Heroic Terminus
Dernières pages du journal d'Alecas, héros de Branwen
Cinquante-quatrième jour de voyage
Perdu dans les terres brûlées septentrionales. Mon cheval est mort ce matin et j'ai prélevé les parties de sa chair qui n'étaient pas encore putréfiées. Depuis cet affrontement avec les orques nécrotiques, il se traînait une malédiction qui le faisait pourrir de l'intérieur.
J'avance toujours dans ce paysage de cendre. On raconte que, jadis, un splendide royaume occupait y prospérait. Ses habitant vénéraient la Flamme Primordiale et nul n'égalait leur puissance et leur sagesse. Mais leur grandeur finit par les conduire à une ère de décadence. Ils se détournèrent de leurs anciennes valeurs et tombèrent dans l’impiété. La Flamme ne toléra pas leur échec et, le dernier jour de Genosia, elle consuma tout le pays. Depuis dix-huit siècles maintenant rien n'y pousse, et rien n'y vit.
Cinquante-cinquième jour de voyage
J'ai abandonné mes derniers bagages. Mon armure est depuis longtemps inutile. Il n'y a pas un seul ennemi dans ces contrées isolées autre que ce ciel ardent. Je me suis couvert la peau et la tête avec les lambeaux de mes habits pour m'en protéger. Autour de moi, out oscille entre le gris et le blanc. Ma peau elle-même à pris une teinte morte. J'oublie peu à peu les couleurs. Seul mon cadran journalier qui continue de mouvoir ses aiguilles d'or me rappelle l'éclat du monde.
Cinquante-sixième jour de voyage
Je n'ai plus d'eau. Cette précieuse denrée dont j’économisais chaque goutte me manque affreusement. Le soleil implacable me cuit sur place ; ma sueur s'évapore en petites fumerolles.
En fin de journée j'ai cru voir un oiseau dans le ciel, mais j'ai dû me tromper. Mon esprit me joue des tours et ma bouche a un goût de poussière.
Cinquante-huitième jour de voyage
Il ne me reste presque plus que ce carnet où je relate mon périple. Il servira de guide à ceux qui trouveront mon corps si je ne m'en sors pas. Et pour peu que quelqu'un me découvre un jour.
J'ai bien sûr conservé le bracelet du Terminateur. J'ai dû braver les bastions de Ker-Goroth pour m'en emparer ! L'empereur Lahamiir le désire tellement.
Je m’appuie sur Ancarodalisque, mon épée, bénie par Élester lui-même. Combien de monstres, combien d’armées ai-je écrasés avec elle ! Mais à présent, mon ennemi n'est pas palpable. Je ne peux le vaincre par la force. Quelle ironie pour le plus grand combattant de tout Branwen, de mourir de soif.
Ma peau s'est desséchée depuis longtemps. L'horizon est vide. Mes mains craquelées sont striées d'un rouge terne ; aucun sang ne coule de ces déchirures. Ma chair est exsangue.
Soixantième jour de voyage
J'ai repris connaissance. Je crois que je me suis effondré. Devant es yeux dansent des formes qui n'existent pas.
J'ai toujours pensé que je mourrai dans un combat mythique contre quelque adversaire fabuleux. Mais il semble que ma destinée sera similaire à celle de beaucoup d'autres. La disparition dans l'anonymat. Personne ne versera la moindre larme sur mon corps. Je demeurerai sans sépulture. Ma bouche est devenue sèche et crépite doucement comme un buisson d’épines brûlé. J'ai l'impression de me momifier vivant. Lorsque je tousse, mes dents se déchaussent.
Soixante-et-unième jour de voyage
Il y a quelques minutes, un grand bruit s'est fait entendre. À quelques distances, une guivre hurlante a jailli de la cendre. Elle est mourante, tout comme moi. Ses écailles sont craquelées et elle respire difficilement. Elle n'arrive même pas à ramper dans ma direction. Je remercie le destin qui me l'envoie. Malgré son état, il doit rester assez de sang en elle pour que j'espère m'abreuver. Sinon, mieux vaut disparaître avec panache.
Je vais laisser ce carnet ici. Je pense que je n'en aurai plus besoin. Bientôt, Ancarodalisque au clair, je chargerai le monstrueux serpent. Qu'Élester m'ait en sa sainte garde !
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« — Et… fumble ! Désolé, mais la guivre esquive ton assaut et t’arrache la tête. Échec de la quête.
— Et merde, saleté de dés ! Après en avoir tant bavé !
— T'en fais pas. Je garde ta fiche perso et tu pourras te réincarner pour continuer.
— C'est pas un peu tricher ça ? »
Christophe hausse un sourcil et repose son manuel des Chroniques d'un Monde Ordinaire. « C'est moi le maître du jeu après tout. Je fais ce que je veux ! »
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