Chapitre 36
Le plus long chapitre que j'ai écrit :'(, 2 920 mots !!!! J'arrivais plus à m'arrêter, je l'ai commencé à 22 heures 30 et je me suis dit "je le finis, je le publie et je vais me coucher", il est 23 heures 49 quand je le publie x)
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L’homme lève une main pour réclamer l’attention de tout le monde avant de soupirer bruyamment. Il attrape des feuilles et les regarde rapidement, les yeux plissés, avant de lever son regard vers nous.
- Nous sommes réunis aujourd’hui pour juger les actes de trahison.
Min se redresse légèrement. Il semble préparé, comme s’il s’était déjà imaginé la scène plusieurs fois. Sunhee, à ses côtés, a les mains qui tremblent et je peux voir sa tête inclinée vers le sol.
- Min. Vous êtes accusé de complot contre le Temple des Cerisiers, et du meurtre de Dame Mei. Que répondez-vous ?
- Je plaide coupable, répond-il avec détachement.
Les murmures s’intensifient. Le juge semble étonné et hoche la tête.
- Vous plaidez coupable, donc. À quel titre ?
- Je n’ai aucun regret, raille-t’il. Le Temple des Cerisiers ne mérite pas d’être préservé.
Je fronce les sourcils et vois mon père tressailler.
- Comme je l’ai dit, vous êtes accusé de complot. Avec qui agissez-vous ?
- Ah, ça, je n’ai pas le droit de le dire. Voyez-vous, j’ai promis de garder l’identité de mes chefs secrète. En revanche…
Il se tourne légèrement vers Sunhee.
- Elle est coupable, elle aussi.
La jeune femme blêmit et entortille une mèche blonde autour de ses doigts. Le juge pince les lèvres puis ouvre la bouche avant de la refermer.
- D’accord. Mademoiselle, veuillez m’indiquer votre prénom.
- Sunhee, murmure-t’elle d’une voix chevrotante.
J’écoute la suite d’une oreille distraite. Je me fiche de savoir ce qu’il va arriver à Min. Il doit juste être puni pour ses actes. C’est tout ce que je demande. Enfin, j’aimerais aussi que cette histoire se termine, que nous découvrions qui sont à l’origine de ce groupe de criminels, et surtout pourquoi. J’ai envie de croire que je le saurai un jour, mais je commence à désespérer. Ça fait deux mois que Hyujin et moi cherchons sans relâche, et tout ce que nous avons trouvé, c’est l’assassin de ma mère. Et même s’il se fait arrêter, d’autres gens en ont après nos vies.
Je reviens à la réalité quand je vois Sunhee se redresser, les larmes aux yeux.
- J’ai été forcée de rejoindre ce groupe de criminels, avoue-t’elle. C’était soit ça, soit je mourrais. Je… je vais sûrement regretter ce que je vous dévoile mais…
Elle marque une pause pour se tourner vers moi.
- Deux personnes ont créé le groupe ici, dans la cité du Lotus. Leur but était de regrouper cent personnes pour tuer les dirigeants du Temple des Cerisiers et s’emparer du pouvoir. Je connaissais une des personnes qui faisait partie du groupe. Il s’appelait Hiro. Est-ce que vous vous souvenez de la mort d’une certaine Lina, il y a quelques mois ?
Le juge semble réfléchir quelques instants avant de hocher la tête.
- C’est Hiro qui l’a assassinée. Lina était mon amie. Un peu avant son meurtre, il m’avait demandé de rejoindre le groupe sinon il me tuait. Alors j’ai accepté et… vous connaissez la suite.
- C’est plus complexe que ce que j’aurai pu imaginer, soupire le juge en écrivant rapidement sur une feuille.
Après quelques minutes d’inattention de ma part, je tourne la tête vers l’homme qui lance :
- Bien. Min et Sunhee, pour avoir comploté contre le Temple des Cerisiers et avoir participé explicitement ou implicitement au meurtre de Dame Mei, vous êtes condamnés à la prison à vie. La session est terminée. Gardes, vous pouvez désormais les emmener à la prison du Lotus.
La jeune femme se met à pleurer. Les gardes se lèvent pour la saisir, et elle laisse échapper d’autres larmes.
- Je suis tellement désolée…
Tandis que Min et Sunhee se font emporter vers la sortie sud, mon père, Hyujin et moi regagnons la sortie principale. Une fois dans la rue, je soupire et fixe le sol. Je me sens mal pour Sunhee, mais elle a quand même causé du tort à des personnes.
Il y a encore tant de gens à arrêter pour être complices de Min et Sunhee, mais est-ce qu’on les retrouvera un jour ? Je ne pourrai pas mener une enquête indéfiniment, quand mon père mourra, quand je deviendrai dirigeante, je devrai me préoccuper d’autres choses. Et même aujourd’hui, je dois me fiancer dans l’unique but de donner naissance à un héritier pour prolonger la dynastie de mes ancêtres. Qui plus est, je dois me marier avec l’homme que mon père a choisi, et je ne suis toujours pas rassurée à cette idée, surtout depuis Hiro.
- Hyujin, on ne devrait pas aller parler à tes parents ?
Il tourne la tête vers moi et hausse les épaules.
- Si, c’est vrai.
- Allons-y.
Il fronce légèrement les sourcils mais hoche la tête et m’emboîte le pas dans les rues. Mon père rentre au Temple des Cerisiers, et Hyujin et moi retournerons là-bas à pied, parce que, je cite, «vous devez avoir l’habitude maintenant».
Lorsque nous arrivons devant l’entrée du Temple du Lotus, je frémis. Je suis stressée à l’idée de parler de la relation entre Hyujin et moi avec ses parents, qui risquent de ne pas apprécier.
- Tu viens ? me lance-t’il.
Je lis de l’inquiétude dans son regard et mords ma lèvre inférieure. Est-ce que nous sommes obligés de leur parler ? Techniquement, Hyujin fait ce qu’il veut. S’il a envie d’être avec moi, il a le droit.
- Aria.
Je sors de mes pensées et hoche la tête. Hyujin me tend la main et je l’attrape pour me donner une contenance. Nous parcourons les jardins lentement. Je prends le temps d’observer chaque fleur, chaque lanterne, comme si c’était la dernière fois que je venais.
Nous croisons Miya dans une allée.
- Seigneur Hyujin, Demoiselle Aria, bienvenue.
- Je viens voir mes parents.
Elle blanchit.
- Oh, vous ne devriez pas.
- Pourquoi ?
- Enfin, ils sont… très occupés. Vous devriez repasser plus tard.
- Miya, c’est urgent.
- Oui, j’imagine, mais je suis désolée, je n’ai pas le droit de vous laisser passer. Comme je vous l’ai dit, vos parents sont très occupés, ils ne sont pas disponibles pour parler, vous devrez repasser plus tard et aussi…
- Je t’ai dit que c’était urgent, alors tu vas me laisser passer, coupe Hyujin.
Miya pince les lèvres et croise les bras sous sa poitrine, avant de secouer la tête.
- Seigneur Hyujin, vous m’en voyez navrée, mais je ne peux pas vous laisser entrer.
- Miya, c’est un ordre, laisse-moi passer ! hurle-t’il.
- Je ne peux pas faire ce que vous m’ordonnez.
Le ton de la femme est ferme, mais elle semble honteuse de tenir tête à Hyujin.
- Et pourquoi ça ?
- Vos parents ont interdit l’accès du pavillon principal à tout le monde.
- Laisse-tomber. Je passe si j’ai envie. Ici, c’est ma maison.
Hyujin me tire d’un coup sec pour que j’avance, bousculant Miya au passage.
- Seigneur Hyujin, c’est une très mauvaise idée d’y aller ! Je vous en prie, faites demi-tour !
Il ne répond pas et continue de me tirer par la main. Miya n’arrête pas d’hurler, mais nous ne l’écoutons plus et entrons dans le couloir pour rejoindre la pièce principale du pavillon.
Les couloirs sont déserts, et seule la voix de Hana résonne. Je l’entends hurler, et plus nous nous rapprochons, mieux je comprends ce qu’elle dit.
- C’est très bien, merci, mais je vous ai déjà dit de ne pas venir jusqu’ici ! C’est trop dangereux, combien de fois devrais-je vous répéter que nous devons rester discrets ?! Je ne sais jamais quand Hyujin est là, alors vaut mieux ne pas venir directement au temple pour en parler !
Je tourne la tête vers Hyujin, qui n’a pas l’air de comprendre. Nous continuons d’évoluer dans les couloirs jusqu’à la porte. Il s’apprête à rentrer mais je l’arrête.
- Continuons d’écouter, murmuré-je.
- Si tu veux.
- Dame Hana, Seigneur Seok, je suis désolé. Je ne reviendrai plus ici. Mais le plan avance. Nous y sommes presque.
- Ne parlez pas trop fort ! s’époumone Hana. Je vous ai dit que Hyujin était peut-être là.
- Comment ça, nous y sommes presque ? questionne Seok.
- Arin et moi avons établi un nouveau plan, et je suis certain que celui-ci fonctionnera.
Mais de quoi parlent-ils ? Le comportement de Seok et Hana me paraît de plus en plus louche. Et qui est Arin ?
- Une fois Seji mort, nous aurons éliminé tous les protecteurs d’Aria.
Je crois que j’ai enfin compris, et mon ventre se noue.
- Tu te trompes, il reste Hyujin, et tu n’as pas le droit de toucher à mon fils, grince Hana. Il faut juste le dissuader d’aider Aria.
Soudain, tout m’apparaît comme une évidence. C’était tellement simple à comprendre, au fond. J’aurais pu m’en douter depuis le début.
La femme du groupe de criminels, dont la voix me disait quelque chose… C’était Hana. Nous avions raison dès le début. Seok et Hana sont bien responsables du complot contre le Temple des Cerisiers. Ils n’ont pas menti en disant que ce n’était pas eux qui avaient tué ma mère. Après tout, ce ne sont pas eux qui l’ont assassiné directement. Ils étaient derrière tout ça, mais ils ne l’ont pas fait.
Le couteau rare acheté dans la boutique de Namki coûtait cher. Seok et Hana étant riches, ils auraient pu se le procurer et l’offrir à Min.
Les rumeurs infondées sur le fait que les dirigeants du Temple du Lotus essayaient de s’emparer de la cité des Cerisiers, profitant de sa faiblesse depuis la mort de ma mère.
Le fait que les gens du groupe de criminels savaient que Hyujin avait vingt prétendantes qu’il avait toutes repoussées.
Tous les petits détails me reviennent en mémoire, un par un.
Les larmes me montent aux yeux. Je suis triste, énervée, déçue et mon coeur se serre. Il m’est impossible de respirer correctement, comme si une pression écrasait ma poitrine.
Je n’arrive pas à détacher mon regard de Hyujin. Il voulait innocenter ses parents, et voilà comment ça se termine. Je n’ose pas penser qu’il le savait depuis le début et qu’il a fait semblant d’être innocent, qu’il a feint de ne pas connaître la vérité et de chercher les assassins. Je ne peux pas imaginer qu’il ait fait semblant de m’aimer.
Je suis à deux doigts de m’effondrer, mais je me redresse, m’efforçant de ne pas montrer ma vulnérabilité.
Je dois comprendre, faire face à la vérité, même si elle est difficile à entendre.
Hyujin n’a pas bougé. Il paraît aussi perdu que moi, mais peut-être qu’il est juste en train de se chercher une excuse.
Le coeur battant, je souffle :
- Hyujin…
Il tourne la tête vers moi et attend que je parle, les yeux rivés sur mes joues humides.
- C’est eux. Ce sont tes parents.
Il fronce les sourcils, comme s’il ne comprenait pas. J’espère qu’il ne comprend vraiment pas et qu’il ne fait pas exprès, parce que j’en ai assez que l’on me mente.
- Tu ne vois pas ? Ils sont derrière tout ça. C’est eux qui ont organisé le complot. Ils t’utilisent sans que tu t’en rendes compte.
Son expression durcit, mais il ne répond pas. J’entends les voix de Seok, Hana et de l’homme avec eux, mais je n’y prête pas attention.
- Tu le savais ? Ça faisait partie de leur plan ? Tu faisais comme si tu m’aidais, alors qu’en fait, c’était juste un moyen de te rapprocher de moi pour pouvoir me tuer, prendre tout ce que j’ai ? Hyujin, si c’est ça, dis-le moi maintenant.
- Non.
Je le scrute, cherchant une lueur de sincérité dans son regard. Ça aussi, je commence à en avoir marre. Je n’arrive jamais à comprendre ce qu’il pense.
Je suis prête à le forcer à admettre ce que je sais déjà. Et si j’ai tiré des conclusions hâtives, j’espère sincèrement qu’il ne m’en voudra pas.
- Aria… je ne sais pas quoi te dire…
Je le fixe, choquée. Il ne sait pas quoi dire ? C’est tout ? La colère continue de monter en moi.
- Tu ne sais pas quoi dire ?! explosé-je. Et pendant tout ce temps, tu ne savais pas non plus ? Tu ne savais pas que tes parents complotaient contre moi ?
Il détourne le regard et d’autres larmes naissent aux coins de mes yeux.
- Ne me mens pas, Hyujin. Dis-moi la vérité. Tu le savais, c’est ça ?
- Non, répète-t’il.
- J’ai envie de te croire, mais…
- Alors fais-le. Parce que je t’assure que je ne savais rien. Tu ne penses pas que, si j’étais complice, j’aurai déjà essayé de vous tuer depuis longtemps ?
Je le fixe intensément, cherchant un indice, une faille dans son regard, une trace de mensonge. Mais ce que je vois, ce n’est ni ce que je cherche, ni de la froideur. Il me regarde avec désespoir et confusion. Mon coeur bat plus fort, l’angoisse me serre la gorge.
- Je t’assure, Aria. Je ne savais rien du tout. J’ai voulu t’aider, je t’ai dit que j’étais là pour te protéger.
Je veux le croire. Mais tout ce que j’ai appris m’empêche de le faire.
- Hyujin, tout me mène à cette conclusion. Tes parents sont derrière tout ça, je suis persuadée que tout était planifié depuis le début. Tout ça, c’était juste un moyen d’avoir ma confiance pour mieux me faire tomber.
Hyujin, tremblant, se rapproche lentement et attrape mon autre main.
- Aria, tout ce que j’ai fait, c’était pour toi. Enfin, pas au début. J’agissais dans mon intérêt, à la base. Mais après seulement quelques jours, je le faisais pour toi. Tu crois vraiment que j’aurais risqué ma vie pour te trahir ? Si j’avais cherché à te faire du mal, je n’aurais pas essayé de comprendre ce qu’il se passait, je n’aurais pas voulu t’aider.
Je le regarde, le coeur battant.
- Alors, pourquoi tes parents… Pourquoi ne m’as-tu pas avertie ? Pourquoi m’as-tu laissée dans l’ignorance ?
Il soupire.
- Parce que je ne savais rien, Aria. J’ai commencé à douter d’eux quand j’ai vu les indices, mais je ne voulais pas te décourager. Je ne voulais pas que tu perdes ta confiance en moi.
- C’est raté.
- Laisse-moi finir. Je n’avais aucune preuve, alors je ne voulais pas te mettre en danger. Je voulais vérifier que c’était vrai, comprendre, te protéger. Je t’ai laissée loin de tout ça pour ne pas que tu souffres.
Je secoue la tête, l’incompréhension envahissant mon esprit. Je veux tellement le croire. Mais je n’arrête pas de penser qu’il m’a trahie.
- Tu as voulu m’aider, pourtant, tu n’as rien fait pour m’arrêter. Au lieu de ça, tu m’as laissée courir vers un piège que tu savais être là. Tu me dis que tu ne sais pas, puis que tu savais un peu mais que tu ne savais pas quand même… Je n’y comprends plus rien !
- Je ne pensais pas que tout ça allait aller aussi loin, si tu préfères. Je te le promets. Si j’avais su, je n’aurais jamais laissé cette situation s’aggraver. Mais je t’en supplie, crois-moi. Aria, je… je t’aime, et je voulais juste te protéger. Oui, j’admets avoir fait des erreurs. Mais je n’ai jamais voulu te nuire.
Les larmes cessent de couler, mais je continue de trembler.
- Tu m’aimes vraiment ? Enfin, ce n’était pas une manipulation ou…
Je m’arrête et plante mon regard dans le sien.
- Oui, je t’aime vraiment, Aria. Crois-moi.
Je sens la vérité dans sa voix, du moins, j’ai envie de la sentir. Peut-être qu’il ne ment pas. Mais si je le crois, est-ce que ça va avoir des conséquences plus tard ?
- D’accord, chuchoté-je. Mais ça ne veut pas dire que tu es totalement pardonné.
En réalité, je l’ai déjà pardonné, et ça m’exaspère, mais je préfère ne pas lui dire, au cas où il me mentirait. Je suis encore trop indécise par rapport à ça pour être totalement honnête avec lui.
Le silence s’étend entre nous.
Et puis, dans un mouvement brusque, comme s’il ne pouvait plus attendre, Hyujin me tire contre lui. Mon coeur s’emballe sous l’effet de ce contact soudain.
Je veux reculer, mais quelque chose en moi résiste. Je sais que j’ai le droit de lui en vouloir, que je devrais d’ailleurs, mais en ce moment, tout ce que j’arrive à ressentir, c’est la chaleur de son corps. Ses doigts se glissent dans mes cheveux et ses lèvres effleurent doucement les miennes.
Quand il m’embrasse, je lève une main pour repousser sa poitrine, mais mes doigts se referment sur le tissu de sa tunique. Il approfondit le baiser et je sens mon rythme cardiaque s’accélérer, mes joues rougir et mes jambes trembler. Un nœud se forme dans mon ventre. Hyujin me serre plus fort, et je me laisse faire.
Lorsqu’il se retire enfin, il murmure contre mes lèvres :
- Je ferai tout pour te prouver que je t’aime, Aria.
Je hoche légèrement la tête, même si je sais que c’est une promesse que je ne peux pas accepter. Pas encore.
- Je t’assure que je ne t’ai pas menti, que je ne te mens pas et que je ne te mentirai jamais. Compris ?
- Oui.
Il resserre son étreinte quelques instants puis me lâche.
- Maintenant…
Hyujin tourne la tête vers la porte.
- Il faut affronter mes parents.
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