6
II traversa la ville qui s’ébrouait dans son matin calme. Le camion ne passerait qu’en début d’après-midi.
Le plus douloureux avait été la surprise de tous. Aucun ne l’attendait. Il était mort pour eux. N’était-ce pas la réalité ? Il venait d’effacer son passé. Il avait pensé que sans ce poids, il pourrait commencer une nouvelle vie. Comment avait-il pu se tromper ainsi ? Un reste d’espoir, qu’il n’avait pas senti, l’avait sans doute abusé.
Il n’avait touché à rien, s’appuyant contre un mur ou s’asseyant du bout des fesses. La signature était la même, ils feraient vite le lien. Il devait se fondre dans les bas-fonds de la métropole. Son appartenance à la société, il l’avait perdue depuis longtemps. Il jeta ses papiers dans un avaloir d’égout. Il n’existait plus.
Il se terra dans le fossé en attendant le camion. Il voulait repartir avec ce brave type, comme pour bien refermer cette parenthèse.
— Quand je t’ai aperçu, j’ai tout de suite su que c’était toi. Ça me fait plaisir de te revoir !
— Merci.
Le premier mot gentil et sincère qu’il prononçait depuis si longtemps.
— Tu repars déjà ? Tu as fait ce que tu voulais ?
— Si on veut.
Il rabattit la visière de sa casquette, espérant sombrer dans un sommeil qu’il aurait voulu éternel.
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