Chapitre 1 : Une enfance difficile.

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"Rien ne peut compenser une seule larme d'un enfant."

- Fiodor Dostoïevski.

Lors d'une nuit d'orage, entre le tonnerre et l'éclair, une femme hurlait. Ses cris furent masqués par les bruits causés par la tempête. La personne était dans une chaumière. A sa droite, se tenait un homme, probablement son époux. Il l'encourageait du mieux qu'il le pouvait. Après des heures et des heures, des cris plus aiguës se firent entendre. L'enfant venait de naître. Celui-ci se faisait bercer, la mère le couvrant du regard et le père étant fier de ce petit homme. Les parents se regardèrent et se mirent d'accord sur le nom: Hunter. Hunter Teïcourd. Ce nom lui allait à ravir.

Hunter fut un bébé avec de grandes capacités. Il comprenait rapidement et grandissait à une allure folle. A un an, il savait marcher avec plus ou moins d'aisance et connaissait plus de mots que les enfants de son âge. Cette différence lui entraîna bien des difficultés car les autres parents jalousaient Stéphanie et Laurent. Au-delà de cette différence mentale, il existait également une différence physique : Hunter avait de magnifiques yeux gris métal. On pourrait penser que cela n'était pas bien grave, qu'après tout, c'est seulement une couleur inhabituelle mais inoffensive. Malheureusement, ce ne fut pas le cas. Cette couleur était associé dans leur culture à la souffrance, au malheur et à la haine. Ainsi, tout le monde se mit à craindre Hunter, même son propre père. Il se fit de plus en plus absent et on racontait qu'il allait voir ailleurs. Ce geste brisa l'enfant et jamais il ne s'en remit.

Bien des années plus tard, lorsqu'il avait sept ans, un événement dramatique intervint dans sa vie. Les images le hantèrent à jamais...

Hunter se promenait dans les jardins des Elecflabres. Il passa devant une maison quand il entendit des cris d'enfants. Son sang se glaça. "Non, non et non" se répéta-t-il avec ardeur. "Il ne faut pas qu'ils me voient". Il courut se cacher derrière un tonneau et observa les alentours. Il vit une horde de personnes de son âge passait devant lui sans s'arrêter. Il entendit leur chef dire.

— Si vous voyez le "Bizarre", criez. On va lui donner une petite leçon à celui-là.

L'enfant se dissimula davantage, son coeur se serrant lorsqu'il entendit cette phrase. Il en avait marre d'être frappé. Il ne pouvait pas lutter contre tout ce monde. Ils étaient bien trop nombreux pour lui ! Hunter prit une grande inspiration, sortit de sa cachette et partit rentrer chez lui sans se retourner. Il voulait voir sa mère. Elle le comprenait toujours. C'était la seule personne qui s'occupait de lui avec amour. Il avait beaucoup d'affection pour elle. Lorsqu'il arriva sur le seuil de la porte, il entendit des cris. Il poussa la porte et passa sa tête, étonné. Ce qu'il vit le révolta. Laurent, son père, se tenait debout devant Stéphanie, sa mère. Celle-ci était à genoux et semblait supplier son époux. Elle gémissait.

— Je t'en supplie, Laurent, ne part pas.

— Non, répliqua-t-il d'un ton sec. Je m'en vais. Tu as refusé d'abandonner ton fils. Je suis allé voir ailleurs et à ce propos, ajouta-t-il avec un sourire mesquin, elle attend un enfant. Je vais fonder une autre famille, loin de toi et de cet être abject.

— Comment oses-tu ! s'écria-t-elle en se redressant, furieuse. Comment oses-tu parler ainsi de notre fils !

— Ton fils, reprit-il avec rage. Ce n'est pas le mien.

Clac. Hunter mit sa main devant sa bouche. Sa mère venait de perdre son sang froid et venait de frapper son père. Ce dernier se massa la mâchoire, le regard noir. Il s'avança d'un pas, l'air menaçant. L'enfant entra d'un seul coup et se plaça entre ses parents. Il écarta ses bras dans l'unique but de défendre sa mère. Laurent ricana.

— Bonjour, toi. Va-t-en tout de suite, hors de ma vue !

— Laisse maman tranquille ! lui répondit le garçon avec force.

L'homme le poussa violemment par terre et attrapa la jeune femme par le cou. Il serra son emprise, la faisant suffoquer. Hunter se redressa, se jetta sur le bras de son père et le martelait avec le peu de force qu'il avait.

— Laisse là ! criait-il avec désespoir. Laisse ma maman tranquille !

En vain. Laurent relâcha son épouse quelques temps après. Stéphanie tomba au sol et ne se releva pas. Ses yeux étaient fermés et son visage bleuté. Hunter s'agenouilla et pleura. Il comprit. Son géniteur venait de tuer sa mère. La seule personne au monde qui l'aimait. La seule personne au monde qui voulait s'occuper de lui. Morte. Plus rien. Il sentit une haine montait en lui. Son regard croisa celui de Laurent et ce dernier lui dit.

— Hors de ma vue, gamin.

Après cette phrase, il lui cracha dessus et partit, laissant là son fils pleurait la mort de sa mère. Rien n'était plus triste qu'un deuil, notamment lorsqu'il est vécu par un enfant.

Ce moment marqua Hunter à jamais. Son père ne l'avait jamais recueilli suite à ça. Il grandit dans la rue. Il se faisait frapper et insulter sans rien dire. Il apprit à chasser afin de se nourrir. Il apprenait également en cachette à se servir de ses pouvoirs afin de se défendre face à tout se monde. Néanmoins, cela se révélait bien trop compliqué. Il n'arrivait pas à oublier la fois où Gabriel et Adriel Eclair, deux frères, l'avaient pris à parti, deux ans après la mort de Stéphanie.

Hunter venait de tuer un lapin. Il avait crée du feu grâce à sa magie et il en était très fier. Il se savait être un enfant surdoué, néanmoins, personne n'était là pour lui enseigner les choses. Il devait se débrouiller par lui-même et cela lui posait d'énormes difficultés. Mais il ne se décourageait pas et apprenait avec bravoure. Il ne devait pas se laisser abattre. Sa survie en dépendait. Par ailleurs, il prit le morceau de lapin qu'il avait délicatement découpé et le mit sur le feu, se léchant les babines. Cela faisait plusieurs jours qu'il n'avait pas mangé et il en était fortement affaibli. Malheureusement, certains l'avaient bien compris et il subit leur lâcheté de plein fouet. Hunter prit sa viande et mangeait un bout quand il entendit un craquement. Il la posa et se releva, aux aguets. Il se tourna vers sa gauche et se mit en position. Il se méfiait. Néanmoins, son inexpérience était tel qu'il n'avait pas pensé à surveiller ses arrières. Un petit animal passa entre ses jambes et le fit tomber. Un autre se mit sur sa poitrine et lui envoya une puissante décharge. Hunter retint un hurlement. Il devait résister, il ne devait pas montrer sa faiblesse. Il essayait de se défaire de leur prise mais les deux animaux semblaient ne pas vouloir le lui permettre. Alors, il décida de faire un coup de poker. Il resta là, inerte, essayant de se faire passer pour mort. Il sentit un poids inconnu s'enlevait progressivement comme avec méfiance. Hunter entendit quelques secondes puis, se sentant tout à coup puissant, il se redressa et observa ses agresseurs. Ces derniers venaient de se métamorphoser sous leur forme humaine et c'était avec stupeur qu'il reconnut les frères Eclair. Le sang du jeune enfant bouillit et il sentit ses os craquer. Il s'écroula au sol et prit sa tête entre ses mains, la douleur le transplantait sur place. Ses ennemis furent pris de dépourvus. Il entendit Gabriel apostrophait son frère.

— Qu'est-ce que l'on doit faire, Adriel ? Qu'est-ce qu'il fait ?

— Il bluffe, j'en suis sûr, affirma l'aîné.

Celui-ci s'avança vers l'enfant, essayant de paraître brave face à son petit-frère. Il se pencha sur le corps d'Hunter et, tout en donnant quelques coups de pieds, lui demanda.

— Hé, le "Bizarre", arrête ton cinéma !

Seul le silence lui répondit. Alors, Adriel se pencha et analysa le visage de son ennemi. Hunter semblait comme endormi. Soudain, il ouvrit les yeux et son adversaire vit deux gris métaux le fixer avec une haine non dissimulée. Il entendit un grognement raque et son frère s'écria.

— Attention, Adriel !

Hunter, dont le visage était désormais bestial, se jetta sur lui et tenta à tout prix de le mordre à la jugulaire. Il essayait de se protéger mais recevait de multiples morsures et griffures. Gabriel lui lança un sort d'immobilité mais celui-ci ne semblait pas l'affecter plus que cela. Les jeunes frères faisaient face à une bête déchaînée. Celle-ci les attaquait sans répit et ils commencèrent à faiblir, jusqu'au moment où arriva le drame. L'animal se plia sur ses jambes, les poils hérissés. Ses yeux étaient révulsés, ses crocs sortis, la bave coulée... Il bondit sur Adriel et referma sa mâchoire sur son cou. D'un coup sec, il brisa les os et sentit la vie le quitter. Aussitôt, il sentit l'horreur l'envahir et il reprit petit et à petit sa forme humaine. Il observa sa victime, effaré. Il venait de commettre un meurtre. Un terrible meurtre. Il était devenu un meurtrier ! Non ! Il daigna son regard sur Gabriel qui était penché sur le corps de son frère, le visage dénué de sentiments. Il murmura d'une voix froide.

— Qu'as-tu donc fais...

— Je ne voulais pas ! se justifia-t-il en balbutiant. Je n'étais plus maître de mon corps !

— Je m'en moque ! hurla le frère de la victime. Tu as tué Adriel ! Tu es un assassin ! Oeil pour oeil, dent pour dent ! ajouta-t-il en se redressant et se préparant à se battre.

— Ca suffit ! intervint une voix glaciale.

Gadriel et Hunter se tournèrent vers l'intru. Celui-ci était Alexandra du Soleil, la dirigeante de leur clan. Elle s'avança vers les enfants tout en regardant le corps sans vie d'Adriel. Elle s'arrêta à quelques pas de lui et sembla analyser la situation. Hunter l'observa discrètement, impressionné. C'était la première fois qu'il avait l'occasion de la rencontrer. Il aurait aimé que cela fut dans de meilleures circonstances mais il avait appris à savourer n'importe quel moment aussi minime fut-il. Quant à Gabriel, il était rempli de colère. De quel droit venait-elle s'interposer ? Il voulait se venger et elle l'en avait empêché ! Comme si elle avait lu dans ses pensées, Alexandra prit la parole.

— Sincèrement, Gabriel, je pense que tu aurais aussitôt rejoint ton grand frère. Je t'ai sauvé la vie. Vous avez tellement harcelé ce jeune homme que sa haine a rendu sa magie très puissante.

— Vous justifiez son meurtre ? s'agaça-t-il.

— Absolument pas, lui répondit-elle durement. Une telle horreur ne devrait pas être excusée. L'acte commis n'est pas justifié, néanmoins, sa motivation oui. C'est pourquoi, vous deux, vous allez me suivre. Je vais enfin m'occuper de cette histoire, il serait temps, n'est-ce pas, Hunter ?

Ce dernier hocha tristement la tête. Son heure avait sonné. Il avait commis un acte irréparable et justice devait être faite. Il suivit Alexandra qui eut pitié de lui. Elle secoua la tête et son visage redevint froid. Elle se rendit au coeur du village, suivit des deux enfants. Elle allait enfin régler cette histoire qui avait bien trop perdurée.

Cet évènement l'avait marqué à jamais. Néanmoins, c'est ainsi que sa vie prit un véritable sens, un nouveau tournant. La renommée d'Hunter Shadow, anciennement Teïcourd, venait de commencer à naître.

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