Je me sens bien ! Enfin, j'ai réussi ! je suis bien ! Au calme, tranquille, rien ne vient troubler cet océan de pureté. Tout est blanc, cotonneux, laiteux. J'ai atteint mon but, enfin ! Quelle douleur pour y arriver ! Mais cela en valait la peine. Je profite de ce calme et de cette douceur. Je me trouve enfin loin de toute la tourmente que je connaissais.

Tiens c'est inattendu, j'entends du bruit, une voix, douce et posée me demande:

— Salut, tu te réveilles ?

C'est bizarre, je n'entendais rien et puis cette voix insiste. Je fais quoi? Je reste ou je pars? J'ouvre les yeux ? Je réponds ?

— Allez ma belle, ouvre tes jolis yeux. Je sais que tu peux le faire ! Allez fais un effort ! Encore !

La voix est douce, tendre, masculine et un brin directive. Je ne sais pas ce que je dois faire? Qui pourrait m'aider ? Je me laisse tenter par cette voix ? Je suis si bien ici, au calme. J'ai chaud, je ne souhaite pas quitter cet endroit cosy, tout ce que j'aime, mais cette voix insiste. Je fais quoi ? Il faudrait que je prenne une décision. Il à l'air de persister. Et si j'ouvrais un oeil pour savoir ce qu'il veut ? Je ne risque rien. Si cela ne devait pas me plaire, je ferme les yeux à nouveau et je retourne au chaud ? Non ? Cela ne me coûte rien.

— Allez ma belle, ouvre tes jolis yeux. Je te l'ai déjà demandé. Je sais que tu es capable de le faire.

J'ouvre un oeil. Je ne connais pas l'environnement dans lequel je me trouve. Ce n'est pas ma chambre, c'est beaucoup trop simple comme endroit. Les murs sonts nus, et le lit sur lequel je me repose n'est pas le mien, tout est blanc et j'entends deux choses : le bip d'un moniteur et la voix qui m'appelait tout à l'heure. Je tourne la tête et je continue l'inspection de cet endroit, surtout je voudrais savoir à qui appartient ces paroles. Qui est auprès de moi ? Qui prend le temps de s'asseoir auprès de moi et de s'occuper de ma petite personne ? Qui me demande d'ouvrir les yeux ? Je continue de découvrir mon espace et devant moi se trouve le péché originel à l'état pur. Quelle beauté ! Une copie conforme de Jared Leto, avec quelques années de moins. Je suis heureuse d'avoir des yeux. Dans quel merdier je me suis encore mise ? Pourquoi j'ai devant moi un mec canon qui me demande d'ouvrir les yeux ? Je n'ai pas réussi ce que je voulais faire. Merde ! Pourquoi ai-je raté ? Je suis Tania, j'ai dix-sept ans et j'ai essayé de me suicider.

Je referme les yeux malgré la bombe qui est devant moi. Je fais quoi ? Il faut que je me décide. Je reste dans mon monde blanc ou je fais la connaissance de ce Dieu grec ? Si je vois cet Apollon c'est que j'ai raté ce que je voulais faire. Ma gouvernante, Nancy dirait que les choses arrivent toujours pour une bonne raison. Alors j'ai raté mon suicide pour rencontrer ce bellâtre ?

Malgré tout, cette voix m'attire, une fois de plus, une fois de trop, je craque et j'ouvre les yeux. Jared Leto est toujours assis sur mon lit.

— Salut, ma grande, bienvenue. Tu ouvres enfin tes jolis yeux. Il en a fallu du temps.

— Salut, désolée, j'étais bien, comme dans un rêve.

— Je m'appelle Shannon et toi ?

— Tania, mais j'ai sommeil Shannon, je voudrais dormir.

— Fais de beaux rêves, je reviendrai.

Il se lève et dépose un baiser sur mon front. Ses lèvres sont douces et tendres, mais je suis bien dans mon cocon. Je ne veux pas sortir de cet endroit. Je n'aime pas le monde dans lequel je vis. Je veux rester ici au calme, mon monde ne m'apporte rien, pourtant vu de l'extérieur rien ne me manque. Je vis dans un monde de décadence. J'ai tout, le dernier Mac, les sacs Vuitton, le champagne au petit déjeuner, tout, tout de matériel. La décadence, c'est à cela que je pense quand je pense à ma vie ! Tout, sauf le principal. Tout, sauf l'amour ! Tout sauf la présence ! Tout, sauf l'attention ! Tout de matériel, mais en réalité, je n'ai rien, rien du tout !

Je viens d'avoir une marque de tendresse d'un parfait inconnu, je n'ai jamais vu ce gars, on ne se connait pas, mais il a déposé un baiser sur mon front. Mes parents ne se donnent même pas le peine de prendre des mes nouvelles.

Quelques minutes plus tard, une infirmière et un médecin entrent dans ma chambre.

— Bonjour Tania, je suis le docteur Berger et voici ton infirmière Anja. Shannon nous a dit que tu étais réveillée. Comment te sens -tu ?

— Bonjour, je ne sais pas. Si je suis ici c'est que j'ai raté mon suicide. Où suis-je ? Mes parents sont là ?

— Tu es à l'hôpital de la Trinité, tes parents ne sont pas là. Il y a une femme, Nancy, qui demande à te voir.

— Merci. Qui est Shannon ?

— Shannon est un patient.

— Ah ? Merci. Je souhaite me reposer docteur, désolée, au revoir.

J'ai besoin de réfléchir. J'ai envie d'être seule. L'équipe médicale sort de ma chambre et Nancy entre. J'ai fermé les yeux, je fais semblant de dormir, pourtant si il y a une personne que j'apprécie c'est bien cette femme. Elle a toujours été là, mais elle n'est pas ma maman. Nancy embrasse mes mains, passe sa main dans mes cheveux, puis elle s'en va. Je suis seule enfin. J'essaye de savoir pourquoi je suis ici, pourquoi j'ai essayé de me suicider, pourquoi j'ai fait la connaissance de Shannon, pourquoi, pourquoi, pourquoi ?