Oraison
Un homme venu ce matin de bonheur
Sifflotait un air enchanteur
Il m'a regardé avec attention
Les yeux pleins d'admiration
En toute saison je déploie ma verdure
Le temps m'a donné une belle envergure
J'appartiens à la famille des conifères
Exilé je vis isolé de mes congénères
Mes racines serpentent le long de la rivière
Ma cime domine le toit de vos chaumières
L'homme venu ce matin de bonheur
M'observe d'un air interrogateur
Je suis si fier d'entendre pour moi
Vos enfants chanter que je suis le roi
Pour eux je dessine de grandes ombres velues
Sur les murs de leur chambre à la nuit venue
Cruel émoi des dents agrippent mon torse
Plantées en moi elles déchirent mon écorse
Mes aiguilles se dressent et l'agressent
Mais ne le blessent que de caresses
Sa lame s'enfonce dans mes veines
Coule en flot ma sève de l'aubier
L'homme est venu ce matin pour m'assassiner
Une à une au sol tombent mes ailes
S'enfuit l'essence de mon être
Nul n'arrête l'homme décidé à tuer
Dans une folle murmuration
Les oiseaux descendus de la canopée
Accompagnent mon âme esseulée
Dans son envol d'une intime oraison
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