32. D'un enseignement à l'autre
Le froid glacial avait fait place à une épaisse couche de neige en à peine quelques jours. Toujours un peu inquiet, à guetter que rien ne puisse infecter Lilith, Père Gabriel lui avait demandé de limiter ses sorties au strict nécessaire ; les promenades de Messi et les repas au réfectoire.
Afin de lui rendre le temps moins long, mais aussi de lui montrer que ses paroles n’étaient pas vaines, il la gardait auprès de lui, à l’infirmerie. La laissant faire connaissance avec cette part de lui-même, avec Docteur Cargent. Elle découvrait son univers, entre les lits, les soins et les patients. Il aurait cru qu’elle se lasse vite de son quotidien, parfois morose, voire franchement abject, mais Lilith y évoluait avec grâce et naturel.
Elle était la lumière des patients qui s’y trouvaient. Non seulement des soldats, mais aussi des souffrants venus des villages alentours. Les visages s’éclairaient à la vue de l’enfant, oubliant leurs maux et leurs tourments. Sa voix douce et pleine de vie les berçait de sa gaité, semant réconfort et chaleur dans leur cœur meurtri. Son sourire innocent illuminait leur journée. Ses attentions délicates, pour chacun, leur rendaient la force de se battre. Elle était l’espoir des civils et des militaires.
Lorsque les journées étaient calmes, elle leur lisait les livres qu’elle trouvait dans la bibliothèque du Père Gabriel. Les jours plus mouvementés elle l’aidait, dans la mesure de ses moyens, en le soulageant des patients atteints de troubles mineurs dont elle pouvait elle-même assurer les soins à force d’observation. Un jour qu’elle finissait la lecture dans le dortoir, où régnait un silence religieux, le Docteur Cargent vint la trouver, ses patients n’avaient plus besoin d’eux, pour le moment.
- Et maintenant ? Demanda-t-elle.
- Et maintenant, tu as une promesse à tenir.
Elle leva les yeux sur lui, sans comprendre.
- N’avais-tu pas donné ta parole à Elwinn de lui écrire ? Sourit-il. Je n’ai plus rien à t’enseigner de l’art de la lecture. Que dirais-tu de commencer à apprendre celui de l’écriture ?
Elle lui sourit. Malgré toutes ses obligations, il n’avait pas oublié.
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