Mesdames et messieurs les jurés, votre honneur,

Nous sommes aujourd'hui en présence d'un cas particulièrement intéréssant. Mon client ici présent est accusé d'avoir, selon les termes du témoins, trucidé le chat de la voisine. Vous pourrez penser, à tord, entendons-nous bien, que mon client est un homme sans coeur.

Vous n'êtes pas sans savoir que la loi numéro 2021-1539 récement mise à jour condamne fermement toutes formes de violence envers les animaux domestiques, et selon toute vraissemblance, Mistigri, le chat de la voisine, était bien son animal de compagnie.

Mon estimé confrère le procureur de la République pourra sans peine contrecarrer mon argumentaire visant à démontrer que la véritable coupable est la voisine, qui n'a pas su surveiller son chat comme il se devait. Elle a donc manqué à son devoir, faisant d'elle la véritable meutrière de son petit protégé félin.

C'est pour cette raison que vous allez me voir me faufiler dans une faille de démonstration visant à vous faire conmprendre que mon client est innocent.

J'ai eu vent, comme vous il y a quelques minutes, que par un malheureux mais fortuit incident du hasard, la voisine, madame Mèrmichel, a été assassinée. Bien que ce crime soit atroce et que nous ne manquerons pas de rattraper l'assassin, car j'ai autant confiance en la justice pour ça que pour délivrer un verdict juste à cette affaire, il reste un fait inéluctable : Madame Mèrmichel ne pourra pas venir temoigner.

Alors oui, je vous entend déjà avec vos grands sabots : pourquoi témoignerait-elle ? On sait déjà que c'est son chat, on trouvera sûrement une preuve d'achat de croquettes et sûrement un enfant du village pourra confirmer qu'on l'appelait la vieille aux chats ! Et je vous réponds : Oui. Mistigri était son chat, c'est indégniable. En revanche, je ne crois pas avoir un seul témoin qui pourrait nous confirmer la chose suivante :

Mistigri était-il vivant au moment de son massacre ?

Vous n'êtes pas sans connaître la célèbre experience du chat de Schrödinger, qui, tant qu'on ne soulevait pas la boîte, était ni mort ni vivant, ou à la fois mort et vivant. Notre affaire pourrait s'y comparer. Le témoin occulaire a affirmé avoir vu la scène, mais aucun miaulement plaintif n'a été entendu.

Mon client a tout simplement trouvé la dépouille de Mistigri, et conformément à l'article L226-1du Code rural et de la pêche maritime qui dispose que personne ne doit laisser une dépouille animal en pleine air sous peine de sanctions, il a voulu lui offrir une dépouille décente.

Mon client n'a jamais été qu'un citoyen voulant accomplir son devoir.

Et si vous en doutez, rappelez-vous qu'on ne saura jamais si le chat était vivant ou non au moment du supposé crime. Ainsi, mon client est une sorte de coupable de Schrödinger, à la fois coupable et innocent.

Et vous ne voudriez pas condamner un innocent, n'est-ce pas ?

Je vous remercie.