LXXXVIII
Je reprends du service. Je ne suis plus la menace. Je suis la contre-menace. Pour une ère en équilibre dans l’Amour et dans la Paix. Si l’Humanité accepte l’existence de Vivien, elle va devoir aussi faire avec la mienne. Adé grelotte en fumant une tige sur le toit de sa péniche sur le Jordania. On regarde Sainte-Claire. Ça pousse.
- Paloma, tu es une autorité spirituelle avec le Couvent. Et une élue de l’Invisible par ta mère Abigaëlle. Sans compter que tu as Greta 2.0 à tes côtés. Et tu fais de la politique. Tu as d’autres pouvoirs ?
- Je lis dans les âmes alors ne croise pas mon regard. Quoi que. Il y a beaucoup de brouillard dans le tien, je ne vois rien. Tu fumes trop. Tu ne me reproche pas l’apocalypse du calendrier et mes projets d’extermination ?
- Bof, j’en ai connu tellement tu sais, des apocalypses et des exterminations. Avec toi, c’est pas grand-chose. C’est dans l’esprit de l’ère. Plutôt tranquille. Le pire est à venir. En attendant, on est bien, là. Ce serait bien que l’ère 4 dure le plus longtemps possible.
- Je n’ai pas ce pouvoir là. Ce sont nos enfants qui le décideront quand ils écriront leur cinquième Bible pour leur cinquième Humanité dans leur cinquième ère sur leur planète 5. Si ils ne nous exterminent pas, on restera là, pour l’éternité, encore plus tranquilles, sans eux, sur notre bonne vieille planète 4, avec nos Ordres, notre religion et ce qui restera de la Couronne. Adé, tu es sûre que tu veux rester là tout l’hiver ?
- Bien obligée, le Jordania a gelé, on ne peut plus bouger la péniche. L’eau coule sous la glace comme le temps s’écoule. Mais nous, en surface, on reste immobiles, jeunes et éternelles sur ce temps qui passe, on ne trépasse pas.
On dirait une prière. Alors je baisse la tête et je ne réponds pas, en silence. Et puis mon regard se lève sur la Cathédrale Sainte-Claire où juste en dessous le soleil se couche. C’est à d’où je viens. C’est là où je vais. À l’Ouest. Vers l’Ouest. Là où les branches de ma croix se rejoignent pour former un 4.
- Rentre au chaud Adé. Moi je retourne au soleil retrouver ma belle.
- T’as raison, mais attends, Hilde en a trop fait.
Je repars avec une bouteille de soupe. Il y a sûrement un symbole, un message caché là-dedans, en dehors de toutes les substances étranges qu’elle doit y ajouter. Je me réfugie vite dans ma chaleureuse navette. C’est quoi tous ces petits livres blancs dans l’étagère ? J’en prends un. Un logo où une colombe brille, libérée par deux mains. C’est une B2 ? Édition 2013. On est dans une navette du Couvent. Page 419 : l’Apocalypse.
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