Petit Caillou
Dans un pays pas loin de nulle part, vivait un Caillou en mal d'amour.
Feu Rocher son père, sous la caresse d'un éclair, lui avait donné le jour.
Petit Caillou dans son gîte, tentait par tous les moyens de rejoindre le grand amour de sa vie : un ruban de gaieté, pailleté d'argent sous la lune et d'or au soleil. Un chemin de pluie, grouillant de vie et que chacun embrassait. Que ce soit les flèches d'écailles ou les broyeurs de sol, les plumes et les poils, elle les charmait tous, même Éole, qui souvent l'emmenait tournoyer, en brume maquillée.
Petit Caillou, écrasé de gravité, sans patte et sans bras, rêvait d'envies, de voyages et de danses à tout va, de rires à l'infini.
Qui se soucie d'une pierre, si sèche qu'elle ne peut même pas pleurer ?
Pas Éole, qui ne pourrait la soulever, pas son père, hélas éclaté !
Petit Caillou avait près de lui myriade de frères et soeurs, ronds, aïgus, indifférents à sa douleur. En bonne famille de rocs, ils ne cherchaient qu'à s'enfouïr sous terre pour que la concrétion les rende à leur nature première.
Petit Caillou, s'il avait eu des ailes, n'aurait plus jamais touché le sol. Il aurait joué et fleurté avec ce vernis brillant, rieur, habillant l'élan de son coeur.
Quand la nature est contre vous, que votre âme habite un mensonge, il faut une marraine pour animer vos songes. Il en est de légères, aimables ou cavalières, de sévères en sourcils et cheveux tirés et des marraines capables de tout dévorer effrayantes et sans nuances. Elles sont impossibles à souhaiter : un tremblement de terre aurait tout dévasté.
Alors le coeur de Petit Caillou se serrait, se serrait, exerçant lui-même sa propre concrétion de chagrin, il changea de nature et devint dans longtemps un diamant à l'état pur...
Vive l'Eau le remarqua enfin. Elle aperçut son éclat et crut un instant qu'il s'agissait d'elle, d'une division de son être : elle s'entichait tant, qu'ici et là parfois, elle laissait un bout d'elle-même.
N'ayant plus souvenance d'avoir là-bas aimé, elle voulait résilience pour cette part délaissée. Les petites vies l'aidèrent.
Amphibiens : gentils crapeaux, jolis grenouilles, salamandre des ruisseaux, allant venant de l'éclat à la rivière, ils créèrent un ru, un creux où Vive l'Eau se coula sans mal. Elle rejoignit l'éclat.
Stupéfaite, elle crût que son soi était devenu solide mais perçut en approche une âme moins liquide...
HO ! Quelle surprise, quel régal, un amoureux fondu d'eau, changé, son égal.
Elle enroula Petit Caillou dans son giron de vie, le fit danser et briller dans son lit. Elle l'aima tant et tant l'aima, qu'à l'emmener partout, à le rouler, elle l'usa...
En paillettes innombrables, il fusionna avec sa mie, la rendant plus belle encore, d'argent sous la lune et sous le soleil d'or.
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