Chapitre 41
Depuis ce matin, je n’avais pas vu une seule fois Véra. Après avoir passé la matinée à réviser la danse avec les jeunes de l’orphelinat, je rentrais à la maison afin de me préparer pour la fête du village. Ma mère était là, mais Véra toujours pas.
— Va prendre une douche, chérie, m’interpella ma mère. Véra t’a laissé une super robe et je vais te coiffer.
Aussitôt dit, aussitôt fait. Après m’être rafraîchi, je retrouvais ma mère dans la chambre, où m’attendait une magnifique robe rose pâle.
— Ta petite amie à très bon goût, commenta ma mère.
— Ça ne m’étonnerait pas que sa robe soit rouge.
— Elle m’a dit de t’aider à la mettre. Surtout pour attacher le lacet dans le dos.
— Tu vois, mes robes de bal ressemblent plus ou moins à celle-là.
— Je suis sûr que tu seras magnifique avec.
Après m’avoir aidé à mettre la robe, elle commença ma coiffure. Ce n’était pas aussi sophistiqué que ce qu’avait pu faire la coiffeuse impériale, mais c’était suffisant. Après avoir ajouté une pointe de maquillage, elle posa tout son matériel.
— Je comprends mieux pourquoi tu aimes être au palais. Tu es faite pour tout ça, ça te va si bien.
— Merci maman.
— Tu as tellement changé depuis que tu es partie au palais. Je suis fière de la femme que tu es devenue. Ilena le serait aussi.
Ma mère se prépara rapidement de son côté avant de me rejoindre dans le salon. Elle récupéra son sac et on sortit de la maison ou attendait une limousine et le chauffeur principal de Véra.
— Est-ce vraiment nécessaire ?
— Mademoiselle Aubelin, Madame Aubelin, des boissons fraîches vous attendent à l’intérieur. Si vous voulez bien.
Ma mère me poussa à l’intérieur de la voiture, toute souriante. Sur le chemin de la salle des fêtes, j’avais beau questionner ma mère sur toute cette mise en scène, elle ne me disait rien. Une fois arrivé à destination, le chauffeur m’ouvrit la porte et me tendit la main pour m’aider à descendre. Devant les portes de la salle des fêtes, Véra m’attendait, vêtue d’une nouvelle robe rouge, plus sobre. J’avançais sur un tapis rouge jusqu’à la rejoindre.
— Tes robes te vont de mieux en mieux, mon ange. Tu t’embellis.
— Merci, rougissais-je. Mais tout ça, pourquoi ?
— Ta mère et la maire du village m’ont aidé.
— Aider à quoi ?
— C’est une surprise. Mais disons que j’ai ajouté ma touche personnelle à la décoration de la salle.
— Ça ne m’étonne même pas, mon amour.
Elle me tendit son bras, comme je l’avais tant de fois fait. Mais cette fois, les rôles étaient inversés. En entrant dans la salle des fêtes, tous les regards se braquèrent sur moi. En plus de ne pas être habitué à me voir en robe, j’étais en compagnie d’une magnifique jeune femme.
— Quoi qu’il arrive aujourd’hui, montre-leur que tu as changé. Prouve-leur que tu n’as plus à être leur bête noire ni leur bouc émissaire. Montre-leur la femme injouable que tu es devenue. Celle que j’aime. Quand les jeunes du cours de danse m’aperçurent. Ils s’approchèrent tous en courant.
Véra m’embrassa avant de me laisser avec les jeunes. Je m’assurais que tout le monde était là avant de les emmener dans les vestiaires. Ils s’échauffèrent pendant que je leur expliquais tout. Pour les rassurer, je leur fis faire quelques exercices de respiration.
— Élia, est-ce que tu vas danser avec nous ?
— Non, mais je ne serais pas loin. Si vous oubliez les pas à cause du stress, regardez vos camarades ou même moi. Je vous accompagnerai. Surtout respirer et amusez-vous.
Dès qu’ils furent prêts et que le maire me donna le feu vert, j’encourageai les jeunes et ils se mirent en place, sous les applaudissements de tous les invités. Je m’installais devant eux, un peu à l’écart pour qu’ils puissent me voir. D’un signe de tête, j’informais le DJ pour qu’il puisse lancer celle des jeunes. Quand celle-ci commença, un sourire illumina leur visage. Finalement, ils n’étaient pas aussi stressés qu’ils ne le croyaient. Durant toute la chorégraphie, je n’eus qu’à intervenir, discrètement, que deux fois et l’oublie du pas de danse ne se remarqua même pas. À la fin de la musique, tout le monde applaudit et les jeunes, heureux, se tapèrent dans les mains.
— Vous avez été incroyable les jeunes, je suis fière de vous.
— Merci à toi, Élia ! D’ailleurs, on a un cadeau.
L’un d’eux courut vers Jordan qui avait un énorme bouquet de fleurs dans les mains. Le jeune le récupéra, revint vers moi et tous les jeunes le rejoignîmes.
— On voulait t’offrir des fleurs, pour te remercier de nous avoir appris la danse et Jordan nous à aider.
— Vous êtes adorable, merci. Vous avez été d’excellent élève. Vous avez tous réussi à progresser. Je suis fière de vous.
J’eus droit ensuite à un câlin collectif avant qu’ils ne libèrent la place pour Véra en rigolant.
— La danse était magnifique, mon ange. Tu es une super prof.
— J’ai eu surtout d’excellents danseurs.
— Tu veux venir boire quelque chose avant qu’on ne danse ensemble ?
— Avec plaisir.
Je libérais les jeunes pour qu’ils puissent s’amuser et Véra glissa sa main dans la mienne. Je posais le bouquet de fleurs là où elle me l’indiqua. Au buffet des boissons, Véra récupéra deux flûtes de champagnes et m’entendis une.
— Tu es sûr ? Je ne sais pas si c’est une bonne idée, hésitais-je.
— Tu n’as jamais bu, je suppose.
— Jamais non.
— J’ai l’autorisation de ta mère. Tu as droit à deux verres maximum, à condition que tu manges aussi. Un maintenant, un plus tard. Et puis s’il se passe quoi que ce soit, il y a trois adultes qui veille sur toi.
— Bon d’accord. Je me laisse tenter.
Du bout des lèvres, toujours hésitante, je gouttais au champagne. Il était sucré, doux, et ses bulles fines. Véra m’observait, les yeux pétillants et avec un grand sourire.
— Alors ? me questionna-t-elle.
— Il est bon.
Elle entoura ensuite ma taille de son bras et on rejoignit ma mère qui discutait avec le maire. Quand elle vit le champagne dans ma main, elle sourit, mais ne dit rien. Le maire, que je n’avais pas vu depuis mon départ au palais, me salua et me félicita. Cet homme avait toujours été ami avec mes parents. Il m’avait vu grandir. Il avait connu la petite fille perdue, seule et venait de rencontrer la femme que j’étais devenue. La femme heureuse, amoureuse et maman qui avait désormais sa vie au palais, dans les bras de l’Impératrice.
— Ça ne fait même pas un an que tu es partie et pourtant, j’ai l’impression que c’était il y a des années.
— J’ai enfin trouvé ma place. Là où je peux m’épanouir et c’est grâce à Véra.
— Une femme remarquable. J’espère que vous prendrez soin d’elle.
— Ça, j’y compte bien, lui répondit-elle.
— Ton père serait fier de toi, Élia.
— Merci.
— Je vois que tu as fini ton verre, mon ange. Tu veux venir danser avec moi ?
— Avec plaisir.
— Mr le maire, si vous voulez bien nous excuser.
Véra attrapa ma main ainsi que le verre qu’elle posa sur le buffet des boissons avant qu’on aille sur la piste de danse. Je la vis tourner la tête vers le DJ qui lança alors un slow. J’entourais son cou, elle ma taille et on commença à danser, les yeux dans les yeux. Certains nous regardaient, mais ça m’était égal. J’étais heureuse avec celle que j’aimais, c’était tout ce qui importait. Les musiques s’enchaînèrent et je pus danser sous le regard amoureux de Véra. Les jeunes me rejoignirent. C’était la fête du village et nous comptions bien tous en profiter. Pendant près de deux heures, je redevenais la jeune fille que j’étais, sans aucune responsabilité et libre.
Soudain, toutes les lumières s’éteignirent sauf une. Celle d’un projecteur qui était dirigé sur moi. Au sol apparurent des motifs lumineux et en mouvement. Tous ceux qui étaient autour de moi s’éloignèrent pour me laisser seule au milieu de la salle. Tous les regards braqués sur moi me rendaient nerveuse. Véra apparut, sourire aux lèvres et entra avec moi dans la lumière. Quand une musique romantique commença, elle se mit à danser avec moi, dans le style des bals qu’elle connaissait bien. Je ne comprenais rien, mais j’aimais ça. J’aimais être prise aux dépourvues par cette femme incroyable. Quand elle me rapprocha contre elle, je sentis son cœur battre à mille à l’heure dans sa poitrine. Sa main glissa le long de mon échine. Mon cœur s’accéléra et un frisson me parcourut de la tête au pied.
Je réussis à lever la tête, pour la regarder dans les yeux. Je voulus dire quelque chose, mais ses yeux verts incroyablement beaux me figèrent. J’étais incapable de prononcer le moindre mot, hypnotisée par la déesse qui était devant moi, subjuguée par sa beauté. Elle me chuchota un « jeu t’aime » et mon cœur fit un bon dans ma poitrine. Incapable d’en faire plus, je ne pus que lui répondre du bout des lèvres. Quand la musique se termina, elle sortit une boite de sa poche et s’agenouilla. Comprenant que c’était enfin le moment que j’attendais tant, les larmes montèrent, comme mon sourire. Ses yeux pétillaient tandis qu’elle ouvrait la boite qui contenant la bague de fiançailles que j’avais choisie.
— Tu es certaine que je ne te dirais pas non cette fois ? rigolais-je nerveusement.
— Je n’ai jamais été aussi certaine, mon amour.
Ce mot, qu’elle n’avait jusque là jamais utilisé m fit perdre tous mes moyens. Mes mains devinrent moites et ma respiration, comme mon cœur s’accélérèrent.
— Puis-je faire ma demande sans être interrompit ?
— Oui, rigolais-je. Excuse-moi.
La boite de la bague devant moi, mes joues plus rouges que jamais, j’étais prête.
— Élia Aubelin, veux-tu m’épouser ?
FIN TOME 1
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