Chapitre Un

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 La lune brillait de son éclat argenté entre les épais paquets de nuages gris au-dessus d’une petite ville de campagne. Là, dans les lotissements, se trouvait une maison comme toutes les autres, habitée par une famille comme toutes les autres ; et dont, le fils, jeune homme déjà mûr qui n’avait jamais trouvé le courage de braver ce monde qu’il tentait encore de comprendre : aspirait à des rêves de grandeurs.

 Seulement, plus le temps passait, et plus il s’enfonçait dans un gouffre obscur, sans personne pour le rattraper, pour l’aider. Chaque jour son esprit se détachait un peu plus de la réalité, au point qu’il lui devenait impossible de communiquer avec qui que ce soi. En face à cette incapacité à s’exprimer, et l’horrible vision de voir sa vie défiler sous ses yeux, impuissant : il se brisa.

 Cette nuit-là, il ne dormait pas. La douleur était trop intense. Elle ne brûlait pas son corps, mais son esprit. Les mains pressées sur ses tempes il tentait de soutenir cette oppression qui le torturait. Ces idées noires qui venaient le titiller. Ce désir malsain de mettre fin à ses jours. Pourquoi devrais-je subir tous cela alors que ma vie est déjà gâchée ? pensait-il. Cependant, il ne pouvait s’y résoudre, lui, qui aimait tant la vie. Lui, qui pouvait se fasciner de petites choses, comme regarder une mûre, un insecte ou une fleur des minutes entières et en être émerveillé. Lui, qui appréciait tant voir la terre, la roche, les arbres et les animaux. Il ne pouvait aimer l’homme, pour la douleur qu’il lui avait jadis causé, mais il ne pouvait lui en vouloir, non plus. Un corps, c’est si beau, si incroyable, si complexe et si fascinant ! Il ne comprenait pas la barbarie de tous ces animaux. Ces actes de cruautés gratuites. Cela l’effrayait. Il ne voulait pas devenir comme eux. Un monstre. Il ne voulait pas s’intégrer à cette société cruelle. Si un désir lui brûlait le cœur : s’était de venir en aide. Il aimait se voir comme un paladin qui chassait les ténèbres sur son chemin. Un esprit fort capable d’aider quiconque en aurait besoin.

 Mais, il était faible.

 Il aspirait à voyager, rencontrer, aimer, s’amuser. Il rêvait d’explorer l’espace, l’univers, voir les paysages magnifiques de la Terre, des autres planètes, des étoiles. Malheureusement, sa vision n’allait pas au-delà des murs de sa chambre, dont le papier peint était aux couleurs étoilées d’une nuit dégagée.

 Puis, alors que ses fantômes le déchiraient, un fracas sur sa porte le fit sursauter. Un chat ? pensa-t-il dans un premier temps. Il attendit. Rien. Pas de petites pattes qui s’enfuirent à toutes allures dans le couloir. Un nouveau fracas. Il attendit encore. Le cœur battant. C’était comme si quelque chose s’y lançait intentionnellement.

 Il finit par se lever. La nuit était silencieuse. Pas un son. Il pensait au pire. Un criminel venu assassiner toute sa famille, lui y comprit. Il pensait à un fantôme. À quelqu’un qui tentait de le prévenir, peut-être souffrant, peut-être incapable de parler ou de bouger convenablement. Il saisit la poignée, les lèvres sèches et pincées d’appréhension. Il entrebâilla la porte. Rien. Il l’ouvrit un peu plus. Rien. Il l’ouvrit entièrement.

 Rien.

 Pas un mur, pas un couloir, pas de sol ou de plafond. Juste une ombre. Opaque. Comme si quelqu’un, un géant, s’était pressé contre l’encadrure. La peur lui monta à la tête en un long frisson glacé. Il referma vivement.

 Il voulait appeler quelqu’un. Sa mère ? Sa sœur ? Mais, il ne le pouvait pas. Il était muet. Il s’évertuait à penser que c’était normal. Une simple illusion dû a la fatigue et à l’obscurité de la maison. Il inspira profondément et alluma la lumière de sa chambre pour en chasser ses peurs. Elles ne voulaient pas partir, pas avant qu’il ne se soit assuré qu’il rêvait bien. Les fantômes, les monstres, tout cela n’existait pas. Pas ici. Pas chez-lui.

 Il attrapa à nouveau la poignée. Fort de la brillance de l’ampoule au plafond : il ouvrit. Mais la lumière ne parvint pas en dehors de sa chambre, avalée par une masse obscure et oppressante. Il referma immédiatement. Terrifié. Il s’éloigna de la porte. La main sur la bouche. Tremblant comme une feuille. Il ne savait pas quoi faire. Non ! C’est faux ! Les monstres n’existent pas ! s’évertuait-il à penser. Sa peur devint colère, sa colère devint force, sa force lui donna le courage. Le courage de dire à son esprit que tout était mensonge et tromperie. Il serra les poings. C’était sa seule option. Son unique solution pour retrouver le sommeil et sa vie placide.

 Il rouvrit la porte, les poils dressés de terreur, un grognement roque au bord des lèvres : il s’enfonça dans le mur d’ombre en pensant y retrouver son couloir.

 Mais c’est autre chose qu’il y découvrit.

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