réécriture

3 minutes de lecture

Baptiste

  Je rentre chez moi, lassé, traverse mon petit jardin, passe ma porte d’entrée et fais un petit bisou sur le front de ma femme avant d’aller m’affaler dans mon canapé. Mon chien me fait la fête, il veut jouer, mais non je suis trop fatigué pour m’en occuper. Je pourrais me reposer si j’avais mes mercredis après-midi, malheureusement ma pourriture de patron me les a refusés. “Vous n’avez pas d'enfant, vous n'êtes pas prioritaire”. Je ne veux pas d’enfants ! Je ne pourrais pas me reposer avec des mioches dans les pattes. Je suis cadre dans une entreprise d'informatique, je pense que je vais démissionner. J'en ai marre. Mon travail est exténuant, mon patron désagréable, et mes collègues sont mes amis principalement parce qu’ils sont mes collègues. Je n’ai aucune attache particulière avec eux, ni avec personne d'ailleurs. Tout le monde me semble fade et inintéressant. Je rêve de partir à l'aventure comme dans les films, au lieu de ça, ma vie est un éternel recommencement de la même journée. Elle ne ressemble a rien de palpitant, j’ai ma femme, mon chien, ma maison de plein pied et mon jardin. Mon psy m’a dit que ma principale fatigue était l’ennui. Ma vie est rythmée par l’ennui. Ça fait trois ans que je suis marié à ma femme. Mon couple m’ennuie profondément, je ne sais plus si c’est la bonne ou non, malgré tout ce qu’elle a fait pour moi.

  Et puis il y a cette serveuse, au bistrot de la pause du midi. Elle a l’air si mûre et si jeune, si savante et si innocente, qu'elle m’intrigue. On va manger là-bas avec mes collègues en sortant du bureau. Les matinées sont longues, et chacun aime se plaindre pour montrer aux autres qu’il est le plus malheureux. J’aimerais leur dire qu’il n’ont rien en comparaison à ce que je vis, mais qu'est ce que je vis ? Cette serveuse ne semble quant à elle jamais triste ou en colère. A chaque fois qu’on entre, elle nous fait un grand sourire accompagné d’un bonjour chaleureux. Et si le bonheur venait des choses simples. C’est vrai, servir dans un bistrot ne doit pas être bien compliqué et elle, comparée à nous, semble toujours comblée, toujours heureuse. Je ne la connais pas, mais j’ai une intime conviction que sa vie est simple et heureuse, avec un mari aimant et peut être des enfants. Qui sait ? Elle est la seule personne de mon quotidien que je n’ai jamais entendu se plaindre de la pluie, d’un mal de dos, ou de fatigue. Elle est peut-être le secret du bonheur que je cherche à atteindre.

Et pourtant…

Solène

  Ce soir, je rentre du bistrot, la journée a été longue, mais j’ai eu assez de pourboires pour acheter des glaces à mes deux trésors. Je rentre en vitesse prendre une douche et les aider à faire leurs devoirs. Ils sont si doués à l'école, je suis sûre qu'ils auront un grand avenir. La voisine me les a gardé le temps que je rentre, j’ai fait quelques heures sup. Quand j’arrive, ils sont douchés et en pyjamas. Je crois que je ne m’en sortirais pas sans elle, je n’ai pas les moyens de payer une nounou et avec mes horaires à rallonge, je fais une croix sur la garderie. Je leur fais une soupe au lait, ils adorent ça et les couches, avant d’aller me préparer pour la deuxième partie de ma journée. Ma tenue de travail est bien loin du petit tablier blanc de la journée. Le rouge à lèvre est de vigueur, tout comme les talons hauts et un ensemble de lingerie le plus sexy possible. Je mets une boite de capote en vitesse dans mon sac et pars sans faire de bruit, sans les réveiller. Je n’en suis pas fière, mais pour voir sourire mes enfants, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour ramener le moindre centime à la maison. Tant que je souris, ils souriront, et tant que je rirais, ils riront. Ce sont les prunelles de mes yeux, je ferai tout pour les protéger. La vie est une chance, il faut la saisir. Jamais ils ne connaîtront l’enfance que j’ai connue, l’absence d’une mère et la violence d’un père. Je m’en suis fait la promesse. J’ai 25 ans, on pense que j’en ai 20 ans de plus. Je crois que l’insouciance que je tente de faire paraître se dissipe peu à peu. Toujours le sourire, le calme, la bienveillance, et ne jamais oublier de combattre le destin, et de ne pas me laisser tomber dans l’abattement de ne pas avoir eu la vie que toute petite fille puisse rêver.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Léonie . ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0