Naia
En début de soirée, Bilal m’a déposée chez sa sœur, Naia, à quelques kilomètres du centre-ville. Elle vivait dans un appartement au rez-de-chaussée avec son époux et ses deux nourrissons. Arman et Jaddi, les jumeaux malicieux aux boucles noires, suivaient partout leur mère à quatre pattes. Je les ai salués tous les trois en remerciant Naia de m’accueillir à la dernière minute. C’était une femme très calme, douce et sans exubérance, contrairement à son aîné. Lorsqu’il est parti, elle m’a invitée à poser mes affaires et à disposer de la salle de bain. Puis, je me suis assise près d’elle pour faire connaissance. Après s’être toutes les deux présentées, la discussion ne prenait pas aussi facilement qu’avec Bilal. Il semblait y avoir un gouffre culturel entre nous. Nos vies étaient si différentes. Épouse au foyer avec ses deux bambins, elle vivait en Islande peu et disait s’y plaire. Elle semblait comblée par son rôle de maman, bien loin des bavardages impudiques de son frère. Pour sûr, nous n’aurions pas de conversations aussi abruptes qu’avec lui.
Finalement, le tchai qu’elle m’a offert a permis de nous raccorder au sujet de mon voyage en Inde. Naia et Bilal étaient originaires du Pendjab, une région au nord-ouest de l’Inde que ma sœur et moi avions en partie visitée. Comme elle parlait peu d’elle et n’osait pas me questionner, j’ai senti qu’elle appréciait que je fasse un pas vers sa culture de cette manière-là. Je lui ai confié que ma sœur et moi avions adoré les kulchas d'Amritsar, un genre de naan épicé qu’on ne trouve que là-bas. Elle s’en est émue et a promis de nous en cuisiner le lendemain.
Exténuée par le voyage, je me suis endormie à vingt-et-une heures dans le canapé. Mes paupières ont éclos douze heures plus tard. Je n’avais qu'un vague souvenir de pleurs de bébé ayant animé la nuit.
Annotations
Versions