Ton amour
J'ai les marques de notre relation sur le corps. La douleur en moi ne partira jamais, tu sais. Ces yeux, tes si beaux yeux sur moi.
Mais ce regard... Ce désir de me faire du mal. Pourtant tellement de jolis mots, de jolies promesses. Je ne recommencerai pas, me disais-tu.
J'y ai cru, plus d'une fois, tu es revenu. Pourquoi rester, pourquoi subir, pourquoi ne rien dire ? Pourquoi hocher la tête quand on me demande si ça se passe bien entre nous, pourquoi baisser les yeux quand un autre homme m'aborde et que tu es au loin, les yeux rivés sur moi.
Les mêmes images tournent en boucle dans ma tête, ces soirées devant le miroir à parcourir mon corps et à pleurer sa triste transformation, sa dégradation, petit à petit. Devoir se couvrir le corps, devoir te demander l'autorisation, pour tout, pour n'importe quoi. Cette spirale infernale ne s'arrête pas, c'est toujours plus, ce n'est jamais assez pour toi.
T'entendre te plaindre de moi, de mon comportement, à ta famille, à nos amis. Rien ne te satisfait, tu n'es jamais d'accord, jamais content. Tu parles d'amour, de pardonner, qu'il faut oublier, passer à autre chose. "Arrête de ressasser le passé, pense à notre avenir".
Tes projets. Nos projets. C'est fini.
Stop.
Je m'en vais, il le faut. Laisse-moi partir. Ne me regarde pas comme ça, je le connais trop bien ce regard. Mais ce soir, non, je ne me laisserai pas faire. Je puiserai jusqu'à la dernière force qu'il me reste pour t'empêcher de lever la main sur moi. Je ne suis plus à toi, je ne suis plus ta chose, plus cette personne que tu penses à tes pieds pour l'éternité et sous tes conditions.
Je ne peux plus, je ne tiens plus, tu m'as détruite. Est-ce que c'est ce que tu voulais ? Est-ce que tu l'avais prévu ? Est-ce moi, est-ce de ma faute ? Est-ce que c'est de ma faute ? Je t'ai rendu méchant. Ce sont tes mots. Mais qu'ai-je fait pour cela ? Tu es incapable de me répondre.
Je te crie de me laisser partir, que j'ai trop mal pour que ça continue. Je vois tes poings se serrer, ton regard changer. Je te supplie de ne pas faire ça. Et dire que tu parlais d'amour, mais putain tu cachais bien ton jeu…
Tu sais ce que tu es, au fond de toi, tu le sais. Tu es dangereux. Tu as mal, donc tu fais du mal. Ce n'est pas la solution, ça ne le sera jamais. Preuve en est. Tu ne t'arrêtes que quand je ne bouge plus. Tu ne fais pas du mal dans le vide, tu as besoin de réaction, tu as envie que je résiste. À croire que tu aimes que je me défende. Mais comment le pourrais-je ?
Ce soir, c'est terminé, plus de promesses, laisse-moi partir.
Tu vois, tu pleures. Tu cries que tu m'aimes, que cette fois-ci, tu vas arrêter, que c'était une mauvaise passe, que tu vas en parler et que ça ira mieux. Mon pauvre. C'est en toi. C'est ce que tu fais tous les jours qui t'a rendu comme ça.
Je te laisse là, mais une autre prendra sans doute ma place. Tu me demandes une dernière nuit, une dernière fois. Tu n'as même pas conscience que tu m'as brisée, que tu m'as trop frappée pour que je me relève sans difficulté.
Je te vois te lever, tes larmes ont séché, tes poings sont fermés. Tu te rapproches de moi. Je comprends.
Mes derniers mots étaient pour toi, cette dernière phrase t'était destinée, mais tu ne l'as jamais vraiment écoutée.
"Ce que je voulais, c'était ton amour."
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