Chapitre Trois
Le plafond était une large voûte céleste qui reflétait l’espace lointain. La faible lumière émanait des lampes à mêmes le sol qui éclairaient les chemins entre les rayons. Elles l’invitaient à les parcourir jusqu’au mur du fond où se dressaient par millier des packs de bouteilles d’eau.
Retrouver la vue ne soulagea pas pour autant le jeune homme. Au contraire ! Devant l’irréalité de la scène, il sentit une boule peser sur son estomac. Une angoisse l’oppressa froidement, s’ajouta à son mal-être. Il ne parvint plus à respirer, ou même à penser. Jusqu’à ce qu’un fracas ne le fit sursauter.
Quelque chose arrivait.
Son instinct reprit le contrôle. La bête en lui refit surface ; un instant, il faillit se jeter dans la direction de la chose, mais la lucidité lui rappela sa condition de proie, et préféra s’enfuir par l’ouverture d’où il venait. Si je ne peux pas voir, alors personne ne le peut ! se réconforta-t-il.
Il navigua entre les tuyaux à pas vif et discret. Le moindre bruit pourrait attirer la chose. Dans son esprit, il imaginait déjà des dizaines de scénarios différents et les moyens qu’il devrait mettre en œuvre pour s’en échapper. Hélas, dans ses plans, il était toujours incroyable de force et de technique, ce qui n’était pas réellement le cas.
Un nouveau fracas se fit entendre, non loin. Un grondement de métal et de tuyaux que l’on repousse avec violence. La chose l’avait-elle entendue ? Elle le poursuivait ? Le cœur du jeune homme battit plus fort qu’il n’aurait pu l’imaginer ; ses muscles s’allégèrent, ses mouvements devinrent plus rapides et précis. L’adrénaline fit correctement son travail. Il accéléra. Il ne voyait rien. Un bras tendu devant lui, il priait du bout des lèvres pour ne pas tomber sur un mur. L’excitation grandissait. Elle chassait presque sa peur. Il se sentait aussi fort que dans ses jeux vidéos. Libre de toute contrainte. Inarrêtable. Sa respiration plus fluide, son corps plus léger, ses jambes bougeaient si vite qu’elles lui en donnaient le tournis. Il s’envolait !
Cependant, une vive douleur lui arracha les ailes. Un choc violent le propulsa au sol. Sonné. Incapable du moindre mouvement. Encore conscient. Il apercevait une lueur trouble quelques mètres au-dessus de sa tête.
Quelques secondes plus tard, à force de détermination, il parvint à se relever maladroitement, tituba ; sur le point de chuter, il se rattrapa à la barre d’une échelle, qu’il découvrit fixée au mur contre lequel il s’était cogné, et commença à s’y hisser.
Le choc brutal l’avait ébranlé plus qu’il ne le pensait. Du sang serpentait sur sa joue depuis une plaie sur son arcade sourcilière. Une douleur sourde alourdissait ses jambes. Et son souffle redevenait irrégulier.
Il jeta un regard meurtri par-dessus son épaule de crainte que la chose ne l’eût rattrapé. Or, il ne vit que les ténèbres mouvantes se tordre de rire devant sa bêtise.
La lumière au-dessus de lui forcissait à mesure qu’il progressait. Il s’arrêta peu avant de s’engager dans la salle. Y avait-il quelqu’un ? Serait-il gentil ou méchant ? Le doute s’emparait de lui, et la douleur chassait de son esprit toute sympathie. Je suis un monstre, se convainquit-il. Je suis le plus dangereux, ici. Il passa lentement la tête par l’ouverture. Rien devant. Rien sur les côtés. Il se tourna. Rien derrière lui.
Personne.
Il s’engagea. L’endroit, exigu, était couvert d’écrans et de boutons dont l’utilité lui échappait encore. Une lampe jaunâtre était allumée au-dessus d’un siège solitaire fixé au sol, devant une verrière recouverte d’acier. Un cockpit ? pensa-t-il devant ces courbes arrondies qu’il se souvenait d’avoir vu dans ses jeux vidéos.
Une voix synthétique et masculine s’éleva alors du plafond :
« Bienvenue à bord, commandant. »
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