Et si on s’oublie, j’espère que nos âmes se souviendront (1) - Partie 2
Le trois avril, cette date était enfin arrivée, elle n’arriva pas à être heureuse après ce rêve atroce mais elle devait se lever malgré toute la douleur que ça lui demandait. Elle sécha ses larmes tant bien que mal, on l’attendait et elle devait se montrer enjouée.
Le bateau devait partir dans deux heures et la famille était divisée dans différents fiacres pour partir au port. L’ambiance était joyeuse pour presque tous, Rina et Lyria ne se parlaient que peu, n’osant rien dire de chaque côté, ce qui l’attristait énormément mais elle essayait de se consoler en se disant qu’elle verrait Maria dans peu de temps. Ses cernes et ses yeux tristes étaient plus que visibles même si elle essayait de le cacher, elle voyait bien les regards indiscrets de sa famille qui n’osait rien demander.
— Rina ?
Agnès l’avait interpellé et elle la regardait avec des yeux avides de curiosité.
— Vous avez dit que quelqu’un nous accompagnerait, qui est-ce ?
— Je ne sais pas mon cœur, on va voir ça dans quelques minutes.
Même si Agnès était une jeune adolescente, elle avait encore le visage d’une enfant, sa cousine ne pouvait s’empêcher de la couver outre mesure au grand damne de sa tante. Elle n’eut pas le temps de retourner dans ses pensées que les dalles du port faisaient faire des soubresauts à l’habitacle pour que quelques instants après les habitants du véhicule puissent descendre sur le sol.
— Alors Rina ? Prête pour le retour au bercail ?
La voix d’Angel eut le don de faire sourire Rina qui se tourna vers elle avec une joie non dissimulée. Elles se tutoyaient depuis quelque temps, Angelica avait longuement insisté.
— Angel ! C’est donc toi qui nous accompagne ?
— C’est exact, pourquoi crois-tu que je ne suis pas venu te dire adieu ? Je suis avec Jessy, j’ai dû le forcer mais il a quand même bien voulu venir.
Elle s’approcha d’elle pour lui chuchoter un détail à l’oreille en rigolant.
— En vérité il pense que j’ai demandé à l’Empereur de lui donner l’ordre de venir mais c’est faux, c’était plus simple.
Rina se mit à rire, par les Dieux qu’elle ne manquait pas de culot ! Mais malgré sa bonne humeur, elle sentait le regard tranchant de Lyria dans son dos.
— Mais dis-moi, Jessy n’a pas fait de crise cardiaque en te voyant venir comme ça ?
Angel était richement vêtu mais de façon masculine, elle avait un pantalon blanc taille haute ainsi que des bottes de combats avec un léger plastron boutonné sur tout son buste. Il avait des décorations rouge et dorée dessus. Elle était toujours coiffée d’une longue queue de cheval haute quand elle était ainsi vêtue pour faire ressortir le rouge de ses cheveux.
— Oh que si ! Il m’a fait un sermon de dix minutes mais je sortais d’un entraînement d’épée et je n’avais donc aucune envie de me changer. J’ai quand même mis des robes dans mes valises pour qu’il ne nous fasse pas une attaque trop rapidement.
Angel riait de bon cœur, surtout en voyant la tête de Jessy quand il remarqua qu’on se moquait ouvertement de lui. Il était merveilleusement bien vêtu lui aussi, il était tout habillé de blanc avec un pantalon taille haute blanc, des gants blancs, un plastron et des bottes blanches. Il avait mis sa veste sur ses épaules, aujourd’hui il n’était pas un domestique, ainsi il n’avait à s’occuper de rien, ce qui changeait ses habitudes. En tout cas, il était vraiment beau.
— Je vois que mes sermons ne servent pas à grand-chose, mademoiselle.
— Non mon cher, et d’ailleurs Jess, n'oublie pas que je t’ai demandé de m’appeler Angel sur le bateau.
— Sous forme d’ordres je sais.
Il roula des yeux ouvertement, Rina savait qu’Angel détestait donner des ordres mais elle le faisait quand Jessy n’acceptait pas de choses aussi simples mais elle avait aussi remarqué quelques petites choses plutôt amusantes chez elle. Contrairement aux dames de son rang, elle détestait les manières qu’elles exigeaient. Elle avait déjà remarqué qu’elle enlevait ses chaussures à la moindre des occasions, notamment quand elle avait une robe qui ne laissait pas voir ses pieds nus, elle possédait multiples colliers ou bracelets alors que normalement tout devait rester léger. Elle avait expliqué à Rina que certains lui tenaient à cœur, quelques-uns venaient de personnes chères mais aussi que certains la protégeaient.
Durant l’une de leurs promenades, elle lui avait expliqué qu’elle était croyante en un dieu que peu connaissaient. Ce dieu se nommait Meara, on l’appelait le dieu de la nuit mais il était assez maléfique en vérité, pour ceux qui ne pratiquaient pas cette croyance c’était un dieu banale mais en vérité il était très puissant et il est souvent nommé comme le dieu des sorciers maléfiques. Il est accompagné le plus souvent par deux démons, Yone et Miohr, l’un est le démon spécialiste des potions et l’autre des maléfices.
Angel était une femme extrêmement douée en magie, en potion notamment, mais elle était très mauvaise en botanique, alors que ce domaine était pourtant le plus important de l'empire, elle n’arrivait jamais à maintenir une plante en vie plus de trois semaines, à son grand désarroi. Rina l’admirait beaucoup, elle était peu commune et extrêmement attachante, apparemment elle s’était orientée sur la voie des mages dès sa plus tendre enfance. Jessy lui avait raconté qu’elle était partie à l’école magique au nord d’Edim très jeune, celle qu’elle lui avait parlée à son arrivée, et qu’elle avait depuis toujours voulu devenir une mage réputée. L’année passée, elle avait construit une fondation pour lutter pour toutes sortes d’inégalités qui sévissaient, avec le soutien de son père, le Duc de Gorguet. Elle souhaitait se servir de la grande puissance des mages, même si ça venait d’une puissance parfois aussi noire que l’ébène, pour apporter la paix.
Un bruit sourd retentit dans l’air, un orage menaçait alors que le temps de monter à bord était venu mais quelqu’un tira sur la manche de Rina pour l’empêcher d’avancer, Lyria.
— Tu l’aimes, pas vrai ?
— Pardon ?
Elle sentait déjà que la discussion allait l’énerver, si ça commençait ainsi c’était mal parti.
— Mademoiselle Angelica, c’est pour ça que tu m’as repoussé, c’est parce que tu l’aimes.
— Angel aime Jessy, ça crève les yeux, alors qu’est-ce que tu me racontes ?
— Tu l’appelles par son surnom alors qu’elle a un rang bien plus élevé que le tiens et bon dieu Jessy n’est qu’un domestique, que ferait-elle avec lui ? Tu me rejettes soi-disant pour Kizune mais finalement tu te rues dans les bras de la première venue, bel exemple de maturité, bravo.
Elle tapa dans ses mains comme si elle la félicitait mais tout le poison dans sa voix la révoltait, où était son amie ? Elle semblait enfouie sous cette personne odieuse qui l’insultait presque. La nuit horrible qu’elle avait passée ne pouvait pas l’empêcher de dissimuler ce qu’elle pensait, elle avait beaucoup trop de mal à se contenir.
— Quoi ?
— Tu m’as bien entendu, tu es trop proche d’elle Rina tu m’entends ?
— Tu sais quoi Lyria ?
Elle avait tiré sa manche d’un coup sec pour se retirer de la poigne qui l’avait reprise, elle ne pouvait se laisser insulter sans rien dire.
— Premièrement Angelica aime Jessy de toute son âme et il faut être aveugle pour ne pas le voir, il n’est pas qu’un domestique et je ne suis pas une catin comme tu parais si bien le penser ! Deuxièmement, tu n’as pas à me dicter ce que je dois faire, même Lui ne le fais pas donc si je veux lui donner le surnom qu’ELLE demande à tout le monde, je le ferai. J’aime Kizune et peut-être que toi aussi, mais jamais, tu m’entends, jamais je ne me marierai avec quelqu’un qui a une vision aussi étroite des choses ! Je préfère encore sceller ma vie à la personne qui pourrait me tuer qu’à celle qui m’interdit de vivre en me donnant des ordres. Si tu m’aimais vraiment, avec toutes les conséquences que ça pourrait avoir, et les Dieux savent qu’il y en a beaucoup, tu saurais que par amour on peut tout endurer et eux aussi. Donc si c’est pour m’insulter je ne vois même pas pourquoi tu m’adresses encore la parole. Je n’ai pas fait tout ce voyage pour venir te chercher et me faire cracher dessus.
Son regard noir transperça Lyria de toutes parts, si Rina avait bien horreur d’une chose c’était qu’on lui dicte la marche à suivre alors là ça lui sortait par les yeux. Elle monta le chemin pour arriver au bateau, ce n’est qu’au sommet qu’elle entendit les pas de celle qui prétend l’aimer, commencer son ascension.
— Rina, ça va ?
— Oui Jessy, ne t'en fais pas.
— Tu es pâle comme un linge, mais avec les joues rouges, c’est un mélange très bizarre.
Elle échappa un rire en voyant sa bouille la défigurer avec une réelle curiosité, il la regardait comme si elle était une machination étrange.
— Ça m’arrive souvent en ce moment mais ne t’en fais pas, à ce que je vois Angel t’en fais voir de toutes les couleurs ?
— Non ça va, elle fait comme si son comportement était irréprochable mais ça ne prend pas avec moi, je sais qu’elle le fait exprès pour m’embêter.
— En tout cas, vous allez très bien ensemble tous les deux.
— Pardon ?
Il s’était à moitié étouffé, il avait rougi comme pas possible.
— Oh rien, rien, je dois aller voir quelqu’un.
Il passa sa main dans ses cheveux sous le regard angélique de Rina qui le taquinait mais elle redevient sérieuse et donna un coup de tête derrière elle.
— Tu peux aider Lyria à s’installer si tu as le temps s’il te plait ? Je dois régler quelques détails mais ne lui dis pas que je te l’ai demandé.
— Bien-sûr, je m’en occupe, pars tranquille.
— Merci Jessy.
Elle tapota son épaule pour le remercier avant de partir dans les longs couloirs du bateau à la recherche de la délicate Maria pour se changer les idées.
Dans la cabine de la cuisine, elle était vêtue de son éternelle robe de cuisinière et elle commençait déjà à cuisiner pour le déjeuner.
— Je vois que vous travaillez déjà d'arrache-pied Maria.
Rina s’était accoudé sur la porte en la regardant faire pendant quelques secondes avant de commencer à parler et de lui faire peur. Elle venait d’échapper un œuf qui termina à côté de la casserole où il devait être logé, comme la fois où elle avait effrayé son frère le jour de l’arrivée de Tin, avant son départ.
— Mademoiselle Rina ! Comment allez-vous ? Je ne pensais pas vous voir avant la fin d’l’année !
— Je vais très bien, je vous remercie, il est vrai que ça devait être plus long mais les arrangements étaient plus rapides que prévu.
— Oh attendez, avant que je n’oublie. Le capitaine m’a donné cela, elle était pour le bateau mais à votre nom, l’expéditeur a peut-être pensé que sinon vous ne pourriez pas l’avoir à temps.
— Merci beaucoup.
C’était une lettre de Tin à première vue, elle n’avait pas envoyé de lettre mais elle prévoyait de le faire une fois dans sa cabine pour les informer de son départ mais apparemment il l’avait anticipé. Elle décacheta l’enveloppe du cachet au symbole de sa famille et déplia le papier orné de l’écriture minutieuse de son frère, la longueur de la lettre la laissa perplexe.
— Rina, je m’adresse de nouveau à toi avec le plus grand sérieux.
J’ai appris hier soir qu’un homme de la cour était parti presque en même temps que toi en Econne et qu’il prévoyait de repartir sur le même bateau pour de vilaines raisons. C’est l’Impératrice elle-même qui m’en a informé quand elle est venue au manoir comme elle l’avait demandé aux parents. Apparemment ce serait Justin, souviens-toi du vieux rabougri qu’on avait vu quand on était allé au palais impérial. Sa Majesté ne t'a pas prévenue car elle pensait que tu le savais déjà mais elle ne l’avait appris que quelques instants avant sa venue. Je te supplie de faire attention à toi, entre lui et l’autre Marius, nous ne sommes pas à l’abri.
L’Impératrice m’a prévenue que tu serais accompagné par une grande épéiste et son bras droit qui n’était pas moins doué qu’elle et elle m’a juré que tu serais en sécurité mais j’ai un très mauvais pressentiment. Je ne sais pas si tu la connais mais selon la missive de l’Empereur d’Econne elle manie vraiment bien la magie notamment les maléfices et les potions et elle manie l’épée comme personne.
N’oublie pas, il peut utiliser toutes les manières possibles de t’approcher, d’après Sa Majesté, le bateau aura beaucoup de monde à son bord. La première traversée était vide mais là beaucoup ne se rendent pas en Econne mais à Fluosia donc la densité sera à son comble donc surveille tes arrières discrètement comme je te l’ai appris. Si on remarque que tu es trop paranoïaque, tu pourrais te conduire à ta perte encore plus rapidement. Je sais que quand tu recevras cette lettre tu viendras de partir alors c’est pour ça que je l’ai envoyé sur le bateau et que j’ai inséré une missive au capitaine pour que ce soit Maria qui te la donne.
Reste toujours à proximité des épéistes, c’est tout ce que je veux, que tu rentres en un seul morceau.
Je t’aime petite sœur.
Tin.
— Est-ce une bonne nouvelle, mademoiselle ?
Elle leva les yeux vers Maria qui la regarda avec un sourire, pensant peut-être que c’était une lettre d’amour.
— Oh oui, très bonne, mais je dois aller répondre, pardonnez-moi, je dois me retirer.
— À plus tard, mademoiselle.
Maria lui adressa son plus beau sourire mais elle ne put répondre tant elle était tracassée. Elle ferma rapidement la porte de la cabine derrière elle et partit jusqu’à sa cabine en courant à en perdre haleine. Elle croisa multiples couples et aristocrates qui la réprimandaient de les bousculer mais elle ne les écouta pas, ne voulant que se protéger dans sa petite cabine. Malheureusement ou heureusement elle croisa Angel sans la voir mais inquiète par son train de course, elle se lança à sa poursuite et elle s’arrêta non loin d’elle quand elle entendit la porte de la cabine résonner avec brutalité dans le couloir désert.
— Et bah dites-moi, elle a l’air abattue.
— Angel ?
— Oui Jess ?
Angelica ne regardait que la porte sans prêter attention à son plus fidèle ami qui arriva derrière elle.
— Pourquoi tu es partie comme ça ? Tout le monde t’a regardé.
— Je m’en fou de ça, Rina n’a pas l’air bien du tout.
— Tu es sûr ?
— Elle courait dans les couloirs comme si elle avait vu le dieu Meara en personne.
— Aurait-elle rencontré ceux qui en ont après elle ? Elle aurait peut-être accouru pour leur échapper ?
— Je ne pense pas, je n’entends personne à part nous dans ce couloir. Je vais aller la voir, toi garde un œil sur la famille et pense à bien dissimuler ton épée.
Il s’inclina légèrement avant de tourner les talons pour rejoindre les membres de la famille dans une grande cabine non loin d’ici pendant qu’Angel entra dans celle de Rina, sans frapper bien évidemment. La jeune fille était sûr sa chaise devant le minuscule bureau, une plume qui tremblait dans ses mains et des larmes qui maculaient tout le papier devant elle. Elle entendit la personne entrer et refermer la porte mais elle n’osa pas regarder qui ça pouvait être, elle avait bien trop peur.
— Ce n’est que moi, ne t’en fais pas.
— Comment peux-tu savoir que je m’inquiétais ?
— Vu comment tu as détalé je me suis dit que tu n’étais pas dans ton état normal.
Angel posa une main sur son épaule et la força à se retourner vers elle pour essayer de comprendre ce qui se passait.
— Qu’est-ce qui t’a effrayé à ce point ?
— Je…
Elle reprit son souffle, les sanglots lui gonflèrent la gorge assez douloureusement, tant et si bien qu’elle peinait à articuler.
— J’apprends de très mauvaises nouvelles depuis quelque temps et je n’arrive pas à les gérer.
— Du genre ?
— Deux hommes sont à ma poursuite, mon amie m’aime apparemment et j’apprends aussi que tu ne m’as pas tout dit sur toi.
— Sur moi ?
Rina leva ses yeux bleus rougis et vitreux à cause des larmes, ses iris étaient d’une beauté époustouflante malgré son état. Elle voulut montrer la lettre à Angel avant de commencer à parler mais sa main tremblait beaucoup.
— Dans la lettre de mon frère, je lui avais parlé de toi il y a un moment mais peut-être que là il n’avait pas fait le rapprochement, il a marqué “selon la missive de l’Empereur d’Econne elle manie vraiment bien la magie notamment les maléfices et les potions et elle manie l’épée comme personne”. Je te connais encore très peu mais je connais tes talents en sorcellerie et surtout en termes d’épée, une simple dame ne saurait la manier comme ça si elle n’avait pas eu un entraînement adéquat mais je n’y avais jamais pensé avant. Selon lui, tu as un bras droit qui sait autant manier l’épée que toi et la seule personne à qui tu fais un tant soit peu confiance, c’est Jessy.
— Ton frère semble bien renseigné.
— Tu trouves ? J’ai juste fait le rapprochement. Quoi qu’il en soit, je ne pensais pas que le mensonge faisait partie de notre relation.
— Ça se voit que tu es épuisé par tous
— Pourquoi ?
— Parce que tu sais que si je t’ai menti sur ça c’est pour te protéger, tu es une grande sorcière Rina mais pas aussi puissante que moi. Tu as besoin de moi, même si ça te fait vomir de le dire. Tu as envie de rejeter tout sur le dos de quelqu’un ? Fais-le mais sache que tout ce que tu sais de moi n’est pas du tout un mensonge.
Elle enleva son visage de la main d’Angel qui la retenait légèrement relevée, elle cracha quelque chose qu’elle comprit mal elle-même. Elle assimila sa demande seulement quand son amie lui répondit.
— Tu veux que je te prouve ma bonne foi ? D’accord mademoiselle, je ronchonne.
Angel se mit dos à elle et déboutonna son plastron pour que Rina puisse voir son dos sans qu’elle ne puisse répliquer quelque chose, mais dessus il y avait un sigil qui remplissait tout son dos. (1)
— Qu’est-ce que ?
— Mis à part sur mes capacités en combat, tout est vrai, je suis venue dans cet accoutrement pour mieux faire mon travail, mais tu vois bien ce que ce symbole signifie.
Elle se rhabilla sous le regard curieux de Rina, son sigil était tracé très finement avec des formes arrondies. Il démarrait par un trait qui, coupée en son milieu, dessinait une légère virgule qui était dessinée comme un trois mais le premier demi-cercle continuait comme pour tracer un cercle mais qui coupa de nouveau le trait pour reformer une seconde virgule à l’envers avant son point d’arrivée. Juste en dessous de cette seconde virgule, un cercle rempli était dessiné. Le deuxième demi-cercle du trois était coupé par un trait de taille différente en deux fois. Le dernier détail du symbole était deux traits presque verticaux dans entre le premier demi-cercle et le trait.
— C’est un sigil de protection non ?
— Bien vu, tu connais ?
Angel était satisfaite, elle voyait qu’elle avait détourné Rina de sa tristesse même avec quelque chose d’aussi simple.
— Oui, je les ai étudiés pendant un temps mais ça n’a pas l’air d’être pour toi si je ne me trompe pas.
— Non, tu as raison.
Elle regarda Angel avec des yeux curieux, pour qui était-il ? Ses parents ?
— Ce sigil sert à protéger partiellement Jessy.
— Je pensais que c’était pour tes parents.
— Oh non, ils ont assez de protection avec tous leurs domestiques et tout et je n’en suis pas vraiment proche tu sais. Mais Jessy n’étant qu’un domestique à la base, il n’a rien. Malheureusement, avec ses multiples combats à mes côtés, il s’est fait des ennemis un peu partout et puis…
— Tu l’aimes.
— Aussi.
Rina lui adressa un regard attendrie, elle l’avouait enfin. Ce sigil voulait tout dire sur ses sentiments même si ça ne le protégeait pas de tous les maux, une bonne partie étaient inefficaces contre lui.
— Tu dois trouver ça ridicule.
— Du tout, c’est une attention réellement adorable.
— Quoi qu’il en soit, il n’est pas au courant et ne doit rien savoir pour le moment. J’ai fait cet enchantement il y a des années et ça à l’air de plutôt bien fonctionner.
— Apparemment, il se porte comme un charme.
Angel rougissait sur le coup bien qu’elle essayait de ne rien laisser paraître.
— En tout cas, pour ta sécurité, tu n’as pas à t’en faire, c’est l’Empereur lui-même qui m’a demandé de venir et j’ai demandé, comme tu le sais, à Jessy de m’accompagner.
— Forcé.
— C’est pareil.
Elle roula des yeux avec son éternel sourire moqueur.
— Par contre, pour ton amie, je suppose que c’est Lyria.
— Oui.
— Et tu en penses quoi ?
— J’en pense que je suis déjà fiancé et que dans tous les cas ça va créer un scandale monstre comme toujours quand je m’en mêle.
— Tu l’aimes ?
— Je ne sais pas Angel, c’est arrivé si soudainement… peut-être que je ressens quelque chose mais après tout je ne peux rien y faire.
— Si tu aimes tu t’en fou des conséquences, je t’ai entendu tout à l’heure.
— Tu écoutes sur les ponts toi maintenant ?
Elles riaient avec douceur face à sa raillerie mais elles s’arrêtèrent en entendant des pas qui venaient dans leur direction.
— Je pense, avec ce que tu m’as dit, que Kizune ne t’aime que partiellement, réfléchis-y et vois, d’accord ?
— D’accord, merci.
Avec un sourire en récompense, Angel ouvrit la porte pour tomber sur son bras droit, ce qui eut le don de la faire rougir instantanément.
— Jess, tu ne devais pas être avec la famille ?
— Si, mais je venais voir si tout allait bien.
— J’étais nue il y a quelques secondes et tu as failli me surprendre mais sinon ça va.
— Pardon !
Jessy regarda les deux jeunes femmes qui semblaient très sérieuses à tour de rôle avant qu’Angel n’explose de rire devant son visage déconfit.
— Je rigole Jess, respire.
— Tu n'en as pas marre de me faire tourner chèvre à longueurs de temps ?
— Oh non, c’est si drôle.
Angel fit mine de vouloir se bagarrer avec lui et Rina s’éclipsa avec amusement. Diable qu’ils étaient mignons tous les deux. Même si elle s’était voulue discrète, elle entendit les pas des soldats missionnés derrière elle pour l’accompagner dans tous ses déplacements.
(1) Citation de Léa Jeunesse, écrivaine du XIXe siècle.
(2) C’est un sceau ou une figure graphique qui représente une intention magique et aussi parfois un être, un ange ou un démon. C’est plus précisément la volonté du sorcier, il est efficace comme un courant d’énergie dans l’inconscient, et les émotions.
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