Depuis une année, Stanislas était enfin pris au sérieux dans son projet de kiosque à bonheur. S'il avait galéré pour se faire comprendre et que son idée de construction soit acceptée par la mairie, après de longs mois à s'arracher les cheveux pour prouver qu'il était ambitieux et déterminé, il avait enfin réussi à avoir un kiosque à l'entrée du parc de la ville.

Les gens pouvaient tout simplement acheter des objets de presse comme des journaux, des cahiers de jeux et quelques livres de lecture. Mais ce qui apportait le plus à Stanislas, c'était sa façon d'aider les gens avec leurs problèmes, en les aidant à trouver le bonheur ou à en donner. Parfois, il suffisait juste de dire à haute voix une citation pour que quelque chose opère dans la tête des personnes, et parfois, il fallait un peu plus discuter avec elles en illustrant les explications, un peu comme un psychologue le ferait. Le tout était de jouer sur l'énergie, les couleurs, la magie que le kiosque offrait dans sa décoration et sa réputation.

La semaine dernière encore, une belle jeune femme ne comprenait pas pourquoi elle ne se sentait pas heureuse alors qu'elle avait tout pour plaire à l'homme qui lui plaisait. Un physique entretenu et soigné, une attitude généreuse et pas des attentes très difficiles à atteindre. Et pourtant, elle ne comprenait pas pourquoi l'homme qu'elle voulait impressionner ne s'intéressait pas à elle. Stanislas lui avait répété plusieurs fois "Le bonheur est à l'intérieur de nous, pas à l'extérieur. Il ne dépend pas de ce que nous avons, mais de ce que nous sommes." Mais la femme restait tout de même persuadée que si elle avait un joli corps, elle attirerait plus facilement les hommes.

— Stanislas ! Stanislas !

Stanislas se pencha un peu, pour sortir la tête de son kiosque et vit la jeune femme à laquelle il pensait justement, arriver en courant jusqu'à lui.

— J'ai compris ! C'était sûrement évident à comprendre pour beaucoup de monde, mais j'étais tellement focalisée sur la façon dont on m'a élevée, que votre phrase ne me paraissait pas logique ! J'ai eu un rendez-vous galant avec l'homme dont je vous avais parlé et c'est uniquement parce qu'il m'a trouvée intéressante alors que je parlais avec une collègue ! Il ne cherchait pas un joli physique, mais disons plus quelqu'un qui sait lâcher prise et qui peut parler de sujets profonds. Je suis plus qu'une jolie femme.

— La vérité ouvre la porte au bonheur, tu as su te remettre en question et réfléchir sur ta façon de vivre et de penser jusqu'à maintenant. La vérité est devenue enfin visible à tes yeux, parce que tu es prête à ressentir du bonheur en ton âme.

— Merci de m'avoir aidée !

La femme versa un pourboire à Stanislas qui lui répondit en souriant grandement.

Son travail pouvait le faire passer pour un charlatan, qui volait des métiers et étalait des connaissances et croyances déjà existantes grâce à internet. Mais la vérité était que sa simple présence rendait heureux chaque passant. Le simple partage transférait du bonheur, par les regards, les sourires, les actions, les attentions et les paroles, mêmes minimes. Tout ça devenait une bulle de bonheur. Et le contact humain devenait de plus en plus chaleureux de ce coin de la ville.

Stanislas était ravi de voir autant de joie sur le visage des passants. Regarder les enfants venir jusqu'à lui en demandant des sucettes colorées en formes d’animaux lui réchauffait le cœur, tout comme assister aux échanges énergiques entre des habitués du coin, certains même, l'invitaient à se joindre à leur conversation. Il réconfortait les cœurs brisés, participait à la formation de couples ou encore soutenait et raisonnait les plus désespérés.

Tous ces gens étaient comme une famille qui lui apportait amour, joie et bonheur au quotidien.

Le bonheur ne se crée pas seul, il ne faut pas l'attendre mais aller le chercher en traversant des épreuves plus ou moins douloureuses et se surpasser afin d'être récompensé avec une paix et un bien-être. Certes, le bonheur sera momentané et rarement absolu, mais il permettra tout de même un moment positif, relaxant et ressourçant.

Chaque instant peut être du bonheur si on prend conscience que la vie est fragile, courte et que s'empêcher d'être heureux bouffe notre santé. Oui, tout n'est pas rose et merveilleux, mais on a tendance aussi à tout noircir et se surcharger de stress et de négativité.

Il faut essayer de capturer le bonheur, dans l'idéal, le plus possible et penser qu’un rien peut être extraordinaire.

Stanislas l'a fait en créant le kiosque à bonheur.