Chapitre Deux écrit par Aigues Marine

Il fait très froid. Je suis transi et mon ami Jojo aussi. Aucun refuge de nuit ne nous accepterait, les chiens ne sont pas admis. Heureusement, ou peut-être malheureusement, pour nous que des maraudeurs soient passés et nous aient repérés. Autrement on n’aurait pas survécu à une hypothermie certaine.
Ils nous ont donnés des couvertures et une boisson chaude. On a échangé quelques phrases, histoire de nous réchauffer un peu le cœur et me rappeler que je fais encore partie du genre humain. J’avoue que ça m'a reconforté un peu réconforté. L’humanité n’est pas encore totalement éteinte comme la lune cette nuit là.
Le chocolat chaud offert fut un bon remontant et j'eus assez de force pour aller m’abriter avec Jojo sous l’auvent d’un immeuble, à l’abri du vent.
Dans mon sac de couchage doublé de couvertures, Jojo se colla à moi et nous fûmes une seule entité transférant nos températures l’un à l’autre. Je crois que l’on s'endormit juste après mais pas trop longtemps.
Des grondements incessants nous extirpèrent de ce doux moment de sommeil rare, les oiseaux dans leur nid ont dû être aussi épouvantés que nous. La nuit était tout à coup prise de lumières de toutes couleurs ! Ce fut un interminable feu d’artifice. Cette nuit, ma vision de la chose était très négative et critique. Quel gâchis et quel ridicule !
CE fut à ce moment à que je pris conscience que cela faisait 9 jours que je vivais sous le toit céleste, proie aux caprices de la saison.
Le nouvel an franchissait sa première marche victorieuse pour une part de l’humanité, pas pour Jojo et moi.
Des hurlements euphoriques résonnèrent dans l’air et le froid ne semblait pas les figer. Le monde était heureux de refaire un tour du soleil, comme un enfant rêvant d’un nouveau tour de manège !
Bonne année Jojo, mon ami à quatre pattes ! Je dois m’en sortir ! Je ne suis pas fait pour la misère ! Je m’appelle Joseph comme le prince d’Egypte ! Prophète malmené par ses propres frères !
Mais soudain mon optimisme fit place à un brouillard noir. Ma situation précaire se tint face à moi, narquoise et étonnée. Mais comment pourrais-je m’en sortir ! Je suis dans la merde jusqu’au cou ! Qui voudrait m’embaucher ? Je n’ai même plus d’adresse fixe ! Ni un endroit décent pour dormir ! Ni même assez de pièces pour m’acheter des habits convenables pour un entretien !
Ma nuit fut longue et très sombre ce jour là. Les mauvais souvenirs remontaient à la surface comme un cadavre. Heureusement que Jojo était à mes côtés, me regardant compatissant comme aucun homme ne l’aurait fait.
La vie dehors commençait à me peser et il y eut des moments où la mort était devenue un doux rêve très rassurant.
Mais qui s’occuperait de Jojo si je prenais le chemin de fer ?
Mon ancien patron ne m’aura pas ! Je vais le dénoncer quitte à subir ses représailles. Je n’ai plus rien à craindre ! Juste pour Jojo ! Je ne t’abandonnerai pas mon ami de l’infortune !