Chapitre 40 (lundi 2 mai 2022)
Arthur descendit du bus et marcha d'un pas rapide vers l'entrée de Clermont-Tonnerre. Il profitait de son retour à terre pour rendre visite à Paul, son habituel binôme sur la frégate Forbin. Ce dernier s'était bêtement blessé lors de la réparation d'une panne bénigne, sur un des deux moteurs diesel du navire. Il avait été rapatrié quelques jours plus tôt, sur l'hôpital militaire de Brest. Arthur, quant à lui, était en permission, la frégate étant revenu de mission deux jours auparavant.
Le jeune militaire entra dans la chambre de son ami, ce dernier était concentré sur un reportage qu'il regardait à la télévision.
– Salut Paulo.
– Oh, salut Arturo. Je ne t'ai pas entendu entrer. Comment vas-tu ? demanda-t-il en éteignant la télévision.
Arthur se pencha et les deux militaires se firent une longue étreinte.
– Bien, je suis content d'avoir remis les pieds sur la terre ferme. Et toi, la douleur est supportable ?
– Ça va à peu près, avec tous les médicaments que je prends.
– Et ta jambe ?
– Rien de bien nouveau, si ce n'est que le chirurgien pense que je risque de ne pas échapper à l'amputation. Il se donne encore un tout petit peu de temps pour voir l'évolution, mais il m'a dit de me préparer au pire. Dans tous les cas, je repasse sur le billard dans trois jours. Mentalement, je me prépare à me réveiller avec un bout de moi en moins.
La nouvelle laissa Arthur sans voix, et il sentit quelques larmes couler sur sa joue.
– Je suis vraiment désolé.
– Il ne faut pas, tu n'y es pour rien. Ça fait deux jours que le doc m'a prévenu, et je peux te dire que ça a tourné là-dedans. Et puis hier, je suis tombé sur un reportage sur un nageur amputé d'une jambe, qui venait de réaliser les minimas pour les championnats de France. Mais attention pas en handisport, avec les valides. Franchement, il est génial. Le mec, il ne se pose pas de question, il fonce. Lui ce qu'il veut c'est un être un nageur et c'est tout, et là il réalise un truc de dingue ! Tu ne peux pas savoir comme ce reportage m'a reboosté, d'ailleurs j'étais en train de le regarder une nouvelle fois. Je sais que ça va être compliqué, je ne fais pas d'illusions, mais maintenant je réalise aussi qu'on peut vivre normalement et avoir des projets.
– Franchement tu m'impressionnes. Et je te promets que tu pourras compter sur moi pour t'aider. Et l'armée ?
– Je ne sais pas trop. Il y a un gradé qui est passé mais j'étais tellement shooté à la morphine que j'ai pas compris grand-chose. Mais de toute façon mon engagement finit en mai et ça sera le dernier. Et toi, tu vas resigner ?
– Non, je crois que j'en fais le tour. Avec mon congé de fin de campagne, en cumulant tout, j'arrive à mi-juillet, qui correspond à la fin de mon contrat. Donc c'est terminé pour moi aussi.
– Et tu vas faire quoi ?
– Je ne sais pas encore avec certitude. Je vais prendre encore le temps d'y réfléchir, mais je reprendrais bien mes études.
Les deux jeunes hommes discutèrent encore de longues minutes, heureux de se retrouver malgré les circonstances difficiles. Et puis vint le moment de se séparer.
– Je repasse demain. Tu veux que je t'emmène quelque chose ?
– Non, c'est bon mes parents m'ont pris tout ce dont j'avais besoin. Ah si, un truc à bouffer ? Une pizza...
– ... Quatre fromage avec du jambon en supplément !
– Parfait, tu maitrises ton Paulo, répondit Paul en rigolant. Et dis-moi, tu loges à l'hôtel je suppose ?
– Oui, un petit truc pas trop cher, dans le centre.
– Regarde dans le deuxième tiroir, il y a les clés de mon appart. Tu y seras bien mieux.
– T'es sûr, ça m'embête.
– Pas de ça entre nous Arturo ! Tu te rappelles comment y aller ?
– Oui sans problème. Et merci, vraiment.
Une dernière accolade et Arthur quitta son ami. Il décida de passer directement à l'hôtel pour récupérer ses affaires. Tant pis pour la nuit payée d'avance, il préférait s'installer dès ce soir dans le petit appartement de Paul.
Annotations
Versions