La course du temps
C'est déc'vant de se dire que la vie n'appartient qu'à elle-même.
Je me contente de la suivre, de la pourchasser. Je lutte pour tenir le rythme. Le tempo est allegro et la cadence bat fort. Je cours des sprints derrière à m'en déchirer les jambes et les muscles. Je cours à perdre haleine pour la rattraper en vain... À chaque fois que je peux presque la toucher elle remet de la distance entre nous et s'enfuit plus vite que le vent. Dans ma course effrénée je titube, je manque de tomber, je me rattrape de peu mais je m'écroule parfois... Quand elle va trop vite... Quand elle prend un virage trop serré ou qu'elle fait un demi-tour violent. J'ai l'impression de faire des millions de tours de piste d'athlétisme sans jamais avoir le temps de manger, de dormir ou de reprendre mon souffle. Je cours toujours plus dans l'espoir de poser ma main sur son corps immatériel. Je rêve de pouvoir la toucher, juste l'effleurer sans qu'elle ne glisse d'entre mes doigts, sans qu'elle ne s'envole et s'échappe. Je suis épuisée de courir mais je continue sans relâche. J'ai mal aux jambes, aux pieds, au dos, aux bras, aux poumons... Ma tête me lance et mes genoux s'entrechoquent ce qui me fais vaciller. J'ai mal, à force de m'arracher dans cette course interminable. J'ai l'impression d'être nue alors que je suis vêtue de beaucoup de vêtements trop lourds pour mon petit être. Je sens le froid du vent qui souffle dans ma direction pour me ralentir. Il se glisse dans mes cheveux et me les détache, les laissant ainsi voler, s'emmêler et me gêner la vue en me cachant les yeux. C'est alors que j'entends un craquement, je n'ai pas le temps de réaliser que je suis déjà par terre. La douleur qui me broie est immense. Et les larmes qui fissurent mon visage me voilent un peu plus la vue. Je me sens terriblement mal… J'ai les chevilles brisées…
- Réveilles toi Nina ! Ce n'est qu'un cauchemar ma puce ce n'est rien…
- Je n'en peux plus de faire toutes les nuits ce même rêve… J'ai peur papa…
- Ne t'inquiète pas ma petite loutre ca va aller je te le promets.
Papa sourit doucement, mais je vois bien qu'il a les larmes aux yeux. Je sais que lui aussi a peur. Papa m'embrasse le front puis sort de ma chambre. Je l'entends pourtant encore… Il pleure…
Oh papa si tu savais…
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