Une semaine qu'Arthur m'a embrassé et je me suis branlé tous les soirs en rejouant la scène, inventant une fin différente à chaque fois. Mon cerveau débordant d'imagination m'a aussi fourni une dizaine de scénarios pour l'aborder et engager la conversation avec lui. Evidemment, je n'en ai essayé aucun et évidemment Arthur ne m'a pas non plus adressé une seule fois la parole. Tous mes espoirs reposent sur la séance de piscine d'aujourd'hui et…

– Lucas, tu m'écoutes ou tu n'en a rien à foutre de ce que je te raconte ?

Julie vient de me hurler dans les tympans et je constate que nous sommes arrivés devant l'entrée de la piscine.

– Aujourd'hui, vestiaire collectif pour tout le monde, annonce M. Brunon.

Mes espoirs auront été de courte durée. Je me retourne et cherche mon ex-compagnon de cabine du regard. Il est de l'autre côté du hall d'entrée et peut-être que je me fais un film, mais il me semble lire une légère déception sur son visage. En tout cas, il vient de s'apercevoir que je le fixais des yeux et me regarde avec un haussement d'épaule qui, c'est sûr, lui, est bien réel. Bien entendu, dans les vestiaires il est avec sa tribu et dans la piscine, vu notre différence de niveau nous ne sommes pas dans le même groupe. Peut-être la semaine prochaine...

Le cours de natation ayant lieu le vendredi soir de seize heures à dix-huit heures, il marque la fin de la semaine et en sortant je prends immédiatement la direction de l'arrêt de bus.

– Tu fais quelque chose dimanche ?

Arthur marche à côté de moi, je ne l'avais pas entendu s'approcher.

– Qui ça ? Moi ?

– Parce que tu vois quelqu'un d'autre ? se moque-t-il en rigolant.

Big stress ! Mon cerveau doit être en pause car il refuse absolument de m'aider.

– Pourquoi tu me demandes ça ?

Ok, j'aurais pu trouver mieux comme réponse, mais je crois qu'il s'est déjà passé au moins trente secondes avant que j'ouvre la bouche, donc vaut mieux une réponse pas géniale que pas de réponse du tout, non ?

– T'aimes le foot ?

– Non, pas vraiment.

Cette fois j'ai répliqué rapidement, mais vu sa tête je crois que j'aurais mieux fait de prendre mon temps.

– On peut pas dire que ça soit facile de discuter avec toi, dit-il en souriant. J'avais deux places pour aller voir jouer l'OL, mais je trouverai quelqu'un d'autre pour m'accompagner.

Merde, il voulait m'inviter. C'est quoi ça ? Un rencard ?

– En fait, j'adore l'O.L.. Quand je dis que j'aime pas le foot c'est d'une manière générale et puis je croyais que tu voulais que je vienne te voir jouer. Enfin, je veux pas dire que ça n'aurait pas été cool de te regarder... enfin de regarder ton match !

– Donc c'est Ok pour dimanche ? Ils reçoivent Metz. Donne-moi ton numéro, je t'enverrai un message pour voir comment on s'organise.

– Ok, 06 33……. . Tu me donnes le tien ? Merde, c'est mon bus. À dimanche.

Je me dépêche de trouver une place dans le bus, près d'une fenêtre côté trottoir, dans l'espoir de l'apercevoir avant que le bus démarre. Malheureusement, il semble être déjà parti.

Je ne sais vraiment pas quoi penser de l'invitation d'Arthur. Bien sûr, je ne peux m'empêcher d'espérer que ce soit une sorte de "rendez-vous amoureux". En même temps, si c'est vraiment ça je n'ai aucune idée de la façon dont je devrais me comporter car on ne peut pas dire que je sois un professionnel du sujet ! Résultat, je stresse déjà à mort alors qu'on est que vendredi soir. À tel point que je serais peut-être aux urgences avant même d'avoir pu mettre les pieds dans les tribunes du stade.

Il faut que je me calme et que je procède méthodiquement. En premier, il va falloir convaincre mes parents de me laisser aller au match sans que ça ne paraisse trop suspect. Si je franchis cette première étape, il faudra ensuite faire une recherche sur l'Olympique Lyonnais pour ne pas passer pour un imbécile pendant le match. Et pour terminer, il faudra que j'achète un maillot ou une écharpe du club afin de ressembler à un vrai supporter.