Les enfants et leurs parents

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Les enfants sont le sel de la vie, a ce qu’on dit.

Cela signifie que sans enfants notre vie serait fade, morne et ennuyeuse.

Les enfants ont toujours existé et ils existeront toujours.

C’est une étape, un passage vers l’âge adulte.

On ne reste pas enfant, heureusement, ou malheureusement pour certains adultes en manque de légitimité.

La vie se passe ainsi, l’enfant naît en pleurant de douleur lorsque le premier air lui brûle les poumons, puis grandit et évolue.

Il acquiert de l’indépendance, et la courbe évolutive stagne le temps nécessaire pour accomplir une vie en tentant d’éviter les écueils et les souffrances, à la recherche du bonheur.

La régression physique et mentale, dans un sens ou dans l’autre, voire en même temps, amène le stade de la vieillesse.

Enfin l’enfant devenu vieux pleure une dernière fois avant de mourir, surtout si les regrets sont là, témoins d’une vie normale en fin de compte.

Mais évoquons les différents stades de la vie d’un enfant.

La naissance est le premier stade, le lancement dans la vie.

Elle est le résultat de l’alchimie biologique entre un homme et une femme.

Elle est marquée d’un cadeau obligatoire et antagoniste, indissociable du contrat offert par dame Nature. La mort est livrée, mais sait se faire discrète.

Les enfants – que nous sommes tous finalement – représentent la vie sur notre vieille Terre.

Sans ce premier stade de naissance, l’extinction de la race humaine devient le lien de causalité

L’homme par simplification procrée donc, afin d’avoir une descendance, une succession.

Longtemps les enfants étaient d’intérêt différent ; le fils était considéré comme un cadeau, capable de combattre pour ses terres, de faire respecter la loi et de nourrir sa famille.

La fille se révélait utile pour aider à la maison, et avec un peu de chance on pourrait la marier à un parti intéressant.

Les gens avaient à l’origine des temps beaucoup d’enfants, non par choix ou par amour, mais pour préserver un minimum de survivants, capables de résister ou d’échapper à la maladie, aux mauvaises conditions de vie, et aussi d’éviter les attaques d’animaux sauvages.

Il n’était pas rare qu’un enfant atteigne l’âge adulte après qu’il ait perdu 7 ou 8 frères ou sœurs.

Aujourd’hui tout est différent. Les moyens de contraceptions et les contraintes de vie ont bouleversé le cycle des naissances.

Bien sûr les gens s’adaptent et naturellement tiennent compte de la situation.

D’ailleurs au lendemain de la grande guerre on a pu assister au baby-boom, tentant de repeupler les pays décimés par l’anéantissement de populations en raison de leur culture ou de leur religion, par la fin de vie atroce de centaines de milliers de soldats contraints de se battre entre frères ennemis.

Mais revenons aux enfants, finalement la source de la vie et le seul moyen de perpétrer le maintien de la vie terrestre.

Passons au deuxième stade de cet exposé. L’enfant est né, il entre dans la phase du bébé.

Un bébé pendant longtemps, qui torture ses parents - involontairement certes - car son expression ne se limite qu’à des pleurs. Il pleure car il a froid, car il a trop chaud, car il a faim, car il souffre, car il est sale…

Les parents, ne déchiffrant pas ce mode de communication préhistorique, ne peuvent que tâtonner et tenter de trouver la bonne raison aux pleurs de leur rejeton, de façon urgente, sous peine de hurlements redoublés de leur progéniture.

Enfin les premières routines s’installent, par la connaissance des rythmes de son enfant. Il mange toutes les quatre heures, donc logiquement s’il pleure avant ce n’est pas ça.

On se croit fort alors, on est de bons parents. On déduit que son enfant doit être changé car ses pleurs et les odeurs de ses émanations digestives ne peuvent être dues qu’au petit pot à la Carotte Saumon Epinards qu’on a réussi à lui faire ingérer au dernier repas…

Enfin vient le temps de l’émerveillement ! il a dit papa, ou quelque chose d’approchant.

En tous cas c’est sûr il a dit quelque chose comme papa, maman non bien sûr il lui en veut trop de l’avoir privé de son bain permanent dans son ventre chaud et douillet.

On en sourit, on est fier et niais. On le raconte au bureau, sans se rendre compte que tous les collègues s’en foutent complétement, pour eux c’est le même niveau d’intérêt que les commentateurs de Guy Lux pendant les courses à la vachette du regretté Intervilles.

Ensuite l’enfant évolue très vite. L’acquisition de la position galopade à quatre pattes constitue un stress réel pour les parents qui en l’espace de trois secondes, le temps de jeter la couche sale, réalisent que leur enfant est déjà sur le balcon, prêt à tester son premier saut sans élastique.

La maison ou l’appartement deviennent terrain miné, on évite évidemment de marcher sur son enfant qui a décidé de se mettre dans les jambes de sa mère au moment où elle sort le gratin de pommes de terre du four, on l’équipe d’un casque en caoutchouc car il aime beaucoup se relever sous la table basse ou se manger les coins des murs, trop rapide qu’il est dans ses déplacements pour réaliser qu’il n’a pas encore l’ABS pour freiner sa vitesse.

Ce stress s’amplifie au premiers pas, rendant l’enfant dangereux pour lui et pour la sérénité mentale de ses parents. A lui les placards, tiroirs et autres trucs rigolos à casser. Tant pis pour la porcelaine que mamy avait ramené de Bretagne, avec son beau « Kenavo » incrusté en coquillage. Dommage pour le livre préféré de papa, dégoté dans la bibliothèque et dont les pages ont servi de support pour les dents du bambin et autres déglutitions non voulues.

Enfin… cependant on est très fier. Il reste l’apprentissage de la propreté, fini la couche et vive le pot, toujours une surveillance de tous les instants pour s’assurer que le cher bambin ne va pas le retourner sur la moquette après avoir sauté de joie au premier pet.

Les premières années sont difficiles et coûteuses. L’enfant chéri et désiré fatigue et fait vieillir autant qu’un astronaute use ses artères de 10 ans en partant 2 mois dans l’espace.

On a dépensé tout un livret A en couches, pédiatre et autres lotions pour les fesses.

Le lait en poudre reconstitué a privé le papa de l’achat de son Whiskies 12 ans d’âge.

Les amis ont disparu, lassés des commentaires passionnés des parents sur le bambin nouveau venu et des soirées photos le montrant fier de son premier vomi sur le tapis, lassé des explications sur la méthode de stérilisation des biberons et de la technique du rot indispensable à la sécurité du bébé.

Avant avec eux on faisait des soirées pizzas bières et le pictionnary était de la partie, mais désormais ils ont peur de venir, on ne sait vraiment pas pourquoi…

Même les grands-parents rechignent à tenter d’aider leur progéniture. Normal ils sont passés par là bien avant, et finalement ils préfèrent ne pas le revivre, prétextant qu’ils attendent que le petit soit autonome et désacralise ses parents avant de le prendre une semaine en camping-car pour aller visiter la Rochelle… Des lâches oui !

Alors la routine s’installe. Les promenades en poussette représentent le KOH-LANTA des parents, ce n’est pas pour rien que les poussettes à triple roue de VTT sont nées.

On peut aller courir en poussant son enfant, bien au chaud sous sa couverture, quitte à le faire vomir sur les dos-d’âne. Peu importe on est famille, on fait tout avec lui. Après tout il coûte si cher et il faut en profiter. On pourra le montrer à la voisine, qui enverra à la maman qu’elle n’a jamais pu saquer que son enfant – beau au demeurant – a dû la faire souffrir, et que d’ailleurs cela se voit encore à son corps et son visage fatigué…oh que son charmant mari doit souffrir de cette situation et de cette épisiotomie qui cicatrise mal.

Et puis l’enfant grandit, naturellement, et l’on se retrouve enfin un peu.

Certes la place à la garderie n’est pas acquise, maman reprend le boulot lundi et malgré une inscription sur la liste 6 mois avant la naissance on aura peut-être une place au dernier moment.

On y croit on espère. Sinon on prendra une nounou. Soit une dame connue et reconnue qui donnera des conseils incessants et nous dira que s’il dort mal c’est qu’il sent la tension négative du couple, soit une jeune étudiante sans expérience qui oubliera de le changer, dévalisera notre frigo et regardera la télé pendant que le cher bambin, échappant à sa surveillance, sera en train de voler un scooter pour aller acheter du schit.

Pourvu qu’il ne croise pas la BAC et nous en laisse un peu.

Car les parents à ce moment-là sont des zombies. Aucune concentration au boulot, un découvert bancaire qui frise le trou de la sécu, une vie sexuelle quasi-inexistante, un abandon des amis et un soutien relatif des grands-parents fait que leur vie se résume aux courses, car il manque toujours quelque chose, au ménage, car la maison est dévastée, et aux siestes, de préférence lorsque l’enfant dort puisque c’est la seule façon d’assurer à son réveil.

Enfin le bout du tunnel arrive. L’enfant passe en mode « Ado ».

C’est le troisième stade de son évolution.

Il est grand désormais. Il va au collège, il sait lire, compter, il fait du sport.

C’est un adulte miniature, qui veut sa place et le fait savoir. Pendant les premières années la partie est gagnée par les parents, le dialogue reste possible. Mais il grandit…et tout change.

Maintenant il revendique, il critique, il sait tout. Mais surtout tout est nul, sa vie, ses parents, ses potes, ses profs, la société, son argent de poche.

Lui il fera autre chose, jamais il ne bossera 8 heures par jour dans un bureau, comme ses parents. Il veut créer, réussir sans travailler, gagner des millions ou vivre sur une jonque, sauver la planète et devenir influenceur, ou mieux gagner des millions en jouant aux jeux vidéo ou en gagnant au merveilleux concours de Poker Star !

Il ne sait pas quoi faire, il se fait chier au collège, il en a marre de sa connexion pourrie qui plante quand il joue en ligne… bref il est chiant.

Et ces difficultés s’additionnent, comme lorsque l’on sort du commerce équitable de son patelin, ou la vie est moins chère, et que les achats économiques totalisent le salaire annuel d’un ouvrier chinois.

Si l’enfant n’est pas unique, comme en Chine, et que les parents, fous ou amoureux, de préférence croyants, ont décidés de le faire grandir en harmonie avec un ou des frères et sœurs, alors l’adolescence devient un jeu de guerre fait de disputes et de querelles incessantes, à qui devra débarrasser le lave-vaisselle ou mettre le couvert, étendre le linge ou passer l’aspirateur.

Les parents ont alors la mission sacrée de tenir la progéniture dans le droit chemin, en tous cas de faire le maximum pour les ouvrir à la culture et à la connaissance, de les guider et de les orienter en fonction de leurs affinités – que les enfants ont du mal à cerner – afin de les mener vers un avenir rassurant, qui ne doit en tous cas pas ressembler à un rêve de parent frustré.

Que ne peut-on voir sur les terrains de foot de parents destructeurs qui rêvent en secret que leur fils sera potentiellement le nouveau Zidane, hurlant leurs déceptions devant des enfants transis de peur.

Le rêve de tout parent est surtout d’éviter délinquance et drogue.

Souvent, le mariage devenu bancal suite à l’épuisement du couple vaincu par le temps plein de l’éducation explose dès que les enfants atteignent une maturité suffisante propre à garantir leur sécurité.

Finalement les enfants sont lancés. Ils font leur choix, prennent leur indépendance.

Les parents en sont fiers, ils les ont protégés, maternés, épaulés.

Ils ont accompli une mission d’amour et de renouvellement de la famille, évitant que leur nom de famille soit effacé de la mémoire collective.

C’est un devoir moral qui s’est accompli, un devoir patriotique et civique.

Après tout chaque vie est unique, aucun modèle n’existe, et la vie se construit ainsi.

Le parent, devenu grands-parents, se rappellera de dire à ses enfants qu’ils ne peuvent emmener le petit à la Rochelle en camping-car. Tu comprends ? s’il perd son doudou il aura besoin de sa maman !

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