Chapitre 16
Je me retourne.
Merde, manquait plus qu’elle.
Lilly a mis sa plus belle robe. C’est pas un endroit pour une petite fille !
Elle marche lentement, renifle. Sûrement l’odeur des cadavres. Elle a la moitié du visage brulée.
Comment elle a fait pour survivre à l’incendie ?
Elle me fixe.
Et continue de chantonner tout en admirant les corps ensanglantés.
- Laaaapppiinnn, murmure-t-elle à présent.
On est mal barré.
- Restez bien au fond et surtout ne bougez pas, c’est moi qu’elle veut.
- Mais ce n’est qu’une petite fille, me dit un client.
- Oui je sais et tout à l’heure c’était qu’un petit gros barbu et il a fait fondre la moitié de la salle en leur gerbant dessus.
Ils sont vraiment cons.
Je me retourne vers Lucy.
- Veille sur eux et que personne ne bronche.
« Oh, mais qu’elle est toute mimi ! Qu’est ce que tu fais toute seule ma jolie ? »
Merde je l’ai pas vu celle-là, ou celui-là … Jocelyne quoi.
Elle a rejoint Lilly pendant que je briefais les autres.
- Jocelyne, revient ! Ne t’approche pas ! je lui gueule.
Elle s’agenouille à hauteur de la petite, lui fait un grand sourire.
- Ce n’est pas un endroit pour une demoiselle, ils sont où tes parents ?
Lilly la regarde d’un air perplexe.
Elle ne comprend pas à qui elle a affaire.
Un homme qui se fait pousser des seins ? Ou une femme qui se fait pousser la barbe ?
En tout cas, ça a l’air de lui plaire, elle lui rend son sourire et se passe la langue sur les lèvres.
C’est mauvais signe. Lilly se met à trembler.
Sa peau noircit. Elle grandit à vue d’œil.
Jocelyne se relève lentement.
Elle reste scotchée devant sa transformation. Lilly dépasse désormais Jocelyne d’un mètre, ouvre sa gueule de sanglier et claque des mâchoires.
Le travesti n’a pas le temps de réagir que le colosse referme ses deux mains sur sa tête et la fait éclater.
Sa perruque, mélangée sûrement à sa cervelle ou du moins tout ce qui est censé se trouver dans un crâne, est projeté sur le plafond dans un « pffiittt » écœurant.
La foule panique, une fois de plus. Dure soirée pour eux. Ils se mettent à crier, partent en courant dans tous les sens. Lilly voyant ce joyeux bordel a décidément envie elle aussi de s’amuser et s’apprête à foncer dans le tas.
Elle ne sait plus où donner de la tête.
Regarde à gauche, à droite, y’a de la viande de partout.
Elle cherche la proie idéale.
Elle bloque. Elle l’a trouvée. Elle m’a trouvé.
Décidément, elle n’arrive pas à m’oublier. Je suis surement son premier amour de lapin ou bien elle n’a jamais bouffé de lapin d’un mètre quatre-vingt.
Elle charge.
Je suis foutu. Je ne veux pas mourir comme ça.
Á côté de moi se tient le canon qui m’avait gentiment dragué.
Je l’attrape par le bras, la tire et la colle contre moi, ses énormes seins contre ma poitrine.
Mort pour mort, autant en profiter.
Lilly arrive à toute allure.
J’embrasse la fille à pleine bouche, la regarde dans les yeux. Elle a l’air ravie malgré l’urgence de la situation.
- C’est dommage, j’aurais tellement voulu te rencontrer dans d’autres circonstances.
Elle soupire.
- Je vais te faire un truc que je n’ai jamais fait à personne.
Elle ouvre grand ses yeux.
Je l’attrape par la taille, la retourne… et la jette sur Lilly qui l’enfourche avec ses deux énormes défenses de sanglier mutant.
J’en profite pour me jeter à terre.
La fille hurle. Lilly la secoue dans tous les sens pour essayer de se dégager de son ventre moelleux. Je prends Lucy par la main et fonce vers la porte de sortie. Lilly me voit partir, s’énerve, réussi à se dégager et envoie valser le corps désarticulé de la fille.
Je me retourne, elle va trop vite.
Je pousse Lucy vers la porte. Je trébuche et l’immense corps poilu se jette sur moi.
Elle pèse une tonne. Ses genoux me bloquent les bras, son immense sexe me tapote les joues.
C’est assez dérangeant.
Je tourne la tête pour éviter de me faire biffler. Elle me renifle, approche sa gueule, un filet de bave me dégouline dessus.
Je sais maintenant ce que ressentait Franck Wash quand il me suppliait d’attraper son parfum… le parfum ?!
Dans un dernier souffle mais sans trop ouvrir la bouche quand même, on ne sait jamais ce qui pourrait y entrer, j’interpelle Lucy.
- Lucy ! Le parfum ! T’as toujours le parfum de Wash ?
Apeurée et maladroitement, elle fouille dans les poches de son manteau.
- Merde, merde, merde putain où je l’ai foutu ?
- Vite !
Lilly ouvre la bouche, oh mon Dieu qu’elle a de grandes dents…
- Je l’ai ! dit Lucy.
- Vite, asperge-la !
Je puise dans mes dernières ressources et plante mes deux genoux cloutés dans le dos de la bestiole. Elle relève son groin et Lucy lui vaporise dessus tout le contenu du spray. La salle est inondée de fraise-vanille.
Lilly renifle le parfum, lève ses genoux puissants de mes bras en morceaux.
L’odeur doit surement lui rappeler qu’elle est avant tout une adorable petite fille.
Ça a l’air de marcher. Elle se tient debout face à nous et petit à petit semble s’assagir.
Elle ne grogne plus mais semble ronronner.
Lucy me relève, m’écarte mais la situation semble hors de danger. Du moins pour nous.
La bête immonde est redevenue une gamine inoffensive. Je m’approche d’elle.
Elle me regarde, les yeux humides. Elle sait qu’elle a fait une bêtise. Elle sait qu’elle va être punie.
Je veux bien être sympa mais si on passe tout aux enfants, c’est vite le bordel.
Je lève ma carotte.
Lucy me donne son approbation d’un clin d’œil.
De toutes mes forces je lui enfonce sa tête dans ses épaules. Elle a perdu au moins vingt centimètres. Un jet de tripes et de merdes sort de son bas-ventre comme s’il l’on tapait sur un tube de dentifrice avec un marteau.
Je laisse tomber ma batte. J’ai les bras en miettes.
Plus de force. Comme Lilly je suis vidé…
Un dernier coup d’œil dans la boîte.
C’est le chaos. Il est temps de se barrer.
On sort du « Cachot », il est super tard. Les quelques clients survivants du carnage sont encore sonnés. Ils errent sur le trottoir ne comprenant toujours pas ce qui leur est arrivé.
Moi non plus d’ailleurs, tout s’est passé tellement vite. Depuis le soir où nous avons mis un pied au « Cherokee » j’ai l’impression d’être entré dans la quatrième dimension.
Heureusement tout ça est terminé.
Kermit est mort, ses lieutenants aussi. Sans leur chef, les autres membres de « L’équipe » devraient se faire discrets pendant un petit moment.
On va pouvoir reprendre une vie normale. Enfin normale, disons qu’on va pouvoir continuer à friter des gens normaux.
- Belle soirée pour crever ! me dit une voix dans mon dos.
Bon, apparemment c’est pas encore terminé.
Putain, j’ai envie de chialer.
Je me retourne lentement et fais face à un type masqué, et bien entendu armé d’un flingue pointé sur moi.
C’est un gars en costard cravate avec un masque rouge parsemé de petites étoiles jaunes.
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