Thomas s'arrêta à la pharmacie au coin de sa rue, afin d'acheter des préservatifs pour la fin de soirée, et tourna à gauche pour remonter le Cours Vitton en direction de son travail. Il accéléra le pas car il allait être en retard. Ses collègues risquaient de ne pas trop apprécier, c'était toujours le moment le plus chargé de la soirée, même en milieu de semaine.

Il arriva finalement juste à temps pour enfiler sa tenue et se mettre au travail. Il était en cuisine avec Sylvain, ils eurent à peine le temps d'échanger un rapide bonjour, qu'un groupe important d'étudiants arrivait, avec de nombreuses commandes spéciales. Il fallut donc rapidement composer des burgers sans sauce, sans salade, sans oignon... Rien de tel pour se mettre rapidement dans le bain.

Thomas ne s'en plaignait pas, il aimait bien travailler en cuisine et adorait particulièrement ces situations un peu speed qui l'obligeaient à s'organiser et à se concentrer. Pour lui, c'était une sorte de défi, comment gérer son temps et son organisation pour essayer d'être le plus efficace possible. Il n'était pas dupe et savait très bien qu'il n'en retirerait aucune gratification, ou alors juste celle qui relève de la manipulation du personnel par la flatterie, du management de base mais malheureusement souvent efficace. Il s'agissait surtout pour lui de rendre son travail plus intéressant, et puis il fallait reconnaître que même si le salaire n'était pas génial, ce job avait trop d'avantages pour risquer de le perdre.

C'est seulement vers vingt-deux heures que le service commença à s'alléger et qu'il put enfin échanger quelques mots avec Sylvain. Il aimait beaucoup travailler avec lui. Le jeune homme, étudiant à l'INSA, était qui plus est, très mignon. Pas très grand et assez mince, il avait surtout de magnifiques yeux bleus et était d'une humeur toujours joyeuse. Thomas avait même essayé, plus ou moins discrètement, de le draguer et l'avait même embrassé, à la fin d'une soirée entre collègue où ils avaient tous un peu trop bu. Sylvain n'avait malheureusement pas autant apprécié le moment que lui. Néanmoins et aussi bizarre que cela puisse paraître, ça avait renforcé leur relation, et il leur arrivait régulièrement, lorsqu'ils finissaient le travail au même horaire, d'aller manger chez l'un ou chez l'autre et de finir la soirée en discutant ou en jouant à la console. Ça ne se serait pas le cas ce soir, le futur ingénieur finissait à vingt-deux heures trente et Thomas allait se retrouver seul en cuisine jusqu'à la fin de son service.

Cinq minutes avant son heure de départ, plusieurs commandes étaient arrivées, l'obligeant à rester un peu plus longtemps, pour aider Cyril qui venait d'arriver. Il était donc minuit passé d'une bonne vingtaine de minutes lorsqu'il put enfin quitter le fastfood, pour repartir en direction de chez lui.

Il accéléra le pas pour essayer d'arriver avant que son plan cul, comme les appelait Chloé, ne soit reparti. Il n'aurait par contre sûrement pas le temps de se doucher pour se débarrasser de la forte odeur de friture qui commençait à l'écœurer.

Lorsqu'il tourna à l'angle de sa rue, il aperçut une silhouette qui attendait devant la porte de son immeuble. L'homme tourna la tête vers lui et Thomas lui fit un petit signe. Au moins, il n'était pas encore reparti. Trente secondes plus tard, il arrivait à sa hauteur.

– Je suis désolé du retard, j'ai dû rester un peu plus longtemps que prévu à mon travail. Thomas, ajouta-t-il en lui tendant la main.

Après lui avoir serré la main et avoir semblé hésiter un moment, le garçon qui devait avoir à peu près son âge lui répondit enfin :

– Théo.

Son partenaire d'un soir ne semblait pas très à l'aise et ne devait sans doute pas être un habitué de ce type de rencontre. Thomas ouvrit rapidement la porte avant que celui-ci ne change d'avis et ils entrèrent tous les deux dans le hall du bâtiment.