Chapitre 43 Promenades - Partie 4
Après une heure de marche silencieuse, Tabatha, Sin fo et Hank, qui ouvraient la marche, furent interpellés par un vieil hembra qui les rejoignit au petit trot. Il les salua rapidement et s'adressa à Tabatha en inclinant respectueusement la tête.
- Pardonnez-moi si je vous offense mademoiselle, mais je dois vous poser une question. Je m'inquiète sûrement pour rien, mais cela me trotte dans la tête depuis ce matin.
- Je vous écoute, parlez sans crainte, l'invita Tabatha avec un sourire.
- Savez-vous où vous allez, mademoiselle ?
- Bien sûr, nous nous rendons à la capitale.
- Non, je veux dire aujourd'hui. Savez-vous précisément où vous allez, ou bien avançons-nous au hasard ?
Tabatha rougit et balbutia une réponse :
- Écoutez, je sais ce que je fais, d'accord ? Je n'en ai peut être pas l'air mais...
- Je ne doute pas de vous, s'empressa d'assurer l'hembra en s'inclinant. Je venais simplement vous proposer mon aide.
- Votre aide ? Vous connaissez bien la région ? Vous pouvez nous guider ?
- Non, aucun des miens n'a jamais voyagé aussi loin dans le sud. Non, ma réflexion, c'est que si vous n'avez pas d'itinéraire précis en tête, vous ne savez pas si nous risquons de rencontrer des ennemis. Pour ça, je peux vous aider.
- Vous pouvez sentir les ennemis, c'est ça ? C'est gentil de proposer votre aide, mais mon amie Sin fo se sert aussi de la magie comme ça.
- Taby, je t'ai dit que j'évitais de me servir de mes pouvoirs quand il y a des djaevels à proximité, intervint Sin fo. J'ai peur que leur maître ne puisse me repérer si je les touche avec mon esprit.
- Tu ne m'avais pas parlé de ça, dit Hank avec inquiétude. Je croyais que c'était sans risques.
- Ne t'en fais pas je suis très prudente. Je ne m'en sers qu'en cas d'absolue nécessité.
- Je suis désolée, je ne savais pas que c'était un secret, dit Tabatha avec une petite voix.
- Ce n'est pas un secret, se défendit Sin fo devant le regard que lui lança Hank.
L'hembra, qui avait suivi leur échange en silence, osa enfin les interrompre pour leur dire :
- Excusez-moi, mais je n'ai jamais dit que je pouvais sentir la présence des djaevels.
- Ah non ? Que pouvez-vous faire pour nous aider alors ?
- Je peux savoir ce qui nous attend sur le chemin. J'ai le pouvoir de parler aux oiseaux. Il suffit que j'en envoie quelques-uns en avant et...
- Vous parlez aux oiseaux, l'interrompit Tabatha. C'est vous qui en avez envoyé toute une nuée nous attaquer il y a trois ans ?
- Je... je crois, répondit l'hembra sur la défensive.
- Eh bien, je ne vous félicite pas ! À cause de vous j'ai été griffée partout sur les bras et le visage ! Il y a une cicatrice qui n'a jamais disparu, regardez, se plaignit-elle en soulevant une mèche de cheveux et en montrant une minuscule aspérité sur sa peau satinée.
Une terreur sourde s'empara de l'hembra et il s'inclina un peu plus en bredouillant des excuses :
- Je suis absolument navré mademoiselle. Je ne savais pas qui vous étiez à l'époque. Si je l'avais su, jamais je n'aurais eu l'audace...
Tabatha fut réellement surprise par la réaction du vieil hembra. Il est vrai qu'elle avait demandé à ses compagnons de voyage un peu plus de respect, mais elle n'aurait jamais cru les avoir impressionnés à ce point. Elle posa une main sur l'épaule de l'hembra, qui sursauta à ce contact, et tenta de le rassurer :
- Je ne vous en veux pas, vous faisiez ce qui vous paraissait juste à l'époque. Et puis au fond ce n'est pas très grave, conclut-elle en lissant sa mèche sur son front.
- Il faut excuser l'emportement de notre Taby, intervint Sin fo. Elle a horreur qu'on touche à son visage. Vous auriez dû la voir la première fois que j'ai menacé de lui couper les cheveux.
Le vieil hembra sembla se détendre et leur sourit. Tabatha retira sa main de son épaule et lui demanda :
- Donc vous pouvez contrôler les oiseaux ?
- Oui et d'ailleurs je ne suis pas le seul. Vous aussi vous en étiez capable, dit l'hembra en s'adressant à Hank.
- C'est vrai, reconnut ce dernier surpris. Comment le savez-vous ?
- C'est moi qui vous l'ai enseigné.
Hank décroisa ses bras et saisit la main de l'hembra qu'il secoua vigoureusement.
- C'est vrai excusez-moi. Je ne vous avais pas reconnu. Vous êtes Tek'listar, c'est bien ça ?
- Je ne vous en veux pas. Cela remonte à des mois. Et puis pour nous les hembras, vous aussi les humains vous ressemblez tous.
- Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire.
- Je vous l'ai dit, je ne vous en veux pas. Ce qui me chagrine, c'est que vous ne vous serviez pas de votre don.
Le visage de Hank s'assombrit lorsqu'il répondit :
- Je n'ai plus parlé aux oiseaux depuis des semaines. Depuis que j'ai perdu mon corbeau préféré.
- C'était plus qu'un animal pour lui. C'était un ami, expliqua Sin fo.
L'hembra hocha lentement la tête.
- Je comprends. J'ai fait la même erreur quand j'étais jeune. Ce sont des animaux très intelligents et très loyaux, mais il ne faut pas oublier que ce ne sont que des animaux, et qu'ils vivent bien moins longtemps que nous.
- Je sais tout cela, mais c'est difficile de ne pas s'attacher. Quoiqu'il en soit, j'ai trop de peine pour vouloir dresser un autre oiseau pour le moment.
- Vous n'avez pas besoin de les dresser. Avec votre don, il vous suffit de donner un ordre pour qu'ils vous obéissent.
- Même si j'acceptais, je ne vois pas en quoi les oiseaux pourraient nous être utiles en ce moment.
- Nous pourrions leur demander d'explorer les environs. Ainsi nous saurions si des ennemis se rapprochent de nous, et quelle est la route la plus sûre.
- Des éclaireurs, dit Sin fo avec un sourire.
- Exactement, répondit l'hembra heureux de constater que ses intentions avaient été rapidement comprises. L'avantage des oiseaux, c'est que nous pouvons en déployer des dizaines dans toutes les directions et presque sans danger pour eux. Ce sera beaucoup plus rapide et plus efficace que si nous envoyions quelques-uns de nos compagnons.
- Cela me semble une excellente idée, dit Tabatha avec entrain. Quand pourriez-vous le faire ?
- Immédiatement.
- Bien, alors au travail. Je vais ordonner à tout le monde de s'arrêter pour vous laisser le temps de vous préparer.
- Oh c'est inutile mademoiselle, je peux très bien leur parler tout en marchant.
- Décidément, vous, je vous aime, dit Tabatha avec un petit rire.
- Vous me flattez mademoiselle. Hank, voulez-vous m'aider ?
- Je ne sais pas si je pourrais encore...
- Hank, s'il te plaît, fais-le pour moi, demanda Tabatha.
Le jeune homme soupira.
- À tes ordres princesse.
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