matin, elle attrapa mes mains dans les siennes. Cette fois-ci, je réussis à le prévoir et évitai mon mouvement de recul.
— Comment s’est passé ton après-midi avec Marcus ?
— Plutôt bien, Majesté. C’est un homme charmant.
— Je suis ravie de l’entendre. Quand tu m’as dit que tu savais danser, j’ai tout de suite pensé à lui. Et puis c’est pour moi, l’occasion de voir mon cousin et pour toi, de faire des rencontres.
— Vous avez raison, Ma dame. Je vous remercie pour l’opportunité que vous m’offrez.
— Mais c’est normal, enfin. Pas la peine de me remercier. Et puis je t’apprécie et il est de mon devoir de prendre soin de celles qui partagent ma chambre, dame comme demoiselle. Pour ce bal, j’aimerais que ce soit toi qui me représentes.
— Comment ça ?
— N’étant pas mariée, je n’aurais pas de cavalier. Margot, étant ma dame de chambre, elle devra s’occuper de moi. C’est pour ça que je veux que ce soit toi qui danses pour moi. Toi et Marcus. Tous les regards seront braqués sur vous deux, j’espère que ça ne te dérange pas.
— Non, Majesté. Je ferais tout ce qui vous parait convenir.
— Je ne veux pas que tu le fasses par devoir, mais parce que tu en as envie. Quand je t’ai vu cet après-midi, j’ai su que tu étais la candidate parfaite. Je veux te voir t’épanouir Élia, je veux faire grandir la star, la danseuse incroyable qui sommeille en toi. Si tu es d’accord bien sûr.
— Je le suis, merci, Ma dame.
Elle m’embrassa sur le front avant d’être appelée par Margot, son bain étant prés. Cette chance qui m’était offerte, elle aurait dû revenir à Iléna et non à moi. Pourtant, je ne pouvais pas refuser. L’Impératrice elle-même voulait monter mon talent à tout le monde. Je devais le faire pour elle, mais aussi pour ma sœur, c’est ce qu’elle aurait voulu pour moi. C’était aussi l’occasion de partager ses chorégraphies, ses musiques en dansant dessus. Cette chance, je ne l’aurais jamais deux fois et je me devais de la saisir. C’était maintenant ou jamais. Il ne m’avait suffi que d’une seule journée pour plaire à Véra, pour assurer et légitimer ma place auprès d’elle.
Pendant que Margot aidait Véra à prendre son bain, j’en profitais par préparer sa robe de nuit et sa robe de chambre. Le dîner se faisant toujours en petit comité. Quand elles eurent finit, elle me demanda de lui coiffer les cheveux, ce que je n’avais jusque-là, jamais faits. Nerveuse, j’espérais être douce. Finalement, cela se passa très bien. Je parfumai même ses cheveux à la rose sans qu’elle me le demande. C’était l’une de ses routines et il ne m’avait fallu qu’un soir et un matin pour comprendre qu’elle le faisait tous les jours. Cette odeur de rose était divine sur elle. Ce parfum lui allait à la perfection. Il ne restait plus qu’à espérer qu’elle apprécie l’attention de la rose sous son oreiller.
— Margot, pourrais-tu apprendre à Élia les divers protocoles pour le bal de la semaine prochaine ? Avec tous les invités de marque qui seront présents, je ne voudrais pas qu’elle se ridiculise, commença Véra alors qu’on dînait.
— Bien sûr, Ma dame. Je suis là pour ça après tout.
— Élia, as-tu déjà assisté à un bal ?
— Non, Ma dame. Ma… ma mère, me repris-je pour ne pas évoquer ma sœur, ne m’y autorisait pas, me jugeant trop jeune, ni assez préparer à affronter le monde.
— Elle n’avait pas tort. Où vivais-tu ?
— Dans une petite campagne à plusieurs jours d’ici. Plus proche de Berandel que de Glenharm. Tout le monde connaissait tout le monde et les rumeurs allaient bon train. Surtout… quand il avait des morts ou des disparitions, ajoutais-je en baissant la tête.
La dernière rumeur qui avait parcouru tout le village était celle de la disparition de ma sœur et de la mort de son fiancé. Un jeune de vingt-deux ans, sauvagement exécuté, alors qu’il devait faire sa demande en mariage, ça ne passe pas inaperçu.
— Est-ce qu’il y en avait beaucoup ? Le meurtre est une pratique que je ne tolère guère.
— Non, Ma dame. Il y en avait peu. À mon souvenir, il n’y en a eu que deux en seize ans. Dont un meurtre et un enlèvement le jour même.
— C’est horrible, commenta Margot.
— Les connaissais-tu ?
— Je connaissais tout le monde au village, Ma dame. Je travaillais pour le Duc du domaine.
— Ma question était plutôt si tu les connaissais personnellement.
— Non, mentis-je. Aucun des trois.
En réalité, les trois faisaient partie de ma famille. Mon père le premier, quelques années après ma naissance, puis ma sœur et son fiancé, deux mois avant que j’arrive ici.
— Les coupables ont-ils été jugés ?
— Non, Ma dame, répondis-je en baissant la tête, regardant mon assiette.
— Saurais-tu par hasard qui ils sont ? Je pourrais envoyer des soldats les arrêter.
— Non, Ma dame, mentis-je à nouveau. Je ne sais pas qui ils sont.
En réalité, les responsables avaient été envoyer par le Duc qui m’avait offerte en esclave à l’Impératrice. C’était lui, le commanditaire de ses trois affaires. C’était à cause de lui que je n’avais plus que ma mère. À cause de lui, que je m’étais laissé mourir à petit feu pendant deux mois, jusqu’à ce qu’il dise stop et m’envoie au Palais Impérial.
— Tant pis. Parlons de quelque chose de plus joyeux.
Durant tout le repas, je restais distante, ne participant pas à la conversation. Parler de ça faisait remonter en moi des souvenirs trop douloureux, des traumatismes que je traînais encore. Ma sœur avait toujours été mon modèle et son enlèvement avait été plus qu’horrible. J’en avais fait des cauchemars pendant deux mois et même s’ils se faisaient de moins en moins récurant, ils étaient toujours présents. Ils me hantaient chaque jour.
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