Sur le chemin du district d'Orvud . . .
Nous galopons en direction du district d'Orvud, non loin de l'énorme titan du roi, qui continue de ramper dans ce sens. En chemin, nous racontons tout ce qui nous est arrivé à nos amis. Une fois notre récit terminé, Hansi prend la parole :
- Récapitulons les infos. Rhodes Reiss a donc révélé l'existence d'un titan originel dont Eren détient actuellement le pouvoir. Mais il doit être possédé par un Reiss pour déployer son plein potentiel. Cependant, à supposer qu'un Reiss obtienne ce titan originel, il serait soumis à la volonté du premier roi et refuserait de libérer l'Humanité des titans. Très intéressant, tout ça. Selon le roi fondateur, on vit donc dans la paix véritable. Une vision originale du concept de paix . . .
- Autrement dit, déclare mon cadet, on a encore la possibilité de choisir. Si je laisse son titan me dévorer, Rhodes Reiss redeviendra lui-même. Obtenir l'authentique titan originel est encore possible.
- Tu n'y penses pas ! rétorque Mikasa.
- Oui, c'est envisageable, dit le caporal-chef Livaï. On pourrait boucler Rhodes Reiss le temps de défaire son lavage de cerveau. Si ça marchait, on tiendrait peut-être le moyen de sauver l'Humanité. Et, donc, Eren, tu serais prêt à te sacrifier, c'est ça ?
- Oui.
- Je te l'interdis ! m'exclamé-je. Il est hors de question que tu donnes ta vie pour un plan aussi risqué !
- Éléonore a raison, Eren, tu ne peux pas faire ça . . . soutient la jeune asiatique.
- Il y a une alternative, déclare Historia. Mais d'abord, votre plan a bien trop de failles. Rien ne garantit qu'on puisse libérer Rhodes Reiss de l'influence du premier roi. Et même enfermé, il pourrait nous asservir en altérant notre mémoire. Bref, le pouvoir du titan originel présente trop de paramètres inconnus.
- Oui, c'est vrai, confirme Armin. Dans son état actuel, Rhodes Reiss redeviendra-t-il humain en dévorant Eren ? Rien ne nous le garantit non plus.
La jeune blonde hoche la tête, puis poursuit :
- Plutôt que de s'en remettre à cette imposture de pacifiste, laisser le pouvoir entre les mains de son hôte actuel est la meilleure chance pour l'Humanité. J'en suis sûre, votre père voulait en fait nous arracher à l'emprise du roi fondateur. S'il a dérobé son pouvoir à ma soeur et éliminé les descendants des Reiss c'est parce qu'il n'avait pas d'autre choix.
Je hoche la tête pour exprimer mon accord avec ces propos, tandis que mon frère pose une main sur son crâne en murmurant :
- Papa . . .
- Elle a raison ! s'exclame le blond. Le docteur Jäger n'aurait pas fait ça sans une bonne raison !
- Oui, ajoute notre soeur adoptive, on doit pouvoir aider l'Humanité sans être descendant des Reiss. C'est pour ça qu'il t'a confié la clé du sous-sol.
- Le sous-sol ? demande Sasha. Ah, oui, ça me revient ! C'est sacrément important, c'est ça ?
- Eh ben, oui . . . confirme Conny.
- On a surtout enfin un moyen de reboucher le mur, souligne Jean. Partant de là, le choix est évident.
- C'est vrai que c'est une avancée, affirme Livaï.
- Je rejoins les autres sur le choix à faire, déclare Hansi. Mais es-tu sûre du tien, Historia ? On ne peut pas laisser un titan se balader tranquillement entre les murs. Et vu sa taille, impossible de le capturer. Autrement dit, poursuit-elle en pointant du doigt la créature, il va falloir mettre fin aux jours de ton père.
La jeune fille l'observe en silence pendant un moment, puis dit calmement :
- Eren, pardonne-moi. Dans la chapelle souterraine, j'étais vraiment prête à me transformer en titan et à te dévorer. Et ce n'était pas pour le bien de l'Humanité. Je voulais croire que mon père n'avait pas tort. Je ne voulais surtout pas le décevoir . . . Mais le temps des adieux est venu.
Elle prononce cette phrase avec une voix déterminée et un regard assuré. Je dois avouer que la nouvelle amie que nous découvrons m'impressionne et m'étonne à la fois. Elle est si différente de celle que nous avons rencontré, il y a trois ans !
Je suis interrompue dans ma réflexion par la voix de notre supérieure blessée :
- Avant cela, il y a encore une chose que nous n'avons pas éclaircie. Pourquoi Rhodes Reiss a-t-il enlevé Éléonore ?
- Il ne nous a rien dit à ce sujet, répond le jeune brun. En fait, c'est à peine s'il lui a prêté attention lorsque nous étions dans la caverne.
- Il comptait s'occuper de son cas lorsqu'il en aurait fini avec toi, déclare Historia. Je lui ai demandé la raison pour laquelle il avait emmené Éléonore avant que nous ne vous rejoignions en bas, en lui expliquant qu'elle ne possédait rien de particulier. Il m'a rétorqué qu'elle avait sûrement plus que nous ne le pensions, mais qu'elle nous expliquerait elle-même tout cela une fois le rituel terminé.
Tous les yeux s'écarquillent de surprise et tous les regards convergent vers moi, me mettant quelque peu mal à l'aise.
- Alors, Éléonore ? me demande le caporal-chef. Aurais-tu des explications à nous fournir ?
Étant moi-même surprise, je ne lui réponds pas tout de suite. Comment le roi des murs s'est-il douté de quelque chose et à quoi faisait-il allusion, exactement ? Mes origines ? Mon sang ?
- Je ne comprends vraiment pas . . . murmuré-je.
- Tant pis, dit Hansi en prenant mes mots pour un déni. Nous nous occuperons de cela plus tard. Pour le moment, la priorité est de nous débarrasser de la menace que représente ce titan . . .
Je pousse un soupir, soulagée de ne pas avoir à fournir d'explications pour l'instant, car je me sens toujours aussi perdue sur cette question depuis qu'il n'est plus à mes côtés pour me conseiller et me dire quoi faire . . .
Je reporte donc mon attention sur mon cadet, en lui demandant :
- Dis-moi, Eren . . . Est-ce que tu pensais vraiment ce que tu disais dans le sous-sol de la chapelle, lorsque tu déclarais te sentir totalement inutile et ne plus vouloir vivre ?
Il garde le silence pendant quelques secondes, avant de me répondre :
- Et bien, pour tout t'avouer, oui . . . Je pensais vraiment chaque mot de ce que je disais.
Je le serre aussitôt dans mes bras, en m'exclamant :
- Je t'interdis de penser cela de toi ! Aurais-tu oublié tout ce que tu as fait pour nous ? Je te rapelle que sans toi, nous serions tous morts à Trost, il y a quelques mois. C'est aussi toi qui a secouru Mikasa, il y a six ans. Qui sait ce qu'il serait advenu d'elle si tu n'avais été là ? Tu m'as même sauvée bien avant cela ! Il fut un temps où l'avenir était incertain pour moi. Je ne savais plus à quoi dédier mon existence, mais en te prenant dans mes bras, le jour de ta naissance, et en croisant ton joli regard vert, j'ai compris que mon rôle était de veiller sur toi, de t'aider à grandir et de te soutenir. Tu as redonné un sens à ma vie et je t'en remercie. Alors, je t'en prie, ne dis plus jamais que tu ne mérites pas de vivre, parce que c'est faux. Je sais que la vie peut se montrer si cruelle qu'il nous arrive de baisser les bras et de se dire que tout est vain, mais dans ces moments, repense à ce que je viens de te dire, repense à tout ce que tu as fait pour nous et n'oublie jamais que tu as une grande soeur qui t'aime et qui tient à toi plus que tout au monde.
Il ne répond rien, se contentant de passer ses bras autour de moi pour me rendre mon étreinte, mais ce geste me suffit amplement.
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