le guerrier
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Le guerr
Il neigeait et un air froid et vif soufflait ; faisant grelotter les hommes, à moins que ce ne soit la peur. Ils attendaient, immobiles, les yeux rivés sur leur arme pour ne pas voir les tripes et le sang de leurs camarades que la neige n’avait pas encore recouverts et ils priaient pour que ce vent qui pourtant les glaçaient jusqu’aux os grossisse suffisamment pour dissiper l’écœurante odeur de mort qui leur donnait la nausée, si forte qu’elle semblait tout imprégner. Ils auraient voulu avoir de l’alcool dans leur gourde pour chasser le froid, pour se donner un peu plus de courage, pour oublier les abominations qu’ils allaient combattre. neigeait et un air froid et vif soufflait ; faisant grelotter les hommes, à moins que ce ne soit la peur. Ils attendaient, immobiles, les yeux rivés sur leur arme pour ne pas voir les tripes et le sang de leurs camarades que la neige n’avait pas encore recouverts et ils priaient pour que ce vent qui pourtant les glaçaient jusqu’aux os grossisse suffisamment pour dissiper l’écœurante odeur de mort qui leur donnait la nausée, si forte qu’elle semblait tout imprégner. Ils auraient voulu avoir de l’alcool dans leur gourde pour chasser le froid, pour se donner un peu plus de courage, pour oublier les abominations qu’ils allaient combattre.
Le colonel Boris arpentait la tranchée, prenant le « pouls » du moral de ses troupes. Il bénissait aussi ce blizzard qui s’était levée et la neige qui s’était mise à tomber, mais pour d’autre raisons. Cela avait contraint l’ennemi à une trêve inespérée. Il savait parfaitement que ses troupes étaient à bout et que si le combat avait duré ne serait-ce que dix minutes supplémentaires, il se serait retrouvé seul sur le champ de bataille.
À son passage les hommes redressaient les épaules et fixaient farouchement le brouillard au loin, mais le colonel n’était pas dupe. Ils étaient terrorisés, usés par un combat inégal. Comment aurait-il pu leur en vouloir ? Après tout ce n’était que de la bleusaille Livonienne, des paysans conscrits pour six longues années, envoyés au front. Six années ... en verraient-ils seulement une entière ?
Le Colonel s’arrêta, tandis qu’un moine passa, marmonnant des prières. Maudit prêcheur ! Ces prières raisonnaient comme une invitation à rejoindre Dieu. Il fallait que ses gars tiennent le coup, qu’ils combattent avec acharnement et oublient toutes les questions et les doutes. Lui aussi priait, mais pas pour son âme. Il priait pour que ses hommes ne distinguent pas dans son regard l’étonnement que les stratégies de combat utilisées par l’ennemi déclenchait chez lui ; pour qu’ils ne finissent pas par penser, tout comme lui, que ce combat était déjà perdu, mais qu’il fallait le mener à bien, pour l’honneur, parce qu’on est des hommes et qu’on ne doit jamais capituler devant des bêtes !
Le regard du colonel glissa sur un jeune soldat, presque un enfant, certainement pas un homme ; et pourtant il était là, le visage couvert de boue, de sang et du suif de l’artillerie. Dans l’uniforme rembourré qu’il portait, il ressemblait à un gamin qui s’est déguisé avec les vêtements de son père. Il y en avait tant d’autre comme lui dans cette tranchée, des enfants que leurs pères avaient amenés avec eux pour se battre pour l’empereur, des enfants qui ne reverraient pas leur mère...
Le Blizzard tombas en un instant et une rumeur monta de la brume. Tout le monde cessa de parler, de chanter, de prier et probablement de respirer. C’était un mélange de cris bestiaux, de grognements, de pas lourds et de Dieu seul sait quoi encore. Bientôt les contours incertains des silhouettes des plus grands apparurent à travers la brume. Boris empoigna fermement son épée de ses deux mains et relança le marteleur de son armure. Les vérins se mirent à chauffer. D’un mouvement sec, il arracha l’épée de la boue, dressant sa pointe à trois mètres.
Il n’eut pas besoin de lancer l’ordre d’attaque. Ses hommes jaillirent hors de la tranchée, courant vers les démons avec l’énergie du désespoir. Boris se rua vers un ennemi, serrant la garde de l’épée contre sa poitrine, lame pointée vers le ciel. C’était un monstre de cinq mètres, doté de multiples bras aux contours acérés évoquant les patte chitineuse d’un insecte. Le colonel brandit son arme au-dessus de lui et, d’un bond, quitta le sol comme si les lois de la gravité avaient été abolies.
Il était seul désormais, avec son arme et son courage.
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15 - Péripétie externe et récurrente - Rêve de bataille
les cauchemars et les résurgences
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