Une première leçon

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Plus j’imagine le parfum amer de ma colère sur ce monde, et plus il se corse des relents d’absinthe, ou de vapeur de pétrole, de goudron. Un nuage de souffre poussiéreux enivrant, colorant d’un jaune toxique l’air respirable.

Je serai un panache, un gaz insidieux. Suffoquant et invisible.

Je n’ai que peu de respect pour les décérébrés qui se disent, vilains. Ceux qui attaquent de front sans une once de pensée pour devenir riche rapidement. Les petites frappes qui rançonnent et braquent commerces et banques. Le profit, inutile et méprisable, surtout s’il n’est obtenu que par la pure force ou les armes.

Des brutes sans philosophie autre que l’argent et les poings. Des faibles, imbéciles et ingrats. Méprisons-les, brisons-les.

Une ironie, mépriser ceux que la société méprise alors qu’on méprise la société. Il serait alors intolérant de ne pas rallier à moi ces trouble-fêtes. Mais ces individus sont la justification même de la fausse probité qui règne sur ce pays. On les épargne, on leur offre une saine rédemption après un peu de prison. C’est écœurant, cette compassion fictive. De la condescendance dans tout ce qu’elle a de plus aigre.

Je ne crains pas de le dire à ce mutant dégénéré, portant le nom ronflant « Zargav Briseur de crânes ». Je lui ai dit directement à ce « chef de gang ». Il se voit naître avec des mains surdimensionnées et une force conséquente, et prétexte alors récolter les loyers de ce quartier en lambeaux. Une idée simple consistant à soutirer un deuxième loyer aux habitants du coin en usant de la brutalité. On trouve très vite un ou deux amis voulant profiter de cette manne, quitte à promouvoir Zargav chef de la bande.

Je crois que j’ai ris quand tout le petit groupe a été fendu en deux, leurs organes épandus sur mon linot. Pour expliquer mon point de vue, j’ai laissé Zargav en vie. Briseur de crânes ? Il appuie sur les tempes et cela est censé bobo mal à la tête et habituellement les gens supplient. Je ne suis pas avare en conseils, j’ai donc démontré à Zargav ce qu’est un briseur de crânes. Sur un badaud, le genre de nigaud pensant que les hurlements évoquent une visite muséale. Zargav a compris. Il a compris aussi qu’il ne fallait pas m’emmerder. Il a pleuré, longtemps. Il s’est excusé. Ses suppliques m’ont presque ennuyé. Le niveau de langage d’un élève d’élémentaire, notre délinquant devenu boyscout en a perdu sa langue, littéralement. J’ai profité de mon rasoir pour me refaire Reservoir Dogs. Un classique.

J’ai monologué et je me suis rappelé : «Merde ce type est toujours là ».

Je l’ai égorgé aussi lentement que possible. Je l’ai regardé fixement dans les yeux enfin jusqu’à ce que sa tête ne bascule en arrière retenue par un petit lambeau de chair. C’est amusant, alors je l’ai laissé pourrir dans cette ridicule position.

Le linot n’a pas apprécié, le voisinage non plus. Je dois sans doute apprendre à fermer la porte. Une leçon que j’emporte avec moi. Je déménage.

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