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« Bienvenue en deuxième année à l’Académie Impériale ! »

Tous les discours de début d’année commençaient ainsi. La Présidente, droite dans son uniforme blanc, poursuivit son allocution.

« Comme vous le savez, cette année est votre avant-dernière avant que vous intégriez la glorieuse Armée de l’Empire. Vous serez donc soumis à des tests en milieu d’année afin de ne garder que les meilleurs d’entre vous. Vous n’ignorez pas que le niveau requis est extrêmement difficile à atteindre. Je vous enjoins donc de vous surpasser encore une fois dans les mois à venir. Soyez dignes du privilège qui vous est accordé, celui d’étudier en ces lieux. Longue vie à l’Empereur !

- Longue vie à l’Empereur ! » répondit d’une seule voix l’assemblée des étudiants.

La moitié de ces futurs soldats atteindrait le poste très convoité de Soldat d’Élite de l’Empereur. Parmi eux, encore deux tiers seraient retranchés au cours de la troisième et ultime année d’études. Le tiers restant aurait l’honneur insigne d’intégrer la Première Armée, et les autres seraient rattachés à la Seconde. Il était à prendre en compte que ces deux dernies tiers étaient dotés d’un solide niveau en matière de combats et d’incantations.

Le Général, nom que l’on donnait au chef de toutes les armées, monta sur l’estrade face à l’assemblée. La Présidente lui céda la place.

« Je vous salue et vous souhaite le succès en cette nouvelle période. commença-t-il. D’ordinaire, je suis en charge d’accueillir les premières années, mais un événement a modifié mon programme. »

Les élèves de première année étaient ceux qui avaient la chance d’intégrer l’Académie Impériale à la suite des deux années éliminatoires.

Il fit un signe en direction des Cinq Chasseurs. Ces hommes recevaient leurs ordres du Général en personne. Ils incarnaient l’élite de l’élite. Imbattables, et implacables. Ils étaient menés par le Lieutenant, le second du Général. Les cinq hommes s’écartèrent afin de laisser passer quelqu’un que nul n’avait vu jusqu’alors. C’était un élève inconnu, d’une taille un peu plus petite que la moyenne, aux cheveux châtain-roux et aux grands yeux verts. Il portait déjà l’uniforme bleu marine et noir de l’Académie Impériale. Le Lieutenant le conduisit jusqu’au bas de l’estrade. L’élève marchait les yeux baissés, ne voulant croiser le regard de personne. Malgré les apparences, on aurait dit un prisonnier que l’on escortait.

« Je vous présente Tōru Isobe, qui intègre dès aujourd’hui l’Académie Impériale en deuxième année. Certes, je suis parfaitement conscient que ce n’est pas l’usage, mais les circonstances sont spéciales. J’attends de vous que vous lui fassiez bon accueil. Je dois à présent vous laisser afin de souhaiter la bienvenue aux autres promotions. Visez l’excellence et vous atteindrez votre objectif. Longue vie à l’Empereur !

- Longue vie à l’Empereur ! » reprirent en chœur les étudiants.

L’un d’entre eux remarqua que le nouvel élève se taisait. Mais puisque personne ne semblait lui en tenir rigueur, il devait y avoir une raison. Ou peut-être bénéficiait-il d’un traitement de faveur. C’était plus que probable.

Le Général quitta le hall suivi des Cinq Chasseurs. La Présidente retourna sur l’estrade et conclut :

« Je déclare terminée la première Assemblée de l’année ! »

À ces mots, les futurs soldats se dispersèrent en bavardant. Le nouvel élève n’avait toujours pas bougé. Il s’anima finalement et se dirigea vers les dortoirs où le flot des étudiants commençait à entrer. Alors qu’il se rendait à son lit situé à l’autre bout de la grande salle, certains l’interpelaient :

« Eh ! L’exception ! Comment as-tu atterri là ?

- Ta famille a dû faire pression pour que tu entres. C’est déloyal !

-Tu vas t’en sortir ?

- Pas trop dur d’arriver dans un lieu inconnu ?

- Ou plutôt d’être inconnu !

- D’où est-ce que tu sors ? »

Et ainsi de suite. Il n’était pas surpris de l’attitude des autres étudiants. L’Académie Impériale était un établissement extrêmement sélectif, où les élèves étaient soumis à une pression constante dans une atmosphère de concurrence permanente. Son arrivée exceptionnelle ne pouvait provoquer que de la jalousie. Il se contentait de garder le silence et de marcher sans prêter attention à ce qui l’entourait.

Arrivé à son lit, il eut un temps d’arrêt. Dessus avait été posée une valise contenant ses effets personnels. Depuis quand possédait-il quoi que ce soit ? Il commença à vider ce bagage et à ranger son contenu dans l’armoire à côté. Tous les jeunes gens s’installaient dans un joyeux brouhaha étonnamment ordonné. Il ne prêtait aucune attention aux autres et prenait soin de ne rien laisser paraître de ses émotions. Soudain, il sentit une présence derrière lui. Il se retourna vivement et se retrouva face à un étudiant d’assez grande taille aux cheveux blonds et aux yeux gris. L’inconnu lui sourit.

« Bonjour, Tōru ! Je peux t’appeler par ton prénom ? »

Le nouvel élève haussa les épaules.

« Ils ne t’ont pas vraiment réservé un accueil très chaleureux. Mais j’imagine que tu ne voulais pas entrer ici de façon si remarquée.

- Je ne souhaitais pas entrer ici du tout.

- Ah. »

Le nouvel élève, sans plus se soucier de son interlocuteur, retourna à son installation. L’étudiant était légèrement déstabilisé.

« Au fait, je m’appelle Sei. déclara-t-il. Sei Tanaka, pour être précis.

- Heureux d’avoir fait ta connaissance, Sei. répondit l’élève sans se retourner.

- Tu voudras que je te fasse visiter les lieux ?

- Puisque tu es le seul à ne pas m’en vouloir d’être ici contre mon gré… »

Il rangea ses dernières affaires et se tourna vers Sei.

« Je suis prêt.

- Allons-y, alors ! »

Ils traversèrent le dortoir et d’autres lazzis fusèrent :

« Tanaka ! Ça fait quoi d’avoir le lit juste à côté de celui de l’exception ?

- À votre avis, répliqua Sei sans se départir de son sourire, quelle impression cela fait de devoir partager le dortoir de gens si étroits d’esprit ? »

Le ton sur lequel il avait prononcé cette phrase indiquait clairement qu’il n’avait pas l’habitude d’être contredit. À partir de là, les moqueries cessèrent pour la journée ; il se trouva juste quelqu’un pour répliquer :

« Tu vas le regretter.

- À voir. » s’amusa l’étudiant.

Une fois sortis du dortoir, Sei déclara :

« Tu devras faire attention à lui. C’est Kiyonari Saitō, le neveu du Général. Il n’aime pas que les regards soient tournés vers un autre que lui.

- Et toi, tu lui tiens tête sans peur des représailles.

- Il ne peut rien me faire. Je suis le meilleur élément de la classe. Allons dans le parc, il est particulièrement beau en cette saison. Le soleil des derniers mois lui a rendu ses couleurs. »

En effet, les arbres en fleurs et les allées bordées des bosquets taillés étaient un spectacle magnifique, digne d’un tableau de maître. De nombreuses espèces de plantes se mêlaient, mises en valeur par un agencement géométrique du meilleur goût. Des nuances arborées par les plantes aux formes de leurs fleurs, rien n’était laissé au hasard.

« Viens, je vais te montrer le meilleur endroit. Il y a un lac tout au bout, et peu de gens s’y rendent. »

Tous deux s’émerveillèrent en silence une fois arrivés au plan d’eau scintillant. La surface unie reflétait le ciel, bordée par une forêt abondante de l’autre côté.

« Je peux te poser une question ? demanda Sei.

- Ta phrase en elle-même en est une, alors vas-y.

- D’où viens-tu ? Enfin, je veux dire, tu n’as pas l’air d’être originaire de cette région-là, et pourtant, ton nom est d’ici.

- Ce n’est pas mon nom.

- C’est-à-dire ? Tu ne t’appelles pas Tōru ?

- C’est le nom qu’ils me donnent.

- Qui ?

- Les Cinq Chasseurs. Le Général. L’Empereur à qui ils en ont référé pour me faire entrer ici.

- Tu as vu l’Empereur ?!

- Non. Ils ont décidé de ma vie sans moi.

- Pourquoi ? Et comment t’appelles-tu, alors ? »

Tōru ne répondit pas. Son regard s’assombrit et il baissa les yeux. Déconcerté, Sei reprit :

« Tu peux garder ça pour toi, c’est juste que tu es assez mystérieux. Pour changer de sujet, j’ai une autre question. Si ce n’est pas trop indiscret, pourquoi n’avoir pas dit le traditionnel ‘‘Longue vie à l’Empereur’’ ?

- Pourquoi chanterais-je les louanges de quelqu’un que je ne connais pas ? »

Sei ne trouva rien à répondre.

« On termine la visite ? demanda Tōru.

- Allons-y. »

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