Chapitre 50 Amère compagnie - Partie 1

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 Hank redescendit dans un état second. Ses dernières paroles tournaient en boucle dans sa tête. Il avait beau se les répéter inlassablement, il n'arrivait pas à y croire. Il venait de faire ses adieux à Sin fo. Il avait souvent imaginé ce moment bien sûr, et il avait souvent envisagé le pire, mais aussi étrange que cela puisse paraître, il n'avait jamais réfléchi à ce qui allait se passer après.

 Il avait souvent fait des cauchemars dans lesquels Sin fo apprenait la vérité et le tuait pour venger Reg'liss, mais il ne s'était pas attendu à devoir vivre avec. Il n'aurait jamais pensé devoir vivre sans sa femme. Le plus douloureux, c'était qu'elle ne l'avait pas retenu. Pire, elle l'avait repoussé.

 Hank savait que ce n'était pas la colère qui l'avait poussée à agir ainsi. Il avait entendu ses pleurs. Elle souffrait autant que lui de leur séparation, mais elle avait tout de même fait le choix de ne pas lui ouvrir la porte. À mesure qu'il avançait, Hank se faisait peu à peu à cette idée. Jamais plus il ne verrait sa femme. Cette partie de sa vie était désormais derrière lui.

 Mais sa vie n'était pas finie pour autant. Si sa femme ne voulait plus le voir, il y avait d'autres personnes qui avaient encore besoin de lui. Le pauvre Maxou était toujours prisonnier du maître des djaevels. Tabatha lui avait demandé de trouver un moyen de battre ce dernier. Hank savait qu'il devait se concentrer là-dessus, s'occuper pour ne pas sombrer. Il ne s'agissait pas d'oublier Sin fo bien sûr, mais elle avait pris sa décision, et il n'y avait plus rien qu'il puisse faire.

 Hank s'arrêta et se retourna vers l'hôtel de ville. Il leva les yeux vers les fenêtres du deuxième étage et adressa une dernière pensée d'excuses à sa femme. Puis il tourna la tête d'un air résolu et s'éloigna à grandes enjambées.

 Les soleils avaient désormais totalement disparu, et c'était une nuit sans lune, c'est pourquoi Hank eut énormément de mal à se repérer en ville. Ce n'est qu'après une bonne demi-heure de marche qu'il finit par apercevoir la lueur d'un feu à la sortie de la ville.

 Il crut d'abord qu'il s'était trompé de direction, car il vit trois silhouettes à la lueur des flammes, mais en s'approchant un peu plus, il reconnut Bruggar et Halbarad aux côtés de Jacob. Hank était si bouleversé en quittant Sin fo qu'il ne s'était même pas rendu compte qu'ils n'étaient plus dans la pièce en la traversant.

- Eh bien, mieux vaut tard que jamais, soupira Jacob en le voyant arriver.

- Excusez-moi, j'ai eu du mal à me diriger dans la ville, et l'obscurité n'a pas aidé.

- Si vous voulez qu'on s'entende, ne me mentez pas, le mit en garde Jacob. Bruggar et Halbarad m'ont dit où vous étiez. Tabatha vous a interdit de revoir Sin fo.

- Alors premièrement elle m'avait simplement déconseillé de le faire. Deuxièmement, j'aime beaucoup Tabatha, mais elle n'a pas à m'interdire quoi que ce soit. Et troisièmement, même si elle le faisait, c'était une histoire entre ma femme et moi et ça ne vous regarde pas. Alors si vous voulez que l'on s'entende, ne me prenez pas de haut, conclut Hank d'un ton cassant.

 Les deux hommes se toisèrent un moment en silence, puis Hank décida de désamorcer tout de suite le conflit naissant.

- Écoutez mon vieux, dit-il en soupirant, j'ai eu une journée assez difficile alors j'ai les nerfs un peu à cran. Je n'aurais pas dû m'énerver. Mais il n'empêche que si on doit traverser le royaume ensemble, vous allez devoir me faire confiance. Je ne comptais pas vous cacher que j'avais été voir Sin fo, mais vous m'avez agressé sans me laisser le temps de m'expliquer.

- Si on doit traverser le royaume ensemble comme tu dis, intervint Bruggar, il faudrait surtout que vous la fermiez et qu'on se mette en route. Parce que Castelroi, ce n'est quand même pas la porte d'à côté.

- Quoi ? Attends, ne me dis pas que tu viens avec nous, demanda Hank.

- Qu'est-ce que tu croyais ? Que je m'étais traîné là pour te souhaiter bonne route ?

- Je supposais qu'on ne serait que tous les deux, dit Hank à Jacob.

- Même si nous devons faire au plus vite, il n'est pas prudent de voyager en étant seulement deux. Tabatha m'a autorisé à trouver des volontaires, et j'ai pensé à Halbarad.

- J'ai passé toute ma vie à Castelroi, et je connais toutes les entrées du château. Et j'ai forcé Bruggar à m'accompagner car il est impossible quand je ne suis pas là pour le cadrer.

- Arrête de dire n'importe quoi, s'emporta Bruggar. Je viens de mon plein gré. Cet escroc que voilà, dit-il en désignant Jacob, nous avait promis un endroit calme pour mener une vie tranquille, et avant même d'y arriver, on apprend que vous autres imbéciles avez décidé de partir en guerre ! Alors je préfère aller risquer ma vie dans mon coin plutôt que de servir une nouvelle fois dans l'armée royale.

- Eh bien, la route promet d'être joyeuse, soupira Hank.

- Si ça ne te plaît pas, tu n'as qu'à rester là.

- Je n'ai plus ma place ici. Tu as raison, on a perdu assez de temps comme ça. En route.

 Hank s'était attendu à ce que le satyre le contre une nouvelle fois, mais ce dernier ramassa deux poches qu'il passa en bandoulière et une hallebarde posée contre un mur, et se contenta de grommeler comme pour lui-même :

- Pas trop tôt.

 Halbarad attrapa ses propres affaires, adressa à Hank un sourire mi-désolé, mi-réconfortant et d'un geste de la main l'invita à passer devant. Le jeune homme ajusta son sac sur ses épaules, vérifia machinalement que son marteau était bien à sa ceinture, et se saisit d'un brandon pour s'éclairer. Ses trois nouveaux compagnons l'imitèrent, et ils sortirent un à un de l'enceinte de la ville. Jacob ferma le portail derrière eux, et lâcha un juron à voix basse.

- Nous aurions dû demander à quelqu'un de nous suivre pour verrouiller derrière nous. Là c'est comme si cette porte était grande ouverte.

- Tant pis, nous n'avons plus le temps d'y retourner, lui répondit Halbarad. Et puis la région est sûre, nous n'avons rencontré aucun djaevel à des kilomètres à la ronde.

- Aucune région n'est plus totalement sûre, répliqua Jacob. Et rappelez-vous que les djaevels ne sont pas nos seuls ennemis.

- Qu'est ce que vous dites, interrogea Hank. De qui d'autre doit-on se méfier ?

- Sûrement de personne pour l'instant, éluda Jacob. Halbarad a raison, il est trop tard pour s'inquiéter. Allons, nous devons être le plus loin possible avant que les soleils ne se lèvent.

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